Sénégal: Trajet Dakar-Ziguinchor en contexte de blocus - Odyssée cauchemardesque !

Ceux qui ont effectué le voyage Dakar-Ziguinchor, le mardi 27 juin 2023, pour passer la Tabaski en famille en Casamance, ont vécu l'enfer ce jour-là, notamment sur l'axe Dakar-Kaolack. La faute, entre autres, au blocus de facto dans lequel s'est retrouvée Ziguinchor, à travers la suspension des rotations maritimes du bateau Aline Sitoë Diatta (ASD), des vols aériens et de la desserte des bus Sénégal Dem Dikk , de la société de transport public Dakar Dem Dikk (DDD), pour «problèmes de sécurité», entraînant une forte demande et une pression sur les routes à destination de la région Sud. Retour, dans ce premier jet qui retrace l'étape Dakar-Kaolack, sur les affres d'un périple !

Il est 5 heures du matin, sur la route des Niayes, à Keur Massar, en banlieue de Dakar, le mardi 27 juin 2023. Les horaires de Sandaga transportant des commerçants et commerçantes, des bana-banas et vendeuses de légumes et autres travailleurs sont déjà en route. Les premiers cars de différentes lignes de minibus Tata et «Ndiaga Ndiaye», de taxis-bokkoo (des taxis partagés par 4 personnes, à destination de Dakar, par le péage, moyennant 1300 FCFA par individu), de taxis-clandos, etc., s'arrachent les premiers clients au niveau des arrêts. Il y a de l'animation aux alentours du rond-point de l'autopont, contrairement au reste des quartiers de la ville encore endormis.

En cette veille de célébration de la fête de l'Aïd el-Kabir ou Aïd al-Adha, communément appelée Tabaski, la capitale Sénégalaise continue de se vider de son monde. Keur Massar n'est pas en reste. Et sur la route nationale N°1 (RN1), c'est déjà les premiers embouteillages, notamment entre Sicap Mbao et Poste-Thiaroye. Difficile pour les voitures d'avancer convenablement. L'on peut constater que, de Keur Massar à la gare routière interurbaine des Baux Maraîchers de Pikine, en passant par Fass Mbao, Diamaguene, Poste-Thiaroye, Sips, Bountou Pikine, tous les principaux arrêts «interurbains», points de départ de voyageurs pour l'intérieur du pays, sur la RN1, dans le sens Dakar-Rufisque, sont noirs de monde.

Entre hausse des prix du transport et rush

Portant des sacs à dos, traînant des valises, béliers, assis à côté de sachets, sacs d'oignon et de pommes de terre, entre autres bagages, ces voyageurs en partance pour différentes localités du Sénégal où ils ont prévu de passer la Tabaski en famille, comme il est de coutume dans notre pays, sont facilement reconnaissables et identifiables des clients des bus, minibus et cars de transports en commun urbains de la capitale et sa banlieue. Il y en avait pour toutes les destinations : du Nord au Sud, en passant par le Centre-Ouest, le Centre, l'Est, le Sud-Est...

Et face à la forte affluence, les transporteurs et chauffeurs ont revu tous les prix à la hausse. Et de tous ces voyageurs, ceux désireux de se rendre en Casamance (notamment des localités des régions de Kolda, Sédhiou et surtout Ziguinchor) ont le plus souffert de cette hausse généralisée et démesurée des prix qui sont passés du simple au double voire presque le triple. En attestent les bus qui demandaient entre 7500 et 9000 FCFA pour Bignona, Ziguinchor et environ, et pour lesquels il faut payer 15.000 FCFA, si l'on parvient à en trouver un.

Les minicars exigent jusqu'à 20.000 FCFA, au lieu des 9000 à 10.000 FCFA réclamés en temps normal. Quant aux clients des taxis-brousses, plus connus sous le nom de «7 places», ils sont obligés de casquer 25.000 FCFA pour se rendre à Ziguinchor, contre 10.000 FCFA avant. Ceux qui ont acheté leurs moutons de Tabaski à Dakar, sont contraints de débourser 10.000 FCFA par tête, pour le transport, en plus de 15.000, 20.000 ou 25.000 FCFA qu'ils ont dû payer pour obtenir un billet, c'est selon. Et les propriétaires de béliers sont prioritaires, à chaque fois qu'un véhicule se positionne sur la piste des départs.

Tous les tableaux des départs débordent aux baux maraichers

D'ailleurs, avec la hausse vertigineuse des tarifs de transports, particulièrement pour la destination Casamance où le blocus sur Ziguinchor, pour des raisons de «sécurité», disent les autorités, a explosé les prix, et le grand rush ne facilitant pas les choses, certains y ont passé la nuit à attendre un véhicule. Or, à moins de 24 heures (pour la Coordination des musulmans du Sénégal qui a appelé à prier mercredi) et 48 heures (pour la Commission nationale qui a prié jeudi) de la Tabaski, plus les minutes passent, plus la situation se complique, exposant les passagers à la merci des spéculateurs.

C'est le cas aux Baux Maraîchers où tous les tableaux des départs débordent. Malgré une présence importante de cars interurbains, toutes catégories confondues, la demande semble désormais supérieure à l'offre. C'est un imbroglio total. Le temps devient précieux.

Et pour ne pas trop en perdre, nous décidons de nous rabattre sur les arrêts parallèles. Quelques minutes après, nous voilà à Poste-Thiaroye, vers 6 heures. Ici, des «Ndiaga Ndiaye» règnent en maîtres : Touba-Ndiarème (Dourbel), Thiès-Tivaouane, Louga-Ndar (Saint-Louis), Kaolack-Fatick, Ziguinchor (12.000 FCFA) par le péage, etc. crient à tue-tête des apprentis et autres rabatteurs («coxeurs»), en direction des personnes qui débarquent sur place...

Mais, c'est peine perdue ! Ils sont vides ; personne ne semble vouloir voyager à bord de ces cars, en cette période d'événements religieux, malgré les prix préférentiels et défiant toute concurrence proposés. «"Ndiaga Ndiaye moom woorul ci" long voyage ; surtout en période d'événements. Aussi ils sont très lents et les sièges ne sont pas confortables pour un long voyage», rétorquent des passagers face à l'insistance de coxeurs/apprentis, pour les convaincre d'embarquer à bord. Par contre, chaque fois qu'un bus débarque, c'est la ruée pour espérer trouver une place.

Les premiers maux du voyage

Les minutes passent, le jour se lève avec les premières lueurs matinales. Un bus vide descend de l'autopont : «Kaolack 5000 FCFA. Fu way wacc 5000», entonne l'apprenti. Des clients pour Kaolack, il y en a, certes ; mais le prix dissuade plus d'un. «En temps normal, Kaolack, c'est 2500 FCFA ; ils ont doublé le prix», déplore un passager qui a fait marche arrière après avoir été informé du billet. Avec quelques passagers à bord, il avance vers Diamaguene, Fass Mbao... où un monde fou attend des cars pour quitter Dakar.

A sa suite, un autre bus à moitié plein débarque, proposant «Kaolack 6000 FCFA», avant de continuer lui aussi son trajet. D'ailleurs, ils n'ont pas le choix, un motard de la Gendarmerie veille au grain, empêchant les cars de stationner longtemps sur place, pour éviter une perturbation de la circulation.

7 heures, un minicar de 18 places s'arrête à nos pieds. «Kaolack 5000 FCFA», lance le chauffeur. Sans hésiter, ayant décidé de voyager par étapes, nous voilà à bord, en compagnie de 3 autres voyageurs dont 2 à destination de la Casamance. Comme nous. Et cap sur la ville de «Mbossé», du nom du totem de Kaolack. Après un détour par le rond-point de Sicap Mbao, pour emprunter l'autoroute à péage à partir de Poste-Thiaroye, le car peut rouler en roue libre.

Mais, à hauteur du stade Président Abdoulaye Wade de Diamniadio, les premières difficultés s'annoncent. Une petite déflagration : c'est le pneu avant droit qui a éclaté ; il n'est plus d'usage ; il faut le remplacer par la roue de secours et reprendre la route. Le car «avale» paisiblement des kilomètres (km) jusqu'à Keur Balla, la sortie de l'autoroute à péage juste après Mbour, où un embouteillage monstre (sur environ 2 km) nous fera perdre près d'une heure.

A cause notamment des travaux du pont de l'autoroute Mbour-Kaolack à hauteur de rond-point. A partir de là, l'on retrouve la nationale, pour le reste voyage. Et un peu après 11, Kaolack. Et bonjour le pire cauchemar du voyage...

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