Cameroun: Voirie urbaine de douala, les routes de la honte

Du kilomètre zéro, au quartier administratif de Bonanjo, jusqu'à Bonépoupa, dans le Nkam, en passant par Ndokoti, Pk 14 et pk 17, le réseau routier de la capitale économique du Cameroun est très dégradé, toutes choses qui génèrent des bouchons et causent des préjudices aux populations.

«C'est grave ! c'est très grave ! » s'écrie François aussitôt que le reporter du Jour, descendu de la moto de ce « bendskinneur », lui dévoile son projet de reportage ce 21 juin. Le hasard a voulu que ce conducteur de mototaxi, qui nous transporte à destination du carrefour MAÉTUR, au quartier Bonamoussadi, soit un habitant de Pk 21, dans la banlieue nord de Douala. Et donc une personne qui connaît bien le calvaire que vivent les résidents des quartiers périphériques de Douala situés le long du tronçon routier allant de Pk 14 jusqu'à Pk 24 voire au-delà. Une route dont l'on ne trouve pas de mots appropriés pour décrire l'état de dégradation continue.

« Les télévisions montrent l'image de cette route tous les jours. Inutile d'aller là-bas. Faites votre rapport », pérore François, convaincu dans un premier temps que nous sommes un agent assermenté des services de contrôle du gouvernement.

Cet instituteur résidant à Pk21 peine à se rendre chaque matin à Pk 13, où il enseigne dans une école privée située derrière l'ancienne usine de la SITABAC. La faute au mauvais état de la route reliant son quartier de domiciliation à son lieu de service. « J'arrive en retard au travail presque tous les jours », se désole-t-il. Au carrefour de Pk 14, des flaques d'eau de ruissellement stagnent dans des trous au lendemain de la forte averse qui s'est abattue sur la ville tout au long de la nuit du 20 au 21 juin 2023. Un camion semi-remorque transportant du ciment sur le plateau du véhicule peine à se frayer un passage à ce carrefour rempli de monde. Le conducteur s'efforce, dans la mesure de ses possibilités, à contourner les crevasses devenues des nids de poule. A ses risques et péril, mais aussi au péril des commerçants assis ou en situation de mobilité.

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Aucun automobiliste ne veut se risquer à poser ses roues dans le trou dont certains ne mesurent probablement pas la profondeur. A à peine un kilomètre de là, sur le tronçon d'à peine trois kilomètres reliant Pk 14 au campus de Logbessou à Pk 21, un monticule de déchets de maïs jonche une bonne partie de ce qui serait aujourd'hui la chaussée, si les travaux de ce chantier avaient été réalisés jusqu'au bout. Les seuls indices qui indiquent que les travaux ont été lancés sur ce lot attribué sont les ouvrages de béton matérialisant les accotements de cette route dont on devine qu'elle est à double voies, au regard de sa largeur. Il y a aussi ces énormes buses en béton prévues pour acheminer les eaux de ruissellement. Au virage de l'entrée Nsappe, tout juste quelque neuf cents mètres du campus, un gigantesque trou formé au milieu de la route de latérite.

Vers la résiliation du contrat d'Encobat

Cette aspérité en rajoute à la dangerosité de ce tronçon où des accidents et des incidents ne manquent pas, à en croire les habitués de cette route. « Un homme à bord d'une moto s'est fracassé le pied après que la moto qui le transportait, et qui roulait un peu plus vite, soit tombée dans ce trou », nous renseigne un conducteur de moto. Devant le poste de police construit à l'entrée de l'université, un pick-up du commissariat de sécurité publique du 17ème arrondissement est garé. La quasi-totalité des étudiants fréquentant cette annexe de l'université de Douala, affichent leur agacement et leur exaspération face à l'état honteux de cette infrastructure routière. Ce d'autant plus que, en plus du fait qu'elle dessert ce lieu de savoir, cette route est conçue pour désenclaver le bassin du Nkam, l'un des viviers agricoles du Cameroun.

En visite sur ce linéaire long de 20 kilomètres, le 23 mai dernier, le ministre des Travaux publics, Emmanuel Nganou Djoumessi, a été surpris de ne voir aucun engin immobilisé ou en activité sur le site à l'abandon depuis des semaines. Aussi a-t-il annoncé la résiliation prochaine du chantier de la société Encobat pour cause d'absence de « ressources humaines de qualité », ayant pour conséquence le non avancement des travaux. Cette société par la voix de son directeur général, déclare à son tour n'avoir pas reçu les paiements nécessaires pour faire avancer les travaux. Les sommes dues à la société dont des sources établissent une proximité avec un proche du défunt président tchadien se chiffreraient à des milliards de francs CFA.

Bricolage et rafistolage

La route du campus universitaire de Pk 17 n'est qu'un cliché de l'état de dégradation inquiétant de la voirie urbaine de Douala. Presqu'aucun quartier n'est épargné par le décor peint quelques lignes plus haut. En plein carrefour Ndokoti, tout près du tribunal de première instance éponyme, les profondes fissures de la chaussée créent de monstrueux bouchons à cet endroit, surtout aux heures de pointe. Pareil au carrefour Zachman à Ndogbong, situé tout juste à dix minutes plus loin, lorsqu'on est à pied.

Ou encore à l'entrée du lycée technique de Douala Bassa et de l'Institut universitaire de technologie, sur l'une des principales voies routières desservant les quartiers Bépanda et Bonamoussadi en passant par Makèpè Missoké. La rivière qui traverse ce quartier de Douala 5ème déborde en permanence et inonde la chaussée qui se dégrade surtout en saison des pluies, à cause de l'installation anarchique des populations dans le lit de ces eaux. Des travaux de bricolage et de rafistolage ont plusieurs fois été réalisés ici, comme sur nombre d'autres tronçons de la ville, sans que le problème de fond soit résolu. La chaussée se dégrade quelque temps après. Le lot Ndokoti- Ecole publique de Deido en est une parfaite illustration. Il avait été réalisé par une société camerounaise dont on attribuait la propriété à un ex-haut commis de l'Etat. Même le quartier administratif de Bonanjo n'est plus à l'abri de ce problème de dégradation des routes dans la capitale économique camerounaise.

Tour cycliste Chantal Biya

Toutefois, au regard de son statut de quartier siège des institutions de la Région du Littoral, et du ballet constant qu'y effectuent les autorités du pays, les pouvoirs publics se montrent quelquefois proactives quand il faut colmater les brèches. Ce qui n'est pas le cas ailleurs, en périphérie plus précisément. A cause de cet état de délabrement de sa voirie, le 08 juin dernier, la ville de Douala a manqué l'occasion d'offrir le spectacle du grand tour cycliste international Chantal Biya. L'étape de Douala, un critérium, a été annulée par le comité d'organisation de cet événement. Il a suffi de ce désagrément pour que les chefs traditionnels de la ville de Douala fassent une sortie, via un communiqué, pour rappeler aux pouvoirs publics cette situation déplorable et peu honorable pour l'image de notre pays.

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