Après la banque, Afreximbank investit le secteur de l'assurance. Une approche qui devrait permettre de capter plus de ressources pour mieux faire face aux défis qui interpellent l'Afrique.
Après la pandémie de Covid-19 et les effets du conflit russo-ukrainien, les pays africains doivent accélérer le rythme pour atteindre les objectifs fixés dans la mise en oeuvre de la Zone de libre-échange continentale africaine (Zlecaf). Mais, dans cette marche forcée vers un marché africain puissant, il est urgent de lever les barrières liées à l'accès aux ressources financières, selon le Professeur Benedict Oramah, président du Conseil d'administration d'Afreximbank. Il s'exprimait à l'occasion du 30e anniversaire de la banque qui a démarré hier à Accra (Ghana).
S'il est convaincu que la création d'un marché africain intégré dans le cadre de la Zlecaf aidera à démanteler un certain nombre d'obstacles au commerce intra-africain, tels que les droits de douane et les barrières non tarifaires, M. Oramah a affirmé qu'une contrainte majeure continue de limiter l'expansion du commerce africain. « C'est la dépendance continue à l'égard des partenaires externes et les insuffisances de l'architecture financière continentale pour stimuler la résilience économique et le développement », a-t-il dit. Et pour apporter une réponse à ce problème, son institution veut capter les ressources générées par le secteur des assurances avec la création de Afrexim Insurance Management Company « AfrexInsure », un outil clé de gestion du commerce qui devrait permettre aux entreprises de poursuivre des stratégies commerciales ambitieuses tout en réduisant les risques. « Les produits d'assurance et de réassurance sur mesure pour l'Afrique auront une influence significative sur la stimulation du commerce africain. En réduisant les risques liés aux transactions ou à l'investissement, l'assurance peut aider à faire avancer la stratégie commerciale pour ceux qui sont engagés dans le commerce intra-africain et permettre aux partenaires mondiaux de promouvoir leurs intérêts et leurs ambitions commerciaux en Afrique », a déclaré le président du Conseil d'administration d'Afreximbank.
Combler les déficits de financement des infrastructures et du commerce
Un positionnement nécessaire pour combler le déficit en infrastructures qui continue d'entraver la croissance du commerce africain. Il s'y ajoute que le transport aérien est toujours prohibitif et celui ferroviaire n'est pas une option en raison de l'absence d'infrastructures ferroviaires. « Le transport routier et maritime qui domine le commerce africain ne convient pas souvent à de nombreux produits en raison de leur caractère périssable et d'une durée de vie relativement courte. Et dans de nombreux cas, il manque des corridors routiers transfrontaliers », a expliqué Benedict Oramah. Actuellement, le gap d'investissement est chiffré à 120 milliards de dollars pour le commerce et 100 milliards de dollars pour le financement des infrastructures. « L'ajout de l'assurance au portefeuille des groupes aidera à assurer la disponibilité du financement. Il va aider également à atténuer les risques des grands projets et à s'insérer dans l'investissement nécessaire pour développer les réseaux d'infrastructures nécessaires au développement du commerce à travers le continent », a-t-il affirmé. Le président du Conseil d'administration d'Afreximbank se dit convaincu que l'introduction de solutions plus innovantes, intégrant les assurances au portefeuille de produits bancaires, contribuera à réduire les déficits commerciaux et d'infrastructures pour donner un nouvel élan à la question de la faible pénétration des assurances en Afrique, en particulier là où elle est fondamentale pour le mandat de développement commercial d'Afreximbank.
Chômage, pauvreté : « terreaux fertiles à l'insécurité »
William Ward, Général de l'Armée américaine à la retraite, n'y va pas par quatre chemins. « Point de développement sans sécurité », a-t-il déclaré, dimanche, à Accra, au cours d'un panel portant sur les défis de la sécurité en Afrique. Selon lui, la plupart des terroristes ne sont mus que par le gain. « C'est pourquoi le chômage des jeunes et la pauvreté sont devenus un terreau très fertile au fléau. L'Afrique doit pouvoir être assez solide pour ne pas être sujette à des influences extérieures. Les terroristes ont profité de l'instabilité des pays pour exploiter les ressources », a affirmé M. Ward. Poursuivant, il a indiqué que malgré les énormes sommes investies dans la sécurité, le défi reste entier. D'où son appel à plus d'investissements dans la création de richesses et d'emplois pour les jeunes. « La sécurité est indispensable si on veut accéder au développement », a-t-il insisté.
Ibrahim Agboola, Ambassadeur de la République du Nigeria, a préconisé, pour relever le défi sécuritaire, de régler les problèmes majeurs qui assaillent nos États. « Nous devons y travailler avant de tendre la main à l'extérieur », a invité le diplomate, soutenant que l'Afrique a les ressorts pour régler ses problèmes à condition d'associer les populations. Mais, c'est là où le bât blesse. « Le problème, c'est que nous ne sommes pas capables d'assumer nos problèmes. Les populations ne sont pas suffisamment impliquées dans la mise en oeuvre de nos programmes. Il appartient aux pays africains de trouver les solutions à leurs problèmes. Nous devons nous attaquer aux problèmes de base que sont la pauvreté, le chômage... », a-t-il déclaré. Selon lui, cette approche est la bonne puisque « les partenaires qui viennent de l'étranger ne sont pas des bénévoles ». « Ils ont des intérêts à défendre. Cela ne veut pas dire qu'il faut fermer la porte, mais il faut des solutions africaines », a insisté M. Agboola. Il a appelé également à investir dans l'éducation et l'agriculture, et à améliorer la technologie... « Nous avons une terre riche. Près de 60 % des terres arables sont en Afrique. L'Afrique doit aider sa propre population à se nourrir », a-t-il poursuivi.
De notre Envoyé spécial à Accra