C'est les vacances, le temps du retour aux sources ! Une opportunité que Khadija Seck veut saisir pour aider les enfants de la diaspora africaine à connaître leurs pays d'origine. À travers Alima et le Balafon Magique, un livre qui retrace le voyage magique d'une fillette africaine et dont la sortie officielle est prévue au courant du mois de juillet, cette sénégalaise qui se considère comme une citoyenne du monde veut donner la chance aux enfants du continent, établis à l'extérieur ou non, de renouer avec leurs racines. Un ouvrage inspiré par le parcours de l'auteur qui va du Sénégal à la France, en passant par le Brésil où elle a eu son Bac. Actuellement à Dakar pour présenter son livre le samedi 8 juillet 2023, Khadija a accordé une interview exclusive à allafrica.com pour nous parler de son œuvre et de ses projets.
Pouvez-vous nous faire une présentation de votre œuvre Alima et le Balafon magique ?
C'est un livre jeunesse destiné aux enfants de trois à huit ans, que j'ai écrit et illustré. Depuis toujours, j'écris plein de petites histoires, et dessine beaucoup, mais c'est la première fois que je réconcilie mes deux passions dans ce livre.
L'ouvrage est publié en autoédition, c'est-à-dire que je ne travaille avec aucune maison d'édition : j'ai tout pris en charge moi-même, du texte à l'illustration, en passant par la distribution et la communication.
Quel est le thème central du livre et pourquoi ce choix ?
L'histoire est inspirée par ma nièce Alima Rose, et met en scène une petite fille de la diaspora du nom d'Alima, qui est née et a grandi à l'étranger. Elle est d'origine sénégalaise mais elle ne connaît pas vraiment ce pays. Un jour, sa grand-mère venue rendre visite à la famille lui offre un instrument de musique, qui laisse Alima peu convaincue. Mais il s'avère que c'est un balafon magique, dans lequel vit un génie qui s'est donné pour mission de lui faire découvrir son pays natal.
La raison pour laquelle j'ai pensé à ce thème est que, ayant passé la moitié de ma vie dans la diaspora et après avoir discuté avec ma famille, mes amis et des connaissances, j'ai pu faire un constat : l'une des plus grandes difficultés à élever des enfants africains dans un pays étranger, c'est de créer un lien pérenne avec leurs racines. J'ai également eu plusieurs conversations, dont une décisive avec ma sœur aînée, qui ont fait ressortir un besoin en supports littéraires de qualité montrant des enfants noirs, et qui parlent du Sénégal ou même de l'Afrique.
Donc c'est un livre qui est dédié aux enfants africains vivant dans la diaspora ?
À la base, oui. Puis quand j'ai parlé de ce projet avec ma famille basée au Sénégal, ils m'ont exprimé le même besoin. Au début, j'étais surprise, car je me disais que naturellement, à Dakar, il devait forcément exister des ouvrages de ce genre.
Mais après avoir étudié le marché, je me suis rendu compte qu'il y a effectivement une vraie demande ici. Ce que j'avais au début pensé comme une initiative destinée aux enfants de la diaspora a donc pris un sens nouveau, en incluant les enfants basés au Sénégal.
Quels sont les messages clés que vous véhiculez à travers ce livre ?
Le message principal que je souhaite véhiculer est une image positive et fun de l'Afrique. Je veux montrer qu'il y a beaucoup de choses dont on peut être fiers chez nous. Parce que ce qui arrive souvent aux enfants qui sont nés et qui ont grandi à l'étranger, par exemple en France ou aux États-Unis, c'est qu'ils suivent des programmes scolaires et/ou sont exposés à des contenus qui présentent l'Afrique comme ce continent pauvre et qui a toujours besoin d'aide. C'est une vision misérabiliste, dont la conséquence est qu'ils peuvent développer et internaliser un sentiment de honte. Je veux leur montrer qu'au contraire, il y a énormément de choses dont ils peuvent être fiers, et ainsi créer un fort sentiment de fierté et d'appartenance par rapport au continent.
Quelles sont vos perspectives par rapport au livre, prévoyez-vous d'en faire d'autres ?
C'est le premier tome d'une série. L'idée est que, dans ce premier tome, la petite Alima va faire une découverte culturelle sur le Sénégal. Les livres suivants vont faire découvrir d'autres aspects. Je travaille déjà sur le tome 2, qui va lui faire explorer un endroit du Sénégal, peut-être se concentrer sur un aspect environnemental. Je ne vise donc pas que la culture. Il y aura des histoires liées à la géographie, à l'histoire, à la politique... C'est vraiment un projet à visée globale qui présente différents aspects du Sénégal, et par la suite d'autres pays africains, aux enfants de la diaspora et sur le continent.
C'est quoi votre source d'inspiration ?
Ma source d'inspiration, ce sont les conversations que j'ai avec les enfants, les questions qu'ils me posent. Il y a beaucoup de connaissances que j'ai toujours prises comme allant de soi, mais je me suis rendu compte que je les ai parce que j'ai eu la chance de grandir au Sénégal. Ces connaissances sont moins acquises aux enfants de la diaspora, car, du fait qu'ils sont élevés à l'étranger, il y a une complexité supplémentaire pour leurs parents à tisser et maintenir ce lien avec leurs origines et leur transmette toute cette culture.
Mais les enfants basés ici ont également beaucoup de choses à découvrir sur le Sénégal. Moi-même, qui ai grandi ici, j'en apprends chaque jour un peu plus en effectuant mes recherches. J'aime tout particulièrement le processus créatif qui consiste à traduire les résultats de celles-ci en illustrations et en textes qui stimuleront l'imagination de mes jeunes lecteurs.
Comment comptez-vous faire pour que ce livre parvienne à tous les enfants de la diaspora ?
Mon livre est déjà disponible en français, et sa version anglaise, dont j'ai moi-même assuré la traduction, sortira au mois d'aout 2023. Je prévois aussi de le traduire en espagnol, en portugais et en italien, afin de toucher la diaspora sénégalaise très présente dans ces 3 pays. Je suis également preneuse d'une traduction dans d'autres langues. Enfin, je compte le faire éditer en wolof, parce que c'est une très belle opportunité pour encourager les enfants à lire et écrire cette langue.
Au final, je dirai que nous sommes au début d'une belle aventure. Pour l'instant, Alima et le Balafon Magique est un livre, mais je me vois bien le transformer en un dessin animé parce que les enfants sont très réactifs à ce médium. Avant d'entamer ce projet, je travaillais dans un domaine très différent ; je suis actuellement en pleine reconversion professionnelle pour devenir illustratrice et concept artist. Je suis des études pour être capable demain de créer des bandes dessinées et des films d'animation. Je vous réserve de belles choses dans le futur !