Soudan: La guerre entame sa douzième semaine, les médiations africaines relancées

Des manifestants dans les rues de la capitale soudanaise, Khartoum en avril 2019

L'Igad a invité les deux généraux soudanais, Abdel Fattah al-Burhan et Mohamed Hamdan Daglo, à une rencontre au sommet lundi 10 juillet. L'idée a été lancée après une réunion entre l'Union africaine et l'Igad. Mais selon plusieurs spécialistes, cet appel semble n'avoir aucune chance d'aboutir. Les deux belligérants de la guerre soudanaise ne paraissant pas vouloir arrêter les affrontements qui ravagent le pays depuis le 15 avril. Les pays africains tentent de reprendre l'initiative et de faire avancer une nouvelle fois la voix de la raison, même si leurs chances d'aboutir semblent minimes.

Dans la crise soudanaise qui fait rage depuis bientôt trois mois, il y a un besoin absolu d'une présence africaine, qui soit politiquement réaliste. Mais l'Igad et l'Union africaine ont du mal à s'accorder sur une stratégie qui pourrait mettre fin à cette lutte au Soudan.

Une rencontre au sommet entre les deux généraux, al-Burhan et Daglo dit Hemedti, semble n'avoir pas pris en compte la réalité du terrain. L'idée de cette rencontre a été mentionnée par l'Igad (Autorité intergouvernementale pour le développement) très tôt dans un conflit que l'on ne peut pas réduire, selon les observateurs, à un simple désaccord entre généraux. « C'est quelque chose de plus compliqué et de plus profond. Beaucoup de choses s'y jouent, et pas seulement le statut des forces de soutien rapide et leur intégration à l'armée », précise le chercheur Laurent Marchal. En effet, jusqu'à présent, l'Igad n'a pas fait de grandes propositions en vue d'une solution. Son appel à une rencontre au sommet « ressemble plus à une volonté d'exister », sans pouvoir peser réellement, indique le chercheur.

On a remarqué d'ailleurs comme une compétition entre les différents pays ou organisations qui pourraient se lancer dans une médiation pour le Soudan, surtout après l'échec qu'a essuyé le mois dernier l'initiative saoudienne et américaine pour un cessez-le-feu, malgré les neuf accords obtenus et non respectés. Selon certains observateurs, Djeddah réfléchit, mais d'une manière très approximative, à élargir les discussions de paix à deux autres pays, en l'occurrence les Émirats arabes unis et l'Égypte, qui sont impliqués d'une manière ou d'une autre dans la lutte au Soudan.

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Réunion des pays voisins au Caire

L'Égypte est particulièrement dans l'embarras face à cette guerre à sa frontière et tente d'intervenir tant bien que mal sur le dossier soudanais. Elle a appelé à une réunion des pays voisins du Soudan, jeudi 13 juillet, au Caire. Le président sud-soudanais, Salva Kiir, et son homologue tchadien, Mahamat Idriss Déby, ont déjà confirmé leur présence à cette conférence.

Face à la guerre qui s'intensifie et qui menace de s'étaler aussi bien dans le temps que géographiquement, avec de nouveaux fronts qui s'ouvrent au Darfour et dans le Nil Bleu, et alors que les deux parties en lutte recrutent des milliers des jeunes civils parmi leurs sympathisants, l'Égypte ne peut plus rester les bras croisés. Timidement, elle tente de peser dans ce dossier et compte organiser cette conférence des pays voisins du Soudan au niveau présidentiel.

Mais les chances d'une réussite égyptienne semblent également compromises en raison de sa position. Ce pays est réputé proche de l'armée soudanaise, et les généraux Abdel Fattah al-Sissi et Abdel Fattah al-Burhan ont fait leurs études dans la même école militaire au Caire. Par définition, la marge de manoeuvre de l'Égypte est donc réduite dès le départ. Bien que le pays ait multiplié les déclarations appelant à un accord par le dialogue entre les deux généraux, le Caire est, au fond, plus proche de l'armée régulière. Secrètement, font remarquer les observateurs, l'Égypte souhaite que Hemedti disparaisse de la scène politique.

Outre le dossier soudanais, l'influence égyptienne sur les dossiers régionaux a, d'une manière générale, régressé depuis plus d'une décennie. Elle a quasiment cédé sa place à d'autres forces telles que les Émirats arabes unis. Par ailleurs, l'Égypte craint que le chaos soudanais n'attire à ses frontières des jihadistes, comme cela avait été le cas avec la Libye voisine. Elle se sent donc obligée d'agir, même si son espoir de réussir est minime car considérée comme partie prenante dans cette lutte ; cette caractéristique la prive de la possibilité d'une médiation acceptée par tous.

L'Égypte accueille sur son territoire le plus grand nombre de réfugiés soudanais depuis le début de la crise : 40% d'entre eux selon l'ONU. Elle craint donc une déstabilisation, qui serait favorisée par sa situation économique fragile. Pour toutes ses raisons, la probabilité d'une réussite égyptienne jeudi est extrêmement faible.

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