Cameroun: L'avenir incertain du SDF après Fru Ndi

Le Social Democratic Front fondé le 26 mai 1990 par Ni John Fru Ndi fait face à des dissensions internes qui font craindre une implosion.

Fin février dernier, le Social Democratic Front (SDF) a exclu 34 militants accusés d'"actes inacceptables contre la hiérarchie".

Quelques semaines plus tôt, 32 dirigeants du parti avaient en effet déposé deux plaintes à Yaoundé : la première le 10 février, devant le Tribunal de grande instance du Mfoundi, et la seconde une semaine plus tard, en référé, auprès du Tribunal de première instance de Yaoundé centre administratif.

Mustapha Ngouana, cadre exclu du Social Democratic Front et membre du G27, constitué des dissidents du parti, souligne que "le président national a par exemple exclu certains camarades du processus électoral en interne et pour les élections nationales." Il ajoute que "par exemple la secrétaire générale (Mme Adeline Lord Djomgan) [...] s'immisce de manière intempestive dans les fonctions du secrétaire national à la communication. Pour pouvoir être membre du comité exécutif national, il faut avoir milité pendant cinq ans. Or, il y a des personnes qui sont nouvellement arrivées au parti sans avoir fait la preuve de leur militantisme et de leur fidélité. Ces personnes ont été parachutées à des fonctions importantes par le président national."

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Les requérants estiment avoir été radiés pour avoir réclamé une transparence dans la gestion du parti. C'est pourquoi, ils espèrent ainsi faire annuler et suspendre par la justice plusieurs décisions prises par les dirigeants du SDF.

Congrès sur fond de contestation

Ces dissensions au sein de ce parti d'opposition et la perte d'autorité et de leadership de son président ne surprennent pas Stéphane Akoa, politologue et chercheur à la Fondation Paul Ango Ela. Selon lui, la présence de Ni John Fru Ndi n'était plus ressentie sur l'échiquier politique national depuis plusieurs années.

Par ailleurs, début juin, en l'absence du président du SDF, malade, son premier vice-président du parti, Joshua Osih, a présidé une session du comité exécutif national consacrée aux préparatifs du prochain congrès du parti, prévu les 28 et 29 juillet.

Mustapha Ngouana estime que ce congrès, qualifié d'illégal, ne pourra pas avoir lieu pour deux raisons:

"La première, c'est que nous avons saisi le juge des référés en suspension du congrès et nous avons également saisi le juge de fond à l'annulation du congrès. Ça veut dire qu'on a aujourd'hui quatre procédures qui sont devant les juridictions de la région du centre. La deuxième raison, c'est que on ne peut pas mettre entre parenthèses les obsèques du président national pour pouvoir se concentrer sur l'organisation du congrès."

L'avenir du SDF

Au regard de cette guerre interne, le SDF a-t-il un avenir? Stéphane Akoa, politologue et chercheur à la Fondation Paul Ango Ela pense que "l'avenir du SDF repose aussi sur l'identité, le profil du prochain président de cette formation politique. Il semble être écrit que ce sera monsieur Joshua Osih (le premier vice-président du parti). Il n'a pas le même caractère que monsieur John Fru Ndi. Il n'a pas la même stratégie que monsieur John Fru Ndi. Il n'a pas la même visibilité dans l'espace médiatique que John Fru Ndi. Donc, cela peut permettre de croire qu'il y a un futur qui se dessine au sujet de l'orientation idéologique qu'il serait en mesure d'argumenter pour les militants d'abord et pour les électeurs camerounais ensuite."

Les frondeurs contestent aussi l'autorité de Joshua Osih, le premier vice-président du parti, accusé de faire main basse sur le parti. L'intéressé a refusé de commenter une affaire qui est en cours devant la justice camerounaise.

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La crise au sein du Social Democratic Front n'est pas la première que connaît une formation politique de l'opposition. On peut citer la crise qui a secoué le Front populaire ivoirien, fondé par l'ancien président Laurent Gbagbo. Après une bataille judiciaire, c'est Pascal Affi N'Guessan qui a pris le contrôle du parti.

En Afrique, la création de partis politiques ne s'accompagne pas toujours de la mise au point d'un programme. En lieu et place d'un corpus idéologique, plusieurs formations ont pour socle le culte du chef, ce "père fondateur" qui est souvent rétif à l'idée d'une alternance à la tête de son parti, alors qu'il la réclame à la tête de l'Etat.

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