Le président de transition, Mahamat Idriss Deby a annoncé qu'il accordait son pardon « à tous ceux qui sont impliqués, condamnés ou non, ayant commis des dégâts » lors de la répression sanglante du 20 octobre dernier, qui avait fait de 75 à plus de 300 victimes selon les sources, avant de leur lancer un appel à rentrer d'exil. Un message adressé notamment aux leaders de la contestation, Succès Masra et Max Loalngar, qui avaient été poussés à l'exil. Pourquoi est-ce que le président de transition tend aujourd'hui la main aux opposants en exil ?
Premier objectif pour Mahamat Idriss Déby, redorer une image totalement dégradé par la répression sanglante du 20 octobre au Tchad et dans le monde, selon plusieurs spécialistes du pays.
Le président de transition faisait également l'objet depuis des mois, de pressions de la part des partenaires financiers du Tchad qui lui demandent de sortir le pays de « l'impasse politique » dans lequel il est plongé depuis cette date. « Emmanuel Macron a sans doute dit la même chose à Mahamat Idriss Déby lors de leur dernier tête-à-tête à Paris début juin », précise Roland Marchal, un spécialiste de la région, « d'autant plus que la campagne de Succès Masra en Allemagne, en France ou encore aux États-Unis a porté des fruits dans certains milieux politiques », ajoute-t-il.
Il y a eu aussi le signal lancé par cette tentative de création d'un groupe armé tchadien dans le nord de la Centrafrique, « il s'est rendu compte que c'était mieux d'avoir ses opposants politiques à l'intérieur plutôt qu'à l'extérieur du pays », selon toujours la même source.
Enfin, le départ en exil des principaux leaders de la contestation du pouvoir de Mahamat Idriss Déby a permis au pouvoir de transition de mener à bien toutes les étapes qui conduisent à l'organisation d'un référendum constitutionnel basé sur un état unitaire décentralisé, qui était très contesté, sans pratiquement rencontrer de résistance de la part de fédéralistes, devenus atones.
« La dynamique politique est déjà lancée, le président de transition a bien choisi son heure pour demander à ses plus farouches opposants de rentrer au pays », analyse Roland Marchal, chercheur au CNRS.
Cet appel (...) n'est pas du tout sérieux, parce que le président de la transition agit à la manière de Dieu le Père, qui a le pouvoir de pardonner à tous les pécheurs que nous sommes. Il ne fait aucun cas de la responsabilité qui lui incombe en tant qu'acteur majeur de ces évènements, en tant que chef de cette armée qui a tiré et tué de sang-froid du 20 au 11 novembre 2022... En ce qui me concerne, ne me reproche rien. Il faut une enquête véritablement indépendante sur les évènements qui ont lieu ce jeudi noir d'octobre.
Max Loalngar, coordinateur du mouvement Wakit Tama, rejette la main tendue par le président