Dans les grandes villes du centre de l'ile, en particulier à Antananarivo et sa banlieue, la consommation de viande s'accroît progressivement par suite de l'augmentation rapide de la population.
En 1970, pour la capitale et ses environs, les abattages atteignent rapidement soixante-dix mille boeufs par an. Ils proviennent presque tous des savanes de l'Ouest et du Sud, par l'intermédiaire des marchés de Tsiroanomandidy surtout, mais chaque année, un peu plus d'Ambalavao dans la région de Fianarantsoa. Les longues marches qui conduisent les boeufs des pâturages où ils sont élevés jusqu'à la capitale, les épuisent.
Ils arrivent amaigris et fournissent une viande assez médiocre. « Comme ils ont toujours un bon squelette et souvent des organes sains, il est intéressant de leur rendre les kilos perdus, par une alimentation riche avant de les abattre » (H. Serres, directeur régional de l'Institut d'élevage et de médecine vétérinaire des pays tropicaux (IEMVT).
C'est ce que réalisent de nombreux éleveurs des environs d'Antananarivo, soit au sud-est de la ville du côté d'Ambatomanga, soit sur la route d'Ambatolampy près du marché d'Amboanjobe, soit sur les pentes nord-ouest de l'Ankaratra, près du marché d'Imerintsiatosika. Les boeufs maigres sont placés en stabulation dans une excavation creusée à flanc de colline et que l'on désigne par « fosse ». De cet emplacement, le boeuf reçoit toute sa nourriture.
« L'immobilité et l'abondance font qu'il engraisse de façon considérable. » Cette activité est importante. Dès 1950, on estime à six mille le nombre de boeufs de fosse « ombimifahy » abattus à l'abattoir de la capitale. En 1970, ce nombre atteint sept mille cinq cents. Cependant, comme tous les boeufs de fosse ne finissent pas dans cet abattoir car beaucoup sont tués en banlieue, il est certain que bien plus de dix mille boeufs sont engraissés chaque année. Les animaux sont, en général, achetés à la fin de la saison sèche, en octobre.
Le choix est voulu. Des marchands de bétail spécialisés vont acheter les bêtes au grand marché d'Ambalavao, à la limite sud des Hautes-Terres centrales, et les amènent dans la région d'Antananarivo où les éleveurs les rachètent. Le bétail le plus estimé provient des régions du Sud, notamment de l'Androy. H. Serres explique qu'on les recherche âgés, à la fin de leur croissance, voire très âgés, entre 8 et 12 ans, en règle générale. « Les grands formats sont les plus prisés. De même, on recherche les animaux qui ont au plus haut degré des caractères de finesse : tête légère avec un mufle petit et des lèvres fines formant un museau pointu ; cornes longues et effilées, membres fins, queue longue et fine. »
L'état de bonne santé des animaux est jugé en les faisant courir le long d'une montée. Au sommet, « ceux qui toussent ou qui soufflent anormalement sont éliminés ». Un procédé très efficace, témoigne l'auteur. Celui-ci commente également le choix du bétail à engraisser. Les animaux âgés ont un squelette déjà élaboré et leurs besoins phosphocalciques sont limités, ce qui favorisera l'opération dans un milieu très pauvre en calcium. D'après lui également, zootechniquement, les animaux fins ont plus d'aptitude à faire de la graisse que les autres.
« Le choix traditionnel se trouve ainsi en accord avec nos connaissances techniques pour le but recherché. » Concernant leur origine, l'Extrême-Sud de Madagascar est la région où la pluviométrie est la moins abondante et où la saison sèche est la plus longue. Les animaux se sont donc adaptés, par sélection naturelle, à profiter au maximum de la courte saison favorable, pour mettre rapidement en réseaux le maximum d'énergie afin de passer la longue période défavorable. « Cette aptitude est mise à profit pour obtenir en engraissement rapide. »