S'appuyant sur des principes du droit international public, plus précisément du droit des conflits, le professeur Abdoulaye Soma , a, du haut de son érudition affirmée que le Burkina Faso n'était pas en guerre, au regard desdits principes.
Au- delà du fait que cette affirmation a heurté la sensibilité de bon nombre de Burkinabè, principalement ceux qui ont été meurtris dans leur chair et dans leur âme par la situation que nous vivons, il convient de rappeler au doc savant qu'est le professeur Soma, que la guerre est d'abord et avant tout une situation de fait , avant de s'embarrasser des circonvolutions juridiques.
Les individus armés qui ont pris les armes contre notre pays se préoccupent-ils des principes du droit de la guerre quand ils tirent aveuglement sur les populations civiles fauchant au passage d'innocentes personnes qui sont loin de leur cause de flibustiers et de corsaires prétendument engagés dans une guerre sainte. Ces actes de guérilla et de rapine ne méritent-ils pas une réponse appropriée à la hauteur de la perfidie ? Peut-on parler de droit à des individus téléguidés par des maîtres de l'ombre dont la plupart s'érigent en donneurs de leçons le jour pour se revêtir de leur manteau de loup la nuit ?
En vérité, cette assertion du professeur Soma traduit l'ambivalence des élites africaines qui ont bu à satiété à la source du savoir occidental, au point de percevoir souvent la réalité sous le prisme déformant de celui-ci. Qui oserait de nos jours dire aux habitants de Djibo, Kelbo, Arbinda, Solenzo ou Di ce que Soma a dit, sans être voué aux gémonies, voire pendu haut et court? Plus généralement, cette sortie du professeur repose avec acuité la nécessité de la refondation de l'Etat burkinabè en l'asseyant sur notre substrat culturel. Le droit gréco-romain, héritage de la colonisation, nous a conduits jusque-là dans des impasses institutionnelles et judiciaires, en témoignent le cycle des coups d'Etat et les nombreux dossiers qui jonchent les tiroirs des palais de justice. Bien sûr, la mal gouvernance y est pour quelque chose, mais l'armature juridique et les « opportunités » qu'elle offre aux dirigeants doivent être prises en compte.
Durant les siècles qu'ont duré nos royaumes et empires précoloniaux, dans lesquels d'entre eux a-t-on entendu parler d'actes crapuleux, ou d'abus excessif de pouvoir ? C'est que dans tous ces royaumes, le monarque règne, mais c'est la coutume qui gouverne. Le Mogho Naaba a beau être un roi de droit divin, il ne lui viendra jamais à l'esprit d'enfreindre la coutume. Idem pour l'Emir du Liptako ou le Kolovo des Bobos. Il y a donc plus qu'urgence à revenir à nos fondamentaux, pour prétendre aller d'égal à égal à la mondialisation avec les autres. Les dragons et tigres asiatiques nous ont montré la voie, et, le berceau de l'humanité ne saurait être en reste, si tant est que c'est nous qui avons apporté la civilisation aux autres .Il y a donc un saut à faire comme disait l'éminent professeur Ki-Zerbo.