Longtemps décriés par la population, les désagréments causés par les camions débarquant des fruits au marché « Syndicat » de Pikine peinent à être stoppés. Si on y ajoute l'insalubrité qui règne dans ce marché, c'est tout simplement le ras-le-bol des riverains qui ne cessent de lancer un cri du coeur. Ils en appellent à l'intégration de la prévention des encombrements dans la reconstruction du marché.
À bord d'un clando, nous nous dirigeons vers le rond-point Pikine Tally Boubess. Arrivé au stade Alassane Djigo, le véhicule est obligé de s'immobiliser à cause d'un bouchon provoqué par des camions stationnés le long de la route. Ils viennent pour la plupart de la sous-région où les commerçants s'approvisionnent en fruits qu'ils revendent au marché « Syndicat ». À l'intérieur du clando, le client, assis au siège avant, à côté du chauffeur, rompt subitement le silence qui règne à bord du véhicule. « Qu'est-ce qui peut bien bloquer la circulation ? », demande-t-il, en penchant sa tête vers l'extérieur. C'est le chauffeur du clando qui, calmement, affirme que le bouchon est provoqué par les camions stationnés le long de la route.
Piqué par une colère, l'un des deux autres occupants, assis à l'arrière, laisse éclater sa colère. « C'est ça le problème de Pikine ! Depuis plusieurs années, les camions nous font souffrir sans que le problème ne soit résolu », fulmine-t-il. Au bout de quelques minutes, le trafic reprend et, lorsque le clando arrive à hauteur du marché « Syndicat », le passager en colère martèle haut et fort que les camions doivent libérer toute la zone, après avoir déchargé leurs marchandises.
Nous descendons du véhicule et interceptons un passant. Pape Assane Touré se montre très enthousiaste à l'idée de répondre à nos questions. « Ça fait des années que tout le monde dénonce cet encombrement. C'est écoeurant pour quelqu'un qui a passé toute la journée au travail et qui se retrouve bloqué ici en rentrant chez lui à cause des camions », peste-t-il, déclarant, toutefois, que ce marché est d'une utilité incontestable même pour la population. Cependant, il estime qu'inversement, il est aussi source de galère pour ceux qui empruntent la route qui le traverse.
Mor Sène, propriétaire d'un étal de fruits, se montre, à son tour, intéressé par la question sur l'encombrement provoqué par les camions. « Il est vrai que ces derniers approvisionnent le marché, mais ils nous causent un énorme préjudice », commente-t-il, tout en désignant une table entièrement camouflée par un camion. « Regardes ce camion, il y a des tables et des étals derrière. C'est sûr que leurs propriétaires n'ont aucune chance de vendre leurs marchandises, aussi longtemps que ce camion est là. Parce que, tout simplement, on ne peut pas acheter quelque chose qu'on n'a pas vu », soutient-il.
L'insalubrité aussi indexée
À l'intérieur du marché, un vendeur que nous avons rencontré, devant un magasin chargé de fruits divers, est moins dur avec les propriétaires de camions. « La présence des camions indispose à la fois le voisinage et les vendeurs, mais il faut comprendre qu'ils ne peuvent pas s'immobiliser longtemps sur les lieux. C'est pour cette raison qu'ils s'empressent tous de décharger leur marchandise ; ce qui leur éviterait de payer des taxes supplémentaires. C'est cette course contre la montre qui est à l'origine des encombrements », relève cette personne anonyme.
Pourtant, en parcourant le marché, on se rend compte, aisément, que l'encombrement n'y est pas la seule source de galère pour la population. L'insalubrité qui y règne en rajoute une couche. Parmi les parties les plus touchées, figure la route principale. Elle est sale, crevassée et parsemée de nids de poule que se disputent les véhicules qui la traversent, les camions en stationnement (parfois en mouvement). Le côté situé près du mur du stade Alassane Djigo n'est pas épargné, de même que la pénétrante reliant Tally Bou Bess et Tally Icotaf. Un sentiment largement partagé par les jeunes rencontrés aux abords du marché. « Nous sommes les premiers à déplorer l'insalubrité qui règne dans ce marché. C'est nous qui respirons l'air fétide qui se dégage des ordures issues des fruits », témoignent-ils.
Visage hideux du marché
Issa Ndiaye est un rabatteur. Il dit ne pas comprendre que les autorités rechignent à moderniser ce marché sous régional, fréquenté par plusieurs nationalités. Même réaction chez Fatoumata Baldé, une jeune femme rencontrée à 200 mètres du marché. « Je ne suis pas fière du visage de ce marché qui est plus âgé que moi. Malgré tout, il présente toujours un visage archaïque, alors qu'il devrait être le premier des marchés de Pikine à être réhabilité », dénonce-t-elle. Elle évoque le cas du marché central au poisson qui, à son avis, est de loin plus présentable que « Syndicat ». « Si les autorités lui avaient accordé la même importance que le marché central au poisson, c'est sûr qu'il ne continuerait pas à garder cette apparence hideuse », soutient Mme Baldé.
Comme la plupart des riverains, notre précédente interlocutrice se désole de l'insalubrité permanente qui règne sur les lieux. « Parfois, tu n'oses même pas te promener dans le marché, tellement il est répugnant », se plaint-elle.