Dakar — L'argument souvent opposé à l'Afrique, selon lequel le continent manquerait d'espaces dédiés et de ressources humaines compétentes pour la conservation des biens culturels, « ne tient plus la route », a déclaré le journaliste culturel sénégalais Alioune Diop, administrateur du Festival « Caméra 72 », consacré aux documentaires sur l'art.
« L'argument de l'absence d'espaces de conservation et de ressources humaines compétentes pour accueillir et gérer les oeuvres culturelles à restituer à l'Afrique ne tient plus la route », a-t-il déclaré dans un entretien avec l'APS.
« Au Sénégal, il y a le Musée des civilisations noires, le Togo a rénové l'ancien Palais des rois, le Bénin construit des espaces de conservation, de même que d'autres pays du continent, qui peuvent accueillir ces objets d'art qui doivent être restitués à l'Afrique », a-t-il relevé.
Le continent africain « a suffisamment d'infrastructures et de ressources humaines compétentes pour conserver ses trésors qui ont été spoliés », affirme Alioune Diop, par ailleurs fondateur de l'entreprise culturelle dénommée PACAF, Production artistique culturelle d'Afrique.
« Depuis très longtemps, des ateliers, des rencontres de formation sont organisés sur le continent dans les métiers de gestion muséale, mais également par rapport à la gestion des galeries d'art. De ce côté-là, l'Afrique n'a pas à rougir », a-t-il ajouté, en marge de la cérémonie de clôture de la troisième édition des journées du documentaire artistique de Dakar dénommées « Caméra 72" et consacrées aux sujets relatifs aux arts.
« Trésors patrimoniaux : Quelles coopérations africaines pour une restitution », est le thème de l'édition 2023 (10 au 12 juillet prochain).
À l'initiative du président français Emmanuel Macron, l'économiste sénégalais Felwine Sarr et l'historienne de l'art française Bénédicte Savoy ont rendu, en 2018, un rapport sur la restitution du patrimoine culturel africain spolié pendant la colonisation et gardé dans les musées occidentaux.
De nombreux pays africains comptent sur la mise en oeuvre effective des recommandations de ce rapport pour entrer en possession certains des objets culturels les plus emblématiques de leur identité et de leur histoire.
Au moins 88 000 objets provenant de l'Afrique Subsaharienne sont présents dans les collections publiques françaises, dont près de 70 000 dans le seul musée du quai Branly-Jacques Chirac, à Paris, quand les inventaires des musées africains ne dépassent pas les 3 000 à 5 000 numéros, selon la plupart des spécialistes.