Madagascar: Moeurs et mode - Du tabou à la fashion

L'interdit d'autrefois devient la tendance d'aujourd'hui. Régression ou progrès ? Les interprétations sont diverses. Le temps passe, les anciennes lois sont d'ores et déjà caduques aux yeux de la jeunesse malgache.

La mode souffle depuis l'occident, il en résulte une nouvelle ère. « Pouvons-nous faire quelque chose ? », se demande un traditionaliste avec un visage désespéré. Difficile de répondre, mais, il faut d'abord que les adolescents sachent pourquoi les ancêtres ne se couvraient pas d'autant de tatouage que Wiz Khalifa, ou d'autant de piercing comme certaines chanteuses américaines.

Marquer son corps est une honte pour la plupart des groupes humains à Madagascar. Cela remonte à la traite des esclaves. Ceux-ci, capturés sur les côtes africaines, avaient sur leur peau les marques de leur propriétaire. Déportés dans la partie Nord-Ouest de la Grande Ile, ils fascinaient les autochtones. Pasteurs de vocation, les Sakalava les considéraient comme des zébus, car à cette époque dans cette contrée, seuls les animaux domestiques étaient tatoués de la sorte.

« Un vrai Sakalava, Antakarana ou Anjoaty ne marque pas sa peau. C'est interdit. La tradition condamne fermement ceux qui le font. Et s'il est noble, il est déchu de sa position. Il sera bien sûr banni de la société », a fait savoir Monica Hasimiakatra, une noble descendante Anjoaty. De plus, le tatouage attire le mauvais sort selon la croyance. La marque fait que la personne devient impure. La preuve, lors du pèlerinage à Ambatoharanana-Vohémar, les tatoués n'y entrent pas afin de ne pas transgresser les us-et-coutumes.

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Le piercing, bien que cela soit une culture dans certains groupes ethniques d'Afrique, est fortement défendu dans les différentes régions de l'Île Rouge. Les femmes doivent seulement avoir une seule paire de boucles d'oreilles, pas plus. Le nez, la bouche ou la langue demeurent intacts. « Les Malgaches d'autrefois voyaient d'un mauvais oeil les femmes dont le nez était percé. Elles étaient assimilées à des prostituées. Et la prostitution n'est pas un métier pour la majorité des Malgaches. Voilà ! », a avancé Jacques Tsimiherindratsy, un passionné d'histoire de la région Ouest. Cependant, l'influence indienne faisait comprendre peu à peu le charme que dégage une jeune femme amatrice du piercing au nez. Ejema, dans son morceau « Zaza gasy », en évoque même la splendeur.

Chevillière. Les bijoux ne se mettent pas à la cheville surtout s'ils sont en argent ou en or. « Cela dégrade la valeur des pierres précieuses qui sont une richesse inestimable. Les parures sont censées décorer le cou ou l'avant-bras. Les anciens n'ont jamais accepté ce genre de tendance », selon un notable de Bobaomby. Du reste, les orfèvres et les miniers seront découragés en voyant leurs oeuvres orner les pieds ! À présent, l'effet de mode renverse les lois. Par conséquent, un conflit générationnel s'installe.

Les piercings, les tatouages, les chevillères ne sont plus les symboles de malédiction. Le tabou est révolu, place à l'usage collectif. « Les moeurs nous emprisonnent, ils nous figent. Cela faisait trois ans que j'ai percé mon nombril, je me suis également fait tatoué dans le cou. Il ne m'est rien arrivé. Je ne suis pas malade. Alors, je trouve cela absurde », confirme Aina Raharinimeva, une jeune femme de 23 ans. Effectivement, ses propos soulagent les nubiles. Faudrait-il laisser la coutume pour mieux avancer ? Une question qui aura des multitudes de réponses ! À vrai dire, chacun est maître de son choix. La mentalité et les croyances changent avec le temps.

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