Madagascar: Des noms de palais imagés et évocateurs

Dans les dernières années de l'occupation française, Urbain-Faurec se fait le guide des visiteurs du Rova de Madagascar- appelé à l'époque Rova de Tananarive- en faisant le tour des édifices qui y sont construits. Car chaque souverain semble vouloir marquer son règne par, au moins, une construction nouvelle (lire précédente Note). Près de la Maison ou Palais d'argent, écrit-il, un emplacement vide marque la place de la maison où, le 12 mai 1863, Radama II est mis à mort, à la suite d'une conjuration de Palais.

C'est l'un des pavillons appelés Trano kambana, maisons jumelles. Sous un arbre, quelques marches de pierre « que rongent les mousses et les pluies », servent d'estrade aux reines pour monter en filanjana (palanquin). D'ailleurs, des escaliers multiples, des couloirs surélevés et entourés de balustrades de pierre font communiquer entre elles les vérandas des bâtiments et mènent à une large terrasse. Celle-ci domine le côté oriental de la ville. Le Palais Manampisoa, surcroit de beauté, demeure de la reine Rasoherina, est bâti sur cette plateforme en 1866. Elle est en bois, mais « de construction plus délicate et aussi plus tourmentée ».

C'est l'oeuvre de l'architecte anglais, Pool. Elle se compose de deux étages de pièces réunies autour d'une sorte d'atrium central. Quatre pièces par étage, précise l'architecte, un balcon intérieur de bois rare et garni d'une belle balustrade ouvragée. « Les parquets, les lambris et les plafonds de ces appartements, en ébène et en palissandre, remarquables mosaïques, donnent à l'ensemble une véritable note de luxe. » Sous la colonisation, ce palais de bois conserve quelques restes du passé malgache et sert de musée.

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Sur un divan transporté là, on peut alors voir la trace d'un obus lancé lors de la prise d'Antananarivo en 1895. Il vient de Tsarahafatra, de bonnes recommandations ou de bonnes prédictions. C'est Ranavalona Ire qui le fait construire dès son avènement. Son beau-père, Andrianampoinimerina, l'aurait désigné pour régner à la mort de Radama Ier, son époux, et comme cela se réalise, elle baptise ainsi son premier palais. Face à Manampisoa, subsistent les traces d'un kiosque construit par Ranavalona III.

Lors du bombardement qui contraint la royauté à capituler, la frêle habitation est gravement atteinte et doit être démolie peu après. Tout près, gisent inachevées, « les importantes fondations, commencée par l'architecte Rigaud, d'un palais dénommé Masoandro (Soleil) pour Ranavalona III, mais sa déchéance arrête les travaux ». Dans une courette intérieure, étroite et profonde, entre de hauts murs où poussent de sombres bibassiers et où se meurt le tronc noueux d'un pied de vigne planté, dit-on, par Jean Laborde, s'abrite une « véritable case malgache rustique ». De bois lourd, grossier, à peine équarri, au toit de chaume démesuré, « elle semble, écrasée et humiliée, parmi tant de pavillons gracieux de tours imposantes ».

C'est la demeure d'Andrianampoinimerina, fondateur de la dynastie, conquérant et organisateur, à qui « la chance dans les combats alliée à un sage esprit de justice » permet d'instituer une paix féconde dans un empire agrandi. Mahitsielafanjaka est son nom. « Un esprit droit règne longtemps », mais selon l'auteur, le nom de sa case n'est peut-être pas très exact pour Andrianampoinimerina qui ne règne guère que de 1794 à 1810. « Du moins, fut-il de bon augure pour la puissance qu'il fonda et qui dura jusqu'à la conquête européenne ».

L'intérieur de cette case primitive, qui date de 1 796, ne contient que deux plateformes de planches frustes : le lit du roi et celui des reines. Et si celui-ci est beaucoup plus vaste, c'est que le souverain épouse douze femmes issues des douze familles qui règnent aux alentours d'Iarivo. Il s'assure ainsi par les liens du mariage l'alliance et, plus tard, la soumission de ces douze royautés rivales.

Poursuivant sa narration, Urbain-Faurec indique qu'en 1952, des portiques sans porte, des voûtes aux cintres branlants, des pans de murs verdis et des fûts de colonnes épars attestent encore, çà et là, la présence antérieure de bien d'autres constructions sur le vaste plateau du Rova: Kelisoa où, sous Radama Ier, on enferme les animaux sacrés, Menalefona, parc du boeuf favori d'Andrianampoinimerina, Besakana, et « beaucoup de noms malgaches, imagés et évocateurs, de tant d'autres constructions »...

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