Il avait promis de parler à son peuple et il a su gagner le coeur des démocrates africains. Lui, c'est le président sénégalais, Macky Sall qui, au détour d'une allocution télévisée, le 3 juillet dernier, a délivré son peuple d'un énorme poids : celui d'une éventuelle candidature à un troisième mandat qui pesait lourdement sur la paix sociale et qui a déjà laissé une trentaine de Sénégalais sur le carreau.
Sans compter les dégâts matériels consécutifs à la condamnation de l'opposant Ousmane Sonko dont les partisans n'ont eu de cesse de justifier les déboires judiciaires de leur champion, par la volonté cachée du chef de l'Etat, de chercher à se dégager le boulevard d'un mandat « indu ».
Quand on voit le degré de crispation de l'atmosphère sociopolitique en lien avec cette actualité qui était devenue plus que brûlante, au propre comme au figuré, en raison des violences dévastatrices et autres vagues de protestation qu'elle soulevait au pays de la Teranga, il n'y a pas de doute que c'est une décision empreinte de sagesse, qui vaudra son pesant...de paix pour le Sénégal.
Le Sénégal peut encore justifier son statut de phare de la démocratie en Afrique de l'Ouest
C'est aussi une décision qui grandit le président sénégalais qui a fait mentir tous ceux de ses contempteurs qui lui prêtaient le funeste dessein de chercher à prolonger indument son bail à la tête de l'Etat.
En tout cas, en contenant sa boulimie du pouvoir pour ne s'en tenir qu'à ses deux mandats constitutionnels conformément à l'esprit et à la lettre de la Loi fondamentale de son pays, Macky Sall écrit non seulement son histoire personnelle à la tête du Sénégal, en lettres de noblesse, mais aussi et surtout il évite à son pays de sombrer dans le chaos qu'ont vécu d'autres peuples sous d'autres cieux, face à l'obstination de dirigeants qui se croyaient sortis de la cuisse de Jupiter.
Et cela est à son honneur, ainsi qu'à celui du Sénégal qui peut encore justifier son statut de phare de la démocratie dans une Afrique de l'Ouest en pleine tourmente de changements anticonstitutionnels.
En attendant, c'est tout une nation qui peut pousser un ouf de soulagement et qui peut s'enorgueillir d'un président qui a su placer l'intérêt supérieur de la Nation, au-dessus des intérêts partisans. Et cela, qu'il ait été ramené à la raison par les violences et autres signaux alarmistes ou instruit par les expériences humiliantes de certains de ses pairs africains.
C'est aussi à cela que l'on reconnaît les grands dirigeants qui savent tirer leçon de l'histoire. C'est en cela que le renoncement du chef de l'Etat sénégalais au mandat de tous les dangers, est aussi un soulagement pour tous les démocrates du continent noir qui se reprennent à espérer et à rêver d'une Afrique résolument engagée sur la voie du renforcement de la démocratie et du respect des règles de l'alternance.
Le retrait de Macky Sall de la course à sa propre succession, ne manquera pas d'aiguiser les ambitions au sein de la coalition Benno Bokk Yakkar
En attendant, la décision de Macky Sall vient battre en brèche les arguments de tous ses contempteurs dont les plus virulents se comptent au sein des partisans de l'opposant Ousmane Sonko, qui sont sur le pied de guerre depuis que leur leader est entré dans le collimateur de la Justice accusée, visiblement ici plus à tort qu'à raison, de jouer le jeu du pouvoir à l'effet de dégager la route d'un mandat « indu » au locataire du palais présidentiel.
A tout le moins, cela leur ôte un argument de taille pour continuer à ruer dans les brancards contre le chef de l'Etat. Et si les choses en restaient là, le plus grand perdant serait l'opposant Ousmane Sonko qui ne pourrait se prévaloir de ses propres turpitudes. A présent qu'il a clairement renoncé à briguer un troisième mandat, le principal défi pour Macky Sall, reste l'organisation de sa succession, à travers l'organisation d'élections apaisées et transparentes.
Et on peut dire que les jeux sont ouverts. D'autant plus que jusqu'à son allocution du 3 juillet dernier, on ne connaissait pas au chef de l'Etat sénégalais, de dauphin attitré. Or, il ne fait pas de doute que le retrait de Macky Sall de la course à sa propre succession, ne manquera pas d'aiguiser les ambitions au sein de la coalition Benno Bokk Yakkar au pouvoir à Dakar.
La question est de savoir si cette clarification tardive de ses intentions, ne va pas nuire à la cohésion au sein de sa propre formation politique et si elle ne va pas jouer contre le parti au pouvoir dans sa volonté de conserver le pouvoir d'Etat. L'histoire nous le dira.
En attendant, avec cette décision qui fera sans doute date au pays de la Teranga, c'est le natif de Fatick qui entre par la grande porte dans l'histoire de son pays, en sachant épargner à son peuple, les affres de tensions inutiles et autres violences préélectorales qui ont fait le malheur de certains de ses pairs sous d'autres cieux en Afrique.