Afrique: Comment la Russie mine la démocratie en Afrique

L'une des recommandations du rapport de The Sentry sur les activités de Wagner en République centrafricaine : les États membres de l'ONU devraient établir une coalition similaire à la Coalition mondiale pour vaincre Daech - comprenant de manière critique des États africains - pour contrer l'influence perverse du groupe Wagner sur le continent africain et ailleurs en se concentrant sur les finances du groupe, les mouvements de combattants étrangers et la propagande.
4 Juillet 2023

L'affaiblissement de la démocratie en Afrique par la Russie est une menace sérieuse à la stabilité et au développement du continent, alors que le pays commence à jouer un rôle clé dans le paysage géopolitique de l'Afrique, utilisant diverses tactiques pour miner les processus démocratiques et consolider son pouvoir. A travers une combinaison de partenariats stratégiques, de campagnes de désinformation et d'influence économique, la Russie est activement investie dans l'érosion des normes démocratiques, la promotion de l'instabilité politique et le développement de sa sphère d'influence en Afrique, rapporte le Centre d'études stratégiques de l'Afrique.

Au cours des dernières années, beaucoup d'attention a été portée à la rechute démocratique en Afrique, nous cite le Centre d'études stratégiques de l'Afrique.

Freedom House, une organisation non gouvernementale qui surveille la démocratie et les droits humains, mentionne un déclin dans les résultats démocratiques de 31 pays africains au cours des 5 dernières années. Malgré l'attention portée aux facteurs internes, l'influence d'acteurs autoritaires externes, en particulier la Russie, passe souvent inaperçue.

Durant les 20 dernières années, l'affaiblissement de la démocratie était un objectif stratégique pour la politique africaine de la Russie, avec des gouvernements autoritaires qui offrent une terre fertile à l'influence russe.

Selon le Centre d'études stratégiques de l'Afrique, "la perturbation par la Russie du processus démocratique se produit à la fois à travers les canaux officiels (tels que bloquer les résolutions de l'ONU qui condamnent les abus aux droits humains ou les revendications électorales frauduleuses des états africains) et à travers des moyens irréguliers (tels que des campagnes de désinformation qui ciblent des partisans démocratiques, de l'interférence électorale, le déploiement des forces paramilitaires de Wagner ou d'armes illicites pour des transactions de ressources).

"Comme la nature des interventions irrégulières est intentionnellement opaque, la gravité des interventions russes est souvent peu claire. Néanmoins, l'ampleur des efforts de la Russie pour miner la démocratie en Afrique est remarquable, au moins un de ces outils a été activement déployé dans 23 pays africains à travers le continent.

Ces interventions affaiblissent les voix africaines, la souveraineté et l'auto-détermination, étouffant ainsi trois quarts des aspirations des citoyens africains à la démocratie."

L'Afrique du Sud fait office d'exception

Le rapport souligne que "l'interférence russe en Afrique vise à miner la démocratie, particulièrement via des campagnes de désinformation et de l'interférence électorale. Les campagnes de désinformation sont courantes et ciblent 17 pays africains, tandis que l'interférence électorale cible 15 pays. De plus, la Russie soutient des revendications extraconstitutionnelles au pouvoir dans 14 pays. Ces tactiques se renforcent souvent entre elles, avec des campagnes de désinformation qui accompagnent les efforts pour interférer dans les élections et légitimer les coups d'État."

"L'interférence russe cible principalement les pays africains avec de faibles institutions démocratiques. Les résultats médians sur la liberté de Freedom House dans les pays ciblés est de 28, considérablement plus bas que les résultats médians de 51 dans les pays ou l'interférence de la Russie n'est pas reconnue. Dans les pays où la Russie est la plus active, impliquée dans plusieurs éléments discréditant, les résultats sur la liberté tombent à 19.

Ensuite, la Russie freine les droits politiques, les libertés civiles et l'équilibre des pouvoirs dans les systèmes autoritaires tenaces, malgré les demandes populaires pour la démocratie dans certains pays."

L'Afrique du Sud fait office d'exception grâce à son équilibre des pouvoirs forts. La Russie décèle une opportunité pour exploiter l'ouverture du pays, coptant ses dirigeants et gagnant de l'influence.

Le rapport alerte aussi sur le fait que " 11 des 23 pays affectés par l'interférence russe sont mêlés à des conflits, constituant trois quarts des pays africains en conflit. Beaucoup de ces conflits résultent du refus des partis au pouvoir à partager ce dernier et l'interférence russe aggrave la situation en entravant les solutions politiques qui servaient de médiateur. Par exemple, le soutien de la Russie au gouvernement militaire du Soudan a fait dérailler la transition démocratique prévue, menant au conflit qui a suivi."

"Sept des dix pays africains avec le plus de déplacements de population forcés ont été ciblés par des interventions russes qui visaient à miner la démocratie. Cette corrélation souligne les conséquences néfastes de l'interférence russe chez les populations vulnérables," relate le Centre d'études stratégiques de l'Afrique.

 (Traduit de l'anglais par Aïcha Sall)

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