Le Soudan s'enfonce chaque jour un peu plus dans la guerre. Depuis l'échec des pourparlers organisés par les États-Unis et l'Arabie saoudite à Jeddah, aucune initiative diplomatique pour renouer le dialogue n'est à l'ordre du jour. Sur le terrain, les belligérants ont intensifié leurs opérations et selon des habitants de la capitale Khartoum, mardi 4 juillet a été la journée la plus violente depuis des semaines.
C'est à Omdurman, l'une des trois grandes villes composant Khartoum, que les combats les plus violents ont eu lieu ces dernières 72 heures : c'est du moins ce que racontent les quelques habitants qui parviennent encore à téléphoner, ainsi que les Comités de résistance, qui ont dénombré 24 morts et une centaine de blessés parmi les civils.
D'après des observateurs militaires, l'armée régulière, dirigée par le général Abdel Fattah al-Burhan, cherche à couper les lignes d'approvisionnement des Forces de soutien rapide (FSR), commandées par le général Mohamed Hamdane Daglo dit « Hemedti ». Cette ville se trouve à l'ouest et au nord-ouest de la capitale, et par où passent les convois de carburant, de munitions, de pièces de rechange et de renforts en provenance du Darfour.
Un chasseur-bombardier de l'armée qui avait mené des frappes sur les positions des paramilitaires à Omdurman a d'ailleurs été abattu mardi au-dessus de Khartoum-Nord. Et l'armée a également ciblé les ponts sur le Nil, cherchant ainsi à séparer les zones contrôlées par les milices du général « Hemedti ». De violents combats ont également été signalés mardi à Nyala, la capitale du Sud-Darfour, assiégée par les FSR.
Mais dans tout l'ouest et le sud du pays, les communications sont très difficiles et des centaines de milliers d'habitants ont fui vers le Tchad, l'Éthiopie et le Soudan du Sud : les témoignages directs sur la situation sont donc extrêmement rares.
L'armée appelle les civils à rejoindre ses rangs
L'armée s'est dite lundi prête à « recevoir et préparer » des combattants volontaires. La question de l'armement des civils, qui plongerait le pays dans la guerre civile, fait débat depuis des semaines. Les « jeunes et les hommes qui en sont capables » doivent s'enrôler, a lancé le chef de l'armée le 27 juin, dans son discours à la nation pour la fête musulmane de l'Aïd al-Adha.
Au Darfour, une vaste région de l'ouest du pays, frontalière du Tchad, des civils armés ont déjà participé aux combats, de même que des combattants tribaux. Le gouverneur de la région Minni Minnawi, un ancien chef rebelle aujourd'hui proche de l'armée, avait déjà au mois de mai appelé les civils à prendre les armes.
Une coalition de tribus arabes du Darfour prête allégeance aux FSR
Également lundi, une coalition de tribus arabes de l'État du Sud-Darfour a annoncé dans une vidéo mise en ligne son allégeance aux FSR et appelé ses membres à déserter l'armée pour rejoindre les rangs des paramilitaires.
Ces appels renforcent les avertissements de l'ONU, qui affirme que la guerre a désormais une « dimension ethnique » au Darfour. L'organisation estime que les exactions commises dans cette région, principalement par les FSR et des milices arabes alliées contre des civils non-arabes, pourraient constituer des « crimes contre l'humanité ».
Le décompte des agressions sexuelles, attribuées par la quasi-totalité des rescapées aux FSR, s'alourdit chaque jour, selon l'organe gouvernemental de lutte contre les violences faites aux femmes. Les FSR accusent également l'armée d'« odieux massacres », notamment dans la région de Khartoum, selon un communiqué publié mardi.