La date du 8 juin 2023 marque une étape importante dans la mise en oeuvre des dispositions relatives au processus de Démobilisation, Désarmement et Réinsertion (DDR) de l'Accord pour la paix et la réconciliation au Mali. Elle consacre le lancement dans plusieurs villes dont Gao et Tombouctou du processus de réinsertion de 900 femmes associées aux groupes armés avec l'appui logistique et technique de la MINUSMA.
A Gao, les pionnières sont cinq femmes qui ont suivi une formation au Centre National de DDR de la région. Fatoumata Maïga est l'une d'elles. Cheffe de famille, elle a appartenu à un groupe armé pendant six ans. « Mon rôle c'était de faire la cuisine, la lessive et quelques autres tâches ménagères » explique-t-elle. Fatoumata confie avoir choisi cette option car elle se sentait « presque inutile car sans autre emploi ».
De sa séparation avec le groupe armé auquel elle appartenait, elle tire de la satisfaction. « Seuls les hommes allaient au combat. Aussi, seuls les hommes partaient à des rencontres importantes.
Aujourd'hui c'est nous qui sommes importantes ». Un nouveau chapitre semble s'ouvrir pour elle : « J'ai repris confiance en moi-même. Je ressens un immense courage pour avancer. Je sais que chaque femme peut aussi réaliser de grandes choses et j'exhorte les autres femmes à faire de même. Et aux femmes qui sont encore dans des groupes armés quelconques, elles doivent garder espoir et ne pas se décourager ».
A Tombouctou, parmi les 13 femmes présentes pour cette première, Fatou A TOURE fait le lien entre cette opération et la lutte contre la pauvreté. « Le financement des microprojets avec le processus DDR est une opportunité pour nous de créer notre propre entreprise mais aussi contribuer au recul de la pauvreté féminine, surtout au niveau rural » souligne-t-elle.
Fadimata Aicha WALET MOHAMEDINE confirme qu'il y a « des femmes dans les hameaux qui ne trouvent même pas de l'argent pour satisfaire certains besoins de leurs enfants. Grâce à cette action elles seront soulagées, nous sommes très contentes de ce que le Gouvernement fait avec l'appui de la MINUSMA pour faire avancer la paix ».
Ce processus de réinsertion des 900 femmes fait suite au Projet de réinsertion des ex-combattants (PREC), qui a déjà permis à de nombreux anciens combattants de retrouver une vie civile normale grâce à des projets économiques. L'objectif actuel est de renforcer ces efforts en se concentrant spécifiquement sur la réinsertion des femmes associées aux groupes armés, qui constituent une frange souvent négligée et vulnérable de la société.
Le colonel Bintou Maiga, Coordonnatrice adjointe chargée de la réinsertion socio-économique à la Commission nationale DDR, veut « veiller à ce que les femmes ne soient pas mises de côté quand il s'agira d'apporter de l'aide à ces personnes ». A Tombouctou, pour son homologue Firoun MAIGA, « cette étape constitue un maillon d'essai stratégique, qui permettra de comprendre comment accompagner les femmes impliquées dans l'accord de paix.
Les projets, qui seront financés, permettront à ses femmes de produire, de faire de la rétention en ce qui concerne la violence et faire comprendre aux combattants que la paix vaut mieux que tout » a-t-il ajouté.
Le processus de réinsertion comprendra des activités d'orientation, de conseils et de formation professionnelle, ainsi que la fourniture de kits et un suivi régulier. Lors de la première étape de ce processus, les femmes ont été enregistrées et ont reçu une carte d'identification après vérification minutieuse de leur identité.
Elles ont également reçu une consultation médicale. En dernier lieu, elles reçoivent un kit d'objets utilitaires et sanitaires pour usage domestique. Ces femmes, originaires de Gao et Ménaka et ayant appartenu à différents groupes armés, sont ensuite remises à la disposition d'une équipe de formateurs et d'agents techniques de suivi.
Le gouverneur de la région de Gao, le général Moussa Traoré qui a présidé la cérémonie pour l'enrôlement des femmes, a tenu à magnifier leur courage. Il a appelé les femmes à redoubler de sérieux dans les activités qu'elles entreprendront dans leur nouvelle vie civile. « Vous avez un défi de réussite ; un défi de montrer l'exemple. Donnez-vous entièrement pour que vos camarades qui vous suivent puissent bénéficier elles aussi de ce programme », les a-t-il exhortés.
La cérémonie a réuni les principales parties prenantes de l'Accord, y compris les représentants de l'État malien en charge du DDR et de l'intégration, ainsi que des agences onusiennes. La cheffe du bureau régional de la MINUSMA à Gao, Mme Hawa Ahmed Youssouf, a souligné l'importance de cet événement, déclarant que cela témoigne de la volonté commune de toutes les parties de parvenir à la paix et à la stabilité au Mali.
Ce « moment historique » pour tous les acteurs impliqués dans le processus de paix au Mali, selon Hawa Ahmed Youssouf, Cheffe du bureau régional de la MINUSMA à Gao, constitue une grande étape franchie dans un processus qui a nécessité l'adhésion effective des parties prenantes de l'Accord pour la paix et la réconciliation au Mali.
« C'est une preuve de la volonté des autorités administratives et coutumières, du Gouvernement, des groupes signataires de l'Accord, des organisations de la société civile, des femmes et des jeunes ainsi que la communauté internationale d'atteindre l'objectif : Paix et Stabilité au Mali », a ajouté Hawa Ahmed Youssouf.
Mêmes impressions pour Mamane Sani Moussa du bureau régional de Tombouctou qui a réitéré l'accompagnement de la MINUSMA pour la paix et la stabilité dans les régions de Tombouctou et Taoudenni tout en saluant la bonne collaboration avec les autorités locales de ces localités.
La MINUSMA a investi plus de 734 millions de francs CFA dans cette opération. Pour les femmes ciblées, leur réinsertion socio-économique offrira une opportunité de reconstruire leur vie et de renforcer leur autonomie à plusieurs égards. Le processus continue à Gao jusqu'au 14 juin avec l'enrôlement d'une centaine de femmes, à raison de 20 par jour.