Les longues files de voitures, camions et autres véhicules qui attendent parfois pendant des jours devant les stations-services une hypothétique livraison de carburant ont refait surface depuis plus de deux semaines. Beaucoup ont désormais remisé leurs voitures au garage, et font leurs courses à pied, alors que les prix des produits de première nécessité flambent. Cette énième pénurie de produits pétroliers, essence et mazout, depuis que le président Evariste Ndayishimiye est au pouvoir, survient alors qu'il s'était adressé aux Burundais en août de l'année passée, pour leur dire qu'il prenait désormais la question en main, en leur promettant que cela n'allait plus se reproduire. Pourquoi est-ce que cela n'a pas marché ?
Le président burundais avait pour cela cassé le monopole de l'importation des produits pétroliers détenu jusque là par Interpetrol, une société de droit tanzanien qui contrôlait tout le secteur depuis l'importation jusqu'à la distribution de ces produits, en passant par leur transport et leur entreposage.
Evariste Ndayishimiye avait alors chargé la Regideso, la société publique chargée de la fourniture de l'eau et de l'électricité au Burundi, ainsi qu'à Prestige, une société privée créée pour la circonstance par un actionnariat qui n'a jamais été rendu public, de prendre la relève.
Dix mois plus tard, rien n'a changé pour les Burundais qui en sont depuis plus de deux semaines, à leur 6e pénurie sévère d'essence et de mazout, selon de nombreux témoignages.
Interrogé il y a quelques jours sur la persistance de la crise du carburant malgré sa promesse, le président Ndayishimiye a expliqué que c'était la faute aux « traîtres à la nation ».
« Les causes du manque de carburant sont très complexes. Je me suis rendu compte en effet que travailler avec des hommes d'affaires qui ne sont pas des patriotes, c'est comme travailler avec des traitres. Tenez, quelqu'un qui va chercher du carburant à Dar-es Salaam où nous en avons plein dans nos stocks là-bas, reviens au Burundi et décide de fournir uniquement ses proches, et donc entraîne une pénurie dans le pays, est-ce que ce n'est pas un traître ? Je me demande parfois si je ne dois pas tous les rayer de la liste de nos fournisseurs et en chercher d'autres. »
Plusieurs économistes pointent eux un manque criant de devises, les exportations du Burundi couvrant moins de 20% des importations du pays.