Ile Maurice: Secteur informel - 17 000 travailleurs indépendants ont mis la clé sous le paillasson

Pour Stephane Maurymoothoo, président du Regroupement artisan morisien, aussi connu comme Platform Ti Travayer Maleré, le secteur informel va mal. En effet, une étude réalisée avec la collaboration de Roshi Bhadain révèle que de mars 2022 à ce jour, 17 000 personnes ont fermé leur commerce. «Un travailleur indépendant ne va pas crier sur tous les toits qu'il a fermé son entreprise. Il va discrètement travailler comme gardien ou jardinier, moyennant, en fin de mois, un salaire est acquis.»

Pourquoi toutes ces fermetures ? D'emblée, il évoque le coût élevé de la vie. «Beaucoup n'arrive pas à joindre les deux bouts en fin de mois. Sans parler du prix des matériaux qui ont pris l'ascenseur.» En effet, le travailleur se retrouve entre le marteau et l'enclume car il ne peut pas demander de rémunération outrageuse. «On se voit demander le moins possible.» Le salaire minimal a aussi contribué à l'arrêt des commerces. «Est-ce que l'entreprise accumule suffisamment de profit pour employer d'autres personnes et leur verser le salaire minimal ? Les patrons se retrouvent à dégraisser et finalement, c'est la banqueroute.»

Stephane Maurymoothoo accuse également le manque de subventions au secteur informel. «Les banques ne nous donnent pas de prêt, ou demandent de mettre nos maisons ou terrains en gage. Mais c'est un pari très risqué.» Ensuite, le rythme de vie a changé depuis la pandémie de Covid-19. Les gens font des achats calculés. «Moins en vêtements, plus en nourriture. Il faut dire que le coût élevé du fret a aidé à couler les business...» Le secteur se sent aussi délaissé par les autorités. «Nous avons demandé une formation pour le secteur informel. Nous ne sommes pas des experts en administration d'entreprise. Mais, des experts sont plutôt envoyés vers les micro entreprises ! Pourquoi ne pas regrouper, l'espace d'une journée, les responsables du secteur informel et leur donner une formation ?»

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De plus, les entrepreneurs de travaux manuels disparaissent car ils s'envolent pour d'autres pays, tels que le Canada. «À Maurice, ces métiers ne sont pas suffisamment valorisés. Il faudrait plus de soutien pour les retenir afin qu'ils puissent bien vivre de leur métier. Certains sont des ouvriers et pas des experts en business. Il se peut que ce soit de bons ouvriers qui gèrent mal leur business. Il faudrait des formations et des accompagnements. Ils manquent de moyens pour se développer.» En tout cas, il s'inquiète pour l'avenir du secteur. «C'est un secteur appelé à disparaître. Vous rencontrez des jeunes qui s'intéressent à la cordonnerie ou la fabrication de vêtements ? Ils ne veulent pas s'y aventurer.» Dans son dernier rapport, le National Wage Consultative Council souligne que 8 100 travailleurs indépendants ont mis la clé sous le paillasson pour la période du deuxième trimestre de 2021 à celui de 2022.

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