Sénégal: El Malick Ndiaye, secrétaire national à la communication de Pastef - «Il n'y aura pas d'élection sans Sonko, Khalifa Sall et Karim Wade»

interview

«Il n'y aura pas d'élection sans Sonko, Khalifa Sall et Karim Wade», dixit El Hadji Malick Ndiaye, dans une interview accordée au groupe Sud Communication (Sud Quotidien et Sud FM). Le secrétaire général à la communication de Pastef a par ailleurs, confié qu'Ousmane Sonko est de plus en plus isolé. Et pour cause, la seule personne qui s'occupait de ravitailler la famille du leader du Pastef, Djibril Guèye Ndiaye, en tant que son chef de protocole, s'est vu interdire l'accès à son domicile depuis jeudi.

Depuis le 1eᣴ juin dernier, Ousmane Sonko s'est emmuré dans un silence. Dans quel état se trouve-t-il aujourd'hui après sa condamnation pour corruption de la jeunesse à deux ans de prison ferme et une amende de 600 000 FCFA dans l'affaire Sweat Beauty ?

Ceci n'est qu'une suite de la série d'injustices que le président Ousmane Sonko subit depuis la création de Pastef. Tout le monde sait pertinemment que c'était une commande politique exécutée par un magistrat d'un système politique visant à éliminer un candidat à forte probabilité de remporter l'élection présidentielle de 2024.

Pourquoi parlez-vous de commande politique alors que c'est une affaire qui a opposé deux Sénégalais : Ousmane Sonko et Adji Raby Sarr ?

Une affaire qui a opposé deux Sénégalais mais qui a pratiquement vu l'ingérence de tout un État pour défendre une jeune dame. Qui défendait la dame Adji Sarr ? Il ne s'agit pas que de ses avocats. On a vu tous les dignitaires de ce régime qui ont passé pratiquement pendant deux ans sur tous les plateaux à charger le président Ousmane Sonko, à dire des choses ignobles sur lui, à essayer de ternir son image. Mieux, cette dame aujourd'hui est en tout cas entre les mains de l'Etat avec des agents des forces de l'ordre qui assurent sa défense. C'est pourquoi nous avons clairement dit qu'il s'agissait tout simplement d'un sordide complot pour éliminer le leader de l'opposition, le candidat qui fait le plus peur au Président Macky Sall et son camp.

Un tel verdict rend aujourd'hui inéligible Ousmane Sonko en perspective de la présidentielle de 2024. Face à cet état de fait, Pastef envisagerait-il de désigner un autre candidat ?

Nous ne cesserons jamais de répéter que le président Ousmane Sonko, encore une fois, est notre seul et unique candidat. Ça, c'est assez clair. Ce n'est même pas imaginable d'organiser une élection présidentielle au Sénégal sans la participation du président Ousmane Sonko. Il faut dire de manière très claire que ce n'est pas sur la base de ces deux dossiers que le président Sonko doit perdre son inéligibilité encore une fois. Peut-être, ce sera autre chose demain avec bien sûr des preuves claires etc. Mais là, il n'y a rien qui pourra empêcher le président Sonko de participer à la prochaine élection présidentielle. Nous savons tous que s'il y participe, il est le futur président de la République du Sénégal.

Sauf qu'aux yeux de la loi, il ne peut pas être candidat ?

On n'en est pas encore là, parce que nous savons tous qu'il ne s'agit pas de loi ou de justice mais de politique et ça se réglera sur le terrain politique.

Par rapport à l'affaire Mame Mbaye Niang, nous avons tous vu qu'il s'agissait d'une cabale politique très claire. Tous les Sénégalais, les juristes, les journalistes ont parlé de manière explicite, beaucoup plus précise que le président Ousmane Sonko, sur le scandale Prodac. Au lieu de faire un procès pour clarifier le scandale de nos 29 milliards, ils ont voulu activer une partie de la justice pour liquider le président Ousmane Sonko. Nous avons tous vu ce qui s'est passé. Ils cherchaient une condamnation de trois mois avec ou d'une amende de plus de 200 000 ou quelque chose comme ça. Quand le premier verdict a été rendu, ils se sont rendus compte que le président Ousmane Sonko n'a pas perdu ses droits même si nous refusons ce verdict-là parce qu'il n'y a pas eu de diffamation.

Par la suite, Ils se sont empressés de faire appel et le Procurer a porté l'affaire avant même le délai qui a été admis au président Sonko pour faire appel. Ce qui est illégal. C'était pour obtenir une condamnation qui allait altérer l'éligibilité du président Sonko. Il n'y a rien encore une fois.

Dans l'histoire du Sénégal, on n'a jamais non plus vu quelqu'un être condamné à deux mois seulement dans une affaire de diffamation ?

Ici, il ne s'agit pas de diffamation. Le président Sonko a dit clairement que le sieur Mame Mbaye Niang a été épinglé par ce rapport. Épinglé ne veut pas dire être coupable. C'est du français. Quand on dit «épinglé», ça veut dire qu'il y a un rapport qui a montré qu'il y a eu faute de gestion.

Sauf qu'il n'était pas capable de sortir ce rapport ?

On ne lui a même pas permis d'aller répondre. Vous vous rappelez de ce qui s'est passé à deux reprises quand il allait répondre ? Il a failli perdre la vie. D'abord, on a cassé les vitres de son véhicule. La deuxième fois, on l'a tout simplement bloqué, malmené, torturé avant de le gazer jusqu'à ce qu'il tombe malade. Qu'est-ce que ça veut dire ? Ça veut dire que c'était une commande politique et qu'ils se sont donné tous les moyens nécessaires pour appliquer cette commande politique. Mais, nous savons tous que c'était un dossier vide. Aujourd'hui, la seule chose qu'il faut clarifier, c'est où sont passés nos 29 milliards encore une fois. L'autre chose qui est importante sur le deuxième dossier, qui est encore beaucoup plus vide, il n'aurait jamais dû quitter la gendarmerie : l'enquête préliminaire parce qu'il y a le certificat médical, les témoins mais aussi les contradictions énormes sur les récits de la dame. Pendant deux ans, on nous parle d'instruction. Il n'y a jamais eu de preuves. Toutes les preuves qui existent dans ce dossier, ont été fournies par les avocats du président Ousmane Sonko : les audios, les vidéos, tous les témoignages.

Malgré tout, ils ont voulu forcer. Comment pouvez-vous imaginer que pendant deux ans, ils nous ont parlé de viol, de menace de morts et au bout, ils nous sortent un verdict inédit ? Le président Sonko est acquitté sur les accusations de viol et de menace de mort. Ils ont improvisé une condamnation que rien n'explique, dont nous tous ignorons l'existence. Ce qui est plus cocasse, c'est quand le Procureur lui-même dit qu'il demande qu'on condamne le président Sonko pour viol ou corruption de jeunesse sans instruction, sans enquête. Ils ne cherchaient qu'à éliminer le président Sonko sur le plan électoral, en même temps, essayer de le garder en prison.

Au-delà des accusations supposées ou réelles, Ousmane Sonko n'a-t-il pas failli à son devoir d'exemplarité en se rendant dans un salon de massage surtout en période de couvre-feu et de pandémie de Covid-19 ?

Non ! Dans la mesure où le président Sonko est libre de ses mouvements. Ce n'est pas une question d'exemplarité. On ne peut pas parler aujourd'hui d'exemplarité. Ce n'est pas ça le problème. Nous savons tous que Sonko est un homme responsable, un exemple pour la jeunesse. Ce n'est pas pour rien qu'il est devenu l'homme le plus populaire du Sénégal. C'est un citoyen qui est libre de ses mouvements, qui a le droit de circuler à ce que je sache à n'importe quelle heure dans ce pays. S'il décide d'aller au salon, d'aller au restaurant ou d'aller voir un ami, ce n'est pas un problème encore une fois. Le problème, c'est pourquoi vouloir comploter contre une personne.

La coalition Yewwi Askan Wi dans laquelle votre parti, Pastef, est membre, vient de sortir un communiqué mettant en garde certainement Khalifa Sall. Quelle est l'opportunité de ce communiqué d'autant plus qu'on sait déjà que Khalifa Sall a pris part au dialogue national ?

J'ai entendu certaines personnes dire que personne ne défendait Khalifa Sall. Le président Ousmane Sonko a passé deux à trois ans à défendre Khalifa Sall et Karim Wade. Il n'avait aucun problème à les défendre. Ils étaient tous les deux dans les liens de la détention. Il les a défendus. Il s'est toujours battu par principe contre la CREI, la condamnation de Khalifa Sall et autres. Il pouvait se dire : « si on les écarte, ça fera mon affaire». Non ! Il pouvait se dire Khalifa Sall a soutenu Idrissa Seck en 2019 et n'a pas soutenu sa candidature. Non ! C'est un homme juste, véridique qui se bat pour des principes. Et donc, c'est dans ce sens qu'il a lui-même, demandé à Kalifa Sall et à Karim Wade de se battre pour se faire justice. Parce que pour lui, ce n'est pas avec des négociations que Macky Sall va les rendre éligibles.

D'ailleurs, il a été très clair en le disant. Si on arrive à mettre en place des coalitions fortes, à aller ensemble aux élections locales et législatives, on pourra avoir la majorité et faire passer la loi qui va changer L29 et L30 du code électoral parce qu'il n'est pas question d'aller vers des amnisties. Pour nous, c'est très facile d'enlever ces astuces que le président Macky Sall a ajoutées au Code électoral, juste pour bloquer des adversaires politiques. Je dois vous révéler que juste après les élections législatives, le président Sonko a instruit le groupe parlementaire de Yewwi Askan Wi, particulièrement Guy Marius Sagna, à déposer une proposition de loi portant modification du Code électoral.

Bizarrement, cette loi n'a pas été soutenue par la plupart des députés de Wallu comme certains de Yewwi. Maintenant que Khalifa Sall a décidé d'aller au dialogue, pour nous Pastef, on n'a rien à dire sur ça. Mieux, que les leaders de Yewwi sortent un communiqué en se basant sur sa charte, c'est leur droit. Ils sont libres de le faire parce que Yewwi a décidé de ne pas y participer. Si Khalifa Sall décide d'y participer, il est libre mais Yewwi va continuer à exister dans le respect de la charte.

Nos confrères du «Canard Enchaîné» ont évoqué dans leur dernière livraison les liaisons qu'Ousmane Sonko aurait avec les Frères musulmans et le Qatar. Quel est votre commentaire ?

(Rires). Ça me fait rire. Ça me rappelle l'histoire du Tullow Oil. Vous vous rappelez de ça qui avait été écrit par Cheikh Yérim Seck et l'Observateur à la veille de l'élection présidentielle de 2019? C'est la même chose. Ça me rappelle aussi le cas de feu Imam Alioune Badara Ndao qui a aussi été chargé par l'Observateur qui parlait de ses liaisons dangereuses avec des terroristes et que des armes avaient été trouvées chez lui alors que c'était un tissu de mensonges. Ils l'ont mis en prison et quand il est sorti avec une santé fragile, malheureusement une ou deux années plus tard, il a été rappelé à Dieu.

Vous savez les commandes sont partout. Si Le Canard Enchainé l'a écrit, c'est parce que l'Etat du Sénégal a un problème. Vous savez, nous sommes nés ici. Nous sommes des Sénégalais. Nous n'avons pas une autre nationalité. Nous ne comptons pas vivre ailleurs. Nous comptons vivre dans ce Sénégal et changer le pays. Si c'est ça le terrorisme, c'est juste que ça les terrorise eux, les hommes du système qui veulent pérenniser leur bamboula. C'est eux qui sont terrorisés. C'est pourquoi ils sortent leurs mots comme «forces occultes». Au finish, ça amène la peur vis-à-vis même des autres pays. Le tourisme en souffre.

L'économie en souffre etc. Ils doivent arrêter cette farce. Quand le ministre de l'Intérieur avait fait une sortie pour dire qu'il y a des forces occultes ici, l'Armée du Sénégal avait démenti après l'épisode de mars 2021. Les forces occultes, ce sont eux qui dilapident les deniers publics, qui recrutent et exploitent la misère de la banlieue en recrutant des lutteurs, des agresseurs pour en faire des nervis pour faire face au peuple.

Mais on voit dans les manifestations des gens qui s'attaquent à des biens publics et privés. Par conséquent, ils ont d'autres motivations que manifester ?

Vous vous n'êtes pas dit que ce sont ces nervis qui le font pour le mettre sur notre dos ?

Ah bon ?

Aujourd'hui, les manifestations qu'on voit dans ce pays, ce sont des hommes, des femmes, des jeunes et des vieux qui n'ont que des pierres ou qui ne font que brûler des pneus mais ceux qui ont des coupe-coupe, des armes létales et qui opèrent aux côtés des forces de l'ordre, on les a tous vus et identifiés. Les reportages sont là.

Le délai qui était imparti à Ousmane Sonko pour pouvoir interjeter appel dans cette affaire-là est achevé. Va-t-il se constituer prisonnier pour faire reprendre le procès ?

Ousmane Sonko va se constituer prisonnier ? Ça, c'est un rêve. Il ne va jamais se constituer prisonnier. Ils ont fait leur farce jusqu'ici. Ils n'ont qu'à aller l'arrêter. Ce sont eux qui se sont mis dans le pétrin. Ils n'ont qu'à gérer. Ils ont instrumentalisé la justice pour qu'on en arrive là. Ils n'ont qu'à retourner voir la justice pour régler ce problème. Il y a eu une trentaine de victimes entre mars et maintenant. Ça ne va pas rester à pertes et profits.

Compte tenu de la situation socio-politique du pays d'aucuns mettent l'idée du report de la Présidentielle afin de redistribuer les cartes avec tout le monde. Partagez-vous cet avis ?

Personne ne pense à ça. Peut-être que ce sont eux qui lancent les ballons de sonde mais il n'est pas question de renvoyer une élection. Une journée de plus avec Macky Sall, c'est une journée en enfer pour le Sénégal. On en a assez ! Donc, il n'a qu'à organiser des élections libres et transparentes et laisser les Sénégalais choisir librement leur prochain président.

Présentement, ce sera sans Khalifa Sall, ni Karim Wade encore moins Ousmane Sonko

Une élection sans Sonko, Khalifa et Karim, ça veut dire qu'il n'y aura pas d'élection au Sénégal. Ce n'est même pas imaginable. Macky Sall a trois options ou trois actions à faire. La première, c'est de se mettre face aux Sénégalais et de dire : comme la Constitution le stipule, comme je l'ai répété plusieurs fois, je suis à mon second et dernier mandat. Je vais organiser des élections libres et transparentes pour ensuite partir.

La deuxième chose, c'est de libérer tous les prisonniers politiques y compris le président Ousmane Sonko qui est séquestré, qui est en prison. Il faut qu'on situe les responsabilités et que les coupables et les commanditaires soient arrêtés. Aujourd'hui, c'est là où nous en sommes. Macky Sall, c'est du passé. Mais il va quitter par A ou B.

La troisième chose à faire, c'est une enquête sérieuse sur les exactions qui ont causé la perte en vies humaines. Plus de 34 victimes. Il faut que les coupables et/ou les commanditaires soient arrêtés.

D'ailleurs, la seule personne qui avait accès au Président Sonko, qui est un proche de la famille et qui faisait le ravitaillement pour sa famille, qui s'occupe de son protocole, c'est M. Djibril Guèye Ndiaye. Mais depuis ce matin (jeudi-Ndlr) il est interdit d'accès chez lui.

Que répondez-vous à ceux qui soutiennent que le discours de Pastef ne rassure pas ?

C'est un gros paradoxe. Notre discours ne passe pas alors que notre parti est le plus populaire dans le pays. Quel est donc le discours qui rassure. C'est celui des «Systémards» comme je les appelle. (Eclats de rires).

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