Tunisie: Gestion des biens publics - Le parc automobile de la Tunisie en panne

11 Juin 2023

Pour ce qui concerne « le cimetière » du parc automobile, les différentes administrations publiques ferment les yeux et ne prennent souvent pas l'initiative de mettre en vente cette ferraille qui les encombre. En fait, les procédures de toute mise en vente obéissent à des législations tellement compliquées qu'il serait suicidaire pour un responsable de s'y aventurer.

Imaginez un peu 17 terrains de football, tous remplis de voitures ! C'est énorme non ? Eh bien, c'est à peu près l'image que nous pouvons donner de ces 15.000 voitures administratives complétement en panne ! C'est le chiffre qui a été donné par le ministère des Domaines de l'Etat et des Affaires foncières. Encore plus impressionnant, c'est le nombre total des voitures administratives, fonctionnelles cette fois. Ce sont 95.000 voitures. Ce qui représenterait là encore à peu près 2,2 fois la surface de la Grande muraille de Chine si l'on mettait ces voitures bout à bout.

« Au sein de chaque administration tunisienne, il existe un triste cimetière de voitures administratives ». Le professeur d'économie à l'Institut des hautes études commerciales de Carthage, Moez Souissi, n'est pas du tout étonné par ces chiffres qui traduisent, selon lui, une politique de l'Etat tunisien incapable, depuis des années, à faire le choix de résorber le parc automobile au profit du développement des transports en commun.

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Ce choix de développer les transports publics a été fait par plusieurs pays développés notamment la France, l'Allemagne et les Pays-Bas, pour réduire de manière drastique le parc automobile avec un double objectif : d'abord, réduire les dépenses de l'Etat en matière d'entretien et de nouvelles acquisitions, ensuite, réduire l'impact écologique de ces voitures qui circulent généralement en centre-ville. En effet, l'empreinte écologique peut être très lourde.

Plus proche de nous, géographiquement et en termes de développement, ce choix a été amorcé par la Maroc, qui a développé dans la capitale, Rabat, un réseau de tramways moderne qui est très vite devenu une alternative pour les déplacements professionnels.

Pour l'universitaire, ces chiffres cachent également l'incapacité de l'Etat à mieux payer ses fonctionnaires (notamment les cadres), en leur faisant miroiter souvent les avantages en nature, à l'instar de la fameuse et sacrosainte « voiture de fonction ». « L'Etat ne veut pas assumer la responsabilité de payer un peu plus ses cadres, qui devront ensuite se débrouiller sans les avantages en nature », explique-t-il.

Cette fausse bonne idée de l'Etat tunisien fait qu'il se retrouve acculé à débourser chaque année des sommes faramineuses pour l'acquisition de nouveaux véhicules, pour l'entretien, ainsi que l'achat de carburant.

En ce qui concerne « le cimetière » du parc automobile, les différentes administrations publiques ferment les yeux et ne prennent souvent pas l'initiative de mettre en vente cette ferraille qui les encombre. En fait, ce que nous explique l'universitaire, c'est que les procédures de toute mise en vente obéissent à des législations tellement compliquées qu'il serait suicidaire pour un responsable de s'y aventurer.

« Il faudrait que cette initiative émane des hauts responsables, notamment les ministres, pour encourager la mise en vente en l'état ou en pièces détachées de ces 15.000 véhicules », précise Moez Souissi.

Dans un document de 2018, le Fonds monétaire international estime « la corruption et la mauvaise gouvernance engendrent un accroissement des inégalités et un affaiblissement de la croissance inclusive ».

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