Congo-Kinshasa: Vu le climat sécuritaire actuel , RDC - JED pour un travail journalistique fait avec précaution

Journalistes En Danger, de concert avec Internews, a organisé durant deux jours, soit mercredi 21 et jeudi 22 juin, dans la salle André Cnockaert du Centre Culturel Boboto, à Gombe, un atelier dit d'évaluation de ce qui est désormais connu comme étant "outils de surveillance et des mécanismes de protection des journalistes".

Pour en parler avec exactitude, Journalistes En Danger a fait appel à des Experts en la matière. Le Professeur Emmanuel Kabongo a eu en charge l'évaluation de ces outils de surveillance durant laquelle il a évoqué en premier lieu les alertes sur, entre autres, les atteintes à la liberté de la presse, les entraves à la liberté d'informer, les censures, les pressions économiques et administratives, les harcèlements, les agressions, les tortures, les interpellations, les arrestations arbitraires, les détentions, les incarcérations, les enlèvements, les assassinats , et la liste n'est pas exhaustive.

a fait mention dans le même ordre des choses de la nomenclature mise en place par JED pour la surveillance de la circulation des informations. Il a ajouté à cela l'auto-régulation qui doit exister dans chaque rédaction pour mettre de côté tous les articles "mal écrits".

Foi sur ses propos, ces outils sont très capitaux dans l'amélioration de la protection des journalistes.

Cependant, il n'a pas manqué de mots pour déplorer l'affaiblissement des instances de régulation et d'auto-régulation de la presse congolaise, à cause de leurs prises de position politiques.

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A ces alertes, s'ajoutent les communiqués qu'émettent les Ong des droits de l'homme ainsi que les lettres de protestations.

Maître Noël Kabeya a parlé, lui, des mécanismes de protection des communs de vivants y compris la gent journalistique, mécanismes qu'il a présentés sous deux formes : mécanismes de protection juridictionnels et ceux non-juridictionnels. Il a cité, sur le plan continental, la Cour Africaine des Droits de l'Homme, comme mécanisme de protection juridictionnel, et la Commission Africaine des Droits de l'Homme, comme celui non-juridictionnel, les deux étant sous contrôle de la Charte Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples. Du pont de vue universel, il a cité la Cour Pénale Internationale et la Cour Internationale de Justice comme des mécanismes de protection juridictionnels.

A en croire Monsieur Scott Mayemba, qui était intervenu en guise de lever de voile , ces outils de surveillance et mécanismes de protection peuvent être renforcés par la soumission du travail du journaliste à cinq obligations : obligation de vérité, de responsabilité de sa propre sécurité, de respect de la dignité humaine, d'indépendance vis-à-vis des acteurs socio-politiques et, enfin, de solidarité avec les confrères qui sont dans le filet de services de sécurité.

Félix Kalala, Assistant en charge de la recherche au sein de JED, représentant à ces assises le Coordonnateur de JED, Tshivis Tshivuadi, a parlé de cet atelier comme ayant eu toute sa raison d'être dans la mesure où il a eu lieu dans un triple contexte qui ne permet pas au journaliste congolais de mieux faire son travail de collecte, traitement et diffusion de l'information : guerre d'agression dans l'Est de la République Démocratique du Congo, rivalités de clocher dans le Bandundu ainsi que des élections qui s'annoncent très prochaines à travers toute la République.

Foi sur ses propos, il est question de faire une mise en garde aux journalistes congolais au regard de la dangerosité actuelle liée à ces trois contextes et à laquelle ils doivent faire face dans l'exercice de leur travail de collecte, de traitement et de diffusion de l'information.

Il a fait savoir que la RDC est un arsenal juridique important pour soutenir l'exercice de la liberté de la presse, que Chateaubriand définit comme étant le thermomètre d'évaluation de la température démocratique d'une nation, mais le hic, c'est que, comme qui dirait le Professeur Malembe, tous ces jolis prescrits ont toujours souffert de leur non-application.

Dans la situation actuelle, le journaliste congolais dans son usage de sa liberté d'informer, doit en premier lieu tenir compte de sa propre sécurité.

"La sécurité du journaliste passe en premier lieu par sa protection personnelle", parole de Monsieur Scott Mayemba, activiste indépendant de la liberté de la presse.

A l'en croire, le journaliste congolais, à l'heure actuelle, doit assujettir sa liberté d'informer à la fois à sa propre sécurité et, par sa manière de diffuser l'information, à celle de ses sujets informés.

Dans sa responsabilité de sa sécurité privée, sur le triple plan professionnel, civil et pénal, il devra faire usage de prudence, de modération et de précaution, surtout en se réservant de diffuser des informations dites "sous embargo" ou "non divulgables", tels que des fuites d'information liées aux discours non encore prononcés, aux résultats de vote non encore publiés, des informations dites à micro fermé, des informations top secret, celles relatives aux secrets de défense, celles liées aux plans de guerre, sans oublier celles ayant trait aux secrets de fabrication. A cet effet, a-t-il souligné, le journaliste doit savoir entretenir des bonnes relations de confiance avec ses informateurs, journalistiquement appelés sources d'information ; il devra en plus et surtout, dans ses diffusions ou publications, tenir compte du contexte et de la température politiques de l'heure.

C'est ici que le journaliste congolais se voit bloqué entre deux autres principes : d'un côté, celui de Daniel Cornu qui déclare : "il n'y a pas information sans référence obligée à la vérité" et, de l'autre, celui de Marc Bernier qui souligne : "toute vérité n'est pas bon à diffuser".

Voilà ce qui rappelle un tout petit peu ce qui constituait le leitmotiv de l'ancien président du Conseil Supérieur congolais de l'Audiovisuel et de la Communication, Christophe Tito Ndombi, qui n'arrêtait de répéter : "La liberté de la presse n'est pas sans contrepartie ; elle est toujours sous réserve de la Loi, de l'ordre public et de bonnes moeurs".

Ce point de vue juridique, faut-il le souligner, rencontre d'énormes contradictions dans le domaine de la presse en ligne.

C'est dans ce domaine qu'est intervenu David Mukendi Kalonji, étudiant en Communication sociale, orientation journalisme, 2e Licence, doublé de rédacteur à politico.cd. L'homme a eu, lui aussi, voix à ce chapitre, mais d'une manière corsée sur les menaces virtuelles qui se font perpétrer contre les journalistes qui évoluent en ligne. Pour entrevoir la possibilité d'y mettre un terme, il a proposé que l'ARPTC prenne désormais part aux séances de régulations de la presse. Plus que ça, il a mis les clous sur la collaboration qui devra désormais exister entre la règlementation, la régulation et l'autorégulation. En termes clairs, il veut parler d'un travail en commun qui devra régner entre le pouvoir judiciaire, le Conseil Supérieur de l'Audiovisuel et de la Communication(CSAC) et l'Union Nationale de la Presse du Congo(UNPC) , sans que soit mise de côté l'Autorité de Régulation des Postes et Télécommunication.

Autre chose qui a été signalé, c'est que, allusion faite à ses publications sur les réseaux, le journaliste congolais, homme ou femme soit-il, devra désormais savoir faire la part des choses entre sa vie personnelle et sa vie professionnelle.

Pour une défense efficace des journalistes de la RDC, JED sollicite l'implication, entre autres, des Journalistes En Action (JEA) que supervise Paulette Kimuntu, de l'Observatoire pour la Liberté de Presse en Afrique (OLPA) de Joseph-Alain Kabongo, sans oublier Journalistes pour les Droits de l'Homme.

William Baye, juriste et défenseur des droits de l'homme, présent à ces assises, a proposé aux journalistes, pour leur sécurité lexicale vis-à-vis des services de sécurité, la disponibilisation d'un glossaire qui renfermera des concepts qu'ils devront éviter d'utiliser. Ce qui leur permettra d'avoir un vocabulaire sécuritaire qui leur évitera tous ces ennuis auxquels ils font face jours et nuits.

Les "Journalistes en danger" se sont dit heureux du fait qu'il y a à l'heure actuelle zéro journaliste en prison ; c'est depuis la levée d'écrou, il y a de cela quelques jours, en faveur du journaliste Diego Kayiba, dit Avocat du peuple, qui a été incarcéré pour justement à cause de son usage de certains vocables qui n'avaient pas trouvé un accueil favorable de la part de ceux qui s'étaient sentis visés.

JED est favorable à la loi du 23 mars, mais aussi et surtout au principe de la dépénalisation des délits de presse.

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