Afrique: Les enfants réfugiés au Tchad, victimes directes du conflit

communiqué de presse

Les réfugiés soudanais continuent d'affluer au Tchad suite au conflit qui fait rage dans leur pays et en particulier dans le Darfour occidental. Parmi eux, des nourrissons, des enfants et des adolescents fragilisés, voire grièvement blessés. À l'hôpital d'Adré soutenu par MSF, le service pédiatrique ne désemplit pas tandis qu'une soixantaine d'enfants ont été pris en charge dans l'unité chirurgicale entre le 15 et le 21 juin.

Environ 180 enfants sont actuellement pris en charge dans les services pédiatriques et nutritionnels de l'hôpital d'Adré. Si la période de soudure agricole et la saison des pluies favorisent des niveaux extrêmement élevés de malnutrition et de paludisme chez les plus jeunes, l'arrivée en ville de milliers d'enfants réfugiés, provenant d'El-Geneina, capitale du Darfour occidentale, accroît encore davantage les besoins en soins pédiatriques.

« Il y a au moins deux enfants par lit dans le service de pédiatrie, nous prévoyons d'augmenter rapidement la capacité d'accueil en ouvrant 50 lits supplémentaires sous tentes », explique Raphael Kananga, coordinateur de projet à Adré. Les soignants MSF constatent chez les plus jeunes de la fièvre, des infections respiratoires aigües, des diarrhées, de la malnutrition ainsi que des cas de paludisme.

« Oula, ma fille de 7 mois, a la diarrhée, elle ne mange pas et pleure en permanence », s'inquiète Nasra, sa mère, elle aussi malade. Au cours de leur fuite jusqu'au Tchad, elles ont enduré traumatismes et privations. Tout en veillant Oula dans son lit d'hôpital, Nasra raconte qu'elle n'avait pas l'intention de quitter le Soudan et sa ville d'El-Geneina de nouveau en proie aux violences après le déclenchement du conflit entre les forces armées soudanaises et les forces de soutien rapide (RSF) au Soudan à la mi-avril.

Mais les attaques s'intensifiant, elle a été contrainte de changer de quartier avec son nourrisson et sa fille aînée de 7 ans, ainsi qu'avec sa mère et quatre de ses soeurs. Elles se sont réfugiées dans un abri collectif où elles sont restées 40 jours avant qu'une milice ne les attaque en ne leur laissant que deux options : partir au Tchad ou mourir.

Nasra poursuit : « Nous avons fui en grands groupes et sur la route nous avons vu beaucoup de morts. Je ne peux pas oublier cette scène d'une mère avec deux enfants, ils étaient tous morts et empilés les uns sur les autres. » Elle explique que son groupe a été arrêté par des miliciens avant d'arriver à Adré, près de la ville d'Al Furqan : « Ils nous ont arrêtés, tabassés et humiliés. » À l'hôpital d'Adré, Nasara a trouvé sécurité et soin et elle est désormais rassurée sur l'état de santé de Oula. Les médecins lui ont confirmé qu'elle devrait aller mieux d'ici une semaine.

Eman, âgée de 11 mois, présente également des symptômes de fièvre et de malnutrition. Elle a été prise en charge à l'hôpital pédiatrique d'Adré. Sur la route menant au Tchad, sa mère, Hawaya, et certains de ses frères et soeurs ont, eux aussi, été violentés. Elle explique les raisons de son exil : « Mon mari et moi avons 6 enfants, nous avons d'abord essayé de survivre et de nous adapter aux conditions sécuritaires en nous déplaçant dans la ville d'El-Geneina.

La semaine dernière, mon mari est sorti et nous ne l'avons jamais revu. Je n'avais plus personne pour nous protéger et nous soutenir. Deux jours après sa disparition, j'ai décidé de partir au Tchad avec mes enfants. »

Certains cas d'enfants arrivant sans aucun parent ont été rapportés à nos équipes. À l'instar de Muhammad 5 ans et de sa très jeune soeur de 6 mois. « Ils sont arrivés seuls à l'hôpital d'Adré après que leur mère a été tuée à l'intérieur de leur maison à El-Geneina, explique le Dr Hussein Ahmad Mohamed, responsable de la salle d'urgence. Le jeune garçon a porté sa soeur et a suivi les personnes qui fuyaient la ville jusqu'à son arrivée à l'hôpital.

Ils sont maintenant pris en charge et nous leur fournissons tout ce dont ils ont besoin en termes de soins médicaux ainsi que de nourriture et de soutien. Un autre enfant, assez jeune, est également arrivé à l'hôpital complètement perdu, ayant été séparé de sa mère et de son père dans le chaos. Il a suivi d'autres personnes qui fuyaient. »

Il y a aussi les enfants et adolescents qui ont pu être grièvement blessés lors de leur fuite. Ils sont alors pris en charge sous les tentes que le personnel MSF a dressées pour y installer une unité chirurgicale. C'est le cas d'Ahmad, 15 ans, victime de graves brûlures. Son quartier à El-Geneina a été attaqué par des miliciens il y a deux semaines et les coups de feu en direction de sa maison ont touché le groupe électrogène à essence situé juste derrière sa chambre.

« Une balle a touché le carburant et le générateur a explosé. J'ai été brûlé, je me suis mis à hurler et j'ai sauté dans la réserve d'eau. Ma mère et l'un de mes frères m'ont emmené dans une clinique, mais les soignants leur ont dit que j'avais besoin de soins qu'ils ne pouvaient pas me donner là-bas à El-Geneina. Ma mère a loué une voiture et je suis arrivé à l'hôpital d'Adré il y a deux jours. »

En dehors de l'hôpital, enfants et adolescents représentent une large partie des 15 000 réfugiés qui viennent de s'installer dans la ville d'Adré, notamment autour du lycée Marjan. « Les réfugiés sur le site du lycée viennent d'El-Geneina et des ses environs, précise Abderahman Ibet, assistant chef de mission MSF, et la plupart ont parcouru à pied les 35 km qui les séparaient d'Adré. Ils sont très démunis et affaiblis.

Leurs conditions de vie sont complètement dégradées d'un point de vue sanitaire comme humanitaire. Chez les plus jeunes, on nous signale des cas de rougeole. » Les équipes MSF planifient actuellement une campagne de vaccination contre la rougeole, de la supplémentation en vitamine A ainsi que du déparasitage pour les enfants présents sur ce site.

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