Burkina Faso: Commerce de Garba à Ouagadougou - Les hommes en font désormais leur 'chose'

13 Juillet 2023

Le « Garba », spécialité culinaire ivoirienne faite à base de manioc, est désormais entré dans les habitudes alimentaires de bon nombre de Ouagalais. Dans la capitale, plusieurs restaurants offrent ce mets aux populations. Si au début, c'était des femmes qui s'intéressaient à ce commerce, le secteur est de plus en plus courtisé par la gente masculine. Amadou Sangaré qui s'est lancé dans la vente du Garba depuis septembre 2017 ne regrette pas son choix. Constat.

Il est 15 heures en ce mois de mars, sous un soleil de plomb, au Salon international de l'artisanat de Ouagadougou (SIAO). A quelques jets de pierre de ce temple de l'Artisanat africain, derrière la pharmacie Yennenga, se dresse le restaurant : « Chez Prési Sangaré » qui offre à sa clientèle une seule spécialité : le « Garba», un art culinaire ivoirien fait à base de manioc accompagné de poisson-thon.

A l'intérieur du « Garbadrôme », sont disposées quelques tables et des chaises. Malgré que nous sommes dans l'après-midi, le restaurant continue d'attirer la clientèle. En face d'une grande table quadrillée, deux dames servent de la nourriture. Des plats à partir de 500 F CFA prêts à être livrés sont disposés sur la table. A côté, un comptable reçoit les commandes et encaisse les clients.

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Pendant ce temps, le maitre des lieux, Amadou Sangaré, un jeune de 36 ans s'attelle à faire les comptes de la journée dans son bureau. Titulaire d'une maitrise en économie, gestion des entreprises et des organisations obtenues en 2014 à l'Université Ouaga 2, il dit avoir muri son projet de vente de Garba depuis belle lurette. Après l'obtention de son diplôme, le jeune homme de teint noir et de taille moyenne a tenté une seule fois les concours de la fonction publique.

« Comme cela s'est montré infructueux, j'ai décidé de mettre en oeuvre mon projet », confie-t-il. Pour lui, la vente de l'attiéké au poisson-thon communément appelé le Garba, est une activité comme tout autre. Ce sont les haoussas du Niger qui ont initié cette vente en Côte d'Ivoire d'où, le nom Garba, explique celui qui a fait une partie de ses études en terre ivoirienne avant de regagner la mère patrie après l'obtention de son Baccalauréat.

Un secteur rentable

Les habitudes alimentaires et culinaires de ce pays sont restées en moi et il fallait combler le vide. A la recherche de solutions, j'ai pu mettre en place ce restaurant », détaille-t-il. Au début, cela n'a pas été facile, car, l'idée n'est pas partagée par tous. Je n'avais pas de soutiens et j'ai dû batailler pour démarrer cette activité. Concernant, la nature de son business, le jeune diplômé avoue l'exercer sans complexe. « Tout le monde peut s'y intéresser. Le fait d'être homme ne constitue pas un frein pour moi.

Tout dépend de la personne et de ses objectifs. Si, tu te sens dans un métier et que tu as l'amour de ce métier, je ne vois pas de difficultés qui peuvent te freiner », précise-t-il. Pour agrandir son entreprise, M. Sangaré a exploré plusieurs pistes. En la faveur du lancement du Programme d'autonomisation économique des jeunes et des femmes (PAEJF), le jeune entrepreneur a bénéficié de la part des autorités une somme d'un million de F CFA. A l'écouter, ce montant lui a permis d'acquérir du matériel.

Aujourd'hui, M. Sangaré affirme tirer son épingle du jeu. « Cette activité, nous permet de nous réaliser. Le nombre de personnels a augmenté, nous faisons des autofinancements pour aller à un rythme accéléré, pour pouvoir réaliser d'autres choses qui peuvent permettre à mieux structurer l'entreprise ou l'agrandir à moyen ou long terme », témoigne-t-il. D'où, son invite à l'intention des jeunes en quête d'emploi à s'intéresser à l'entrepreneuriat.

Cependant, Prési Sangaré reconnait que le secteur n'est pas un fleuve tranquille. Les questions de finances et de ressources humaines sont les difficultés majeures qu'il rencontre. De son avis, après la mobilisation des fonds et la mise en place de l'activité, il n'est pas aisé de trouver une ressource humaine adéquate qui puisse réellement vous aider à atteindre vos objectifs.

Un appel à soutenir l'entrepreneuriat

« A l'occasion, l'entrepreneur invite les autorités à soutenir davantage les jeunes. « Nous souhaitons qu'il y ait un environnement très favorable, surtout la paix au pays parce que le domaine des affaires va de pair avec un pays stable. Les autorités font de leur mieux, mais ce que nous leur demandons, c'est de baliser le terrain, mettre les conditions adéquates pour faciliter la tâche à ceux qui désirent entreprendre », relève-t-il.

Le « Garbadrôme » de Prési Sangaré est bien apprécié par la population. Damata Compaoré fait partie de ses fidèles clients. Commerçante résidente au Centre-Est, dame Compaoré à chaque passage dans la capitale trouve un temps pour aller déguster un plat de Garba chez M. Sangaré. « C'est un endroit propre avec un personnel respectueux. Je suis très satisfaite du service. C'est la deuxième fois que je viens manger ici.

J'apprécie le goût du Garba », se réjouit-elle. Madame Compaoré encourage les hommes qui s'intéressent à ce domaine. Pour elle, c'est une entreprise qui n'est pas seulement dédiée aux femmes même s'il s'agit de la restauration. Concernant, le regard que porte la société sur son activité, M. Sangaré note une appréciation positive dans son ensemble. Cependant, il déplore que certaines personnes au regard de leurs principes, leurs ethnies et leurs communautés voient l'activité d'un mauvais oeil parce qu'ils se disent que la restauration relève du domaine de la femme.

L'exemple de M. Sangaré pousse d'autres jeunes des deux sexes à se lancer dans la vente du Garba. Ramatou Moné, ex-étudiante en sociologie à l'Université Joseph-Ki-Zerbo âgée de 28 ans est piquée par l'amour du métier. Elle vient de faire son entrée dans la commercialisation du Garba. « J'ai commencé la vente du Garba, il y a 7 mois de cela. Les difficultés ne manquent pas, car comme c'est le début, les clients viennent à compte goûte », soutient-elle. A cela s'ajoute, le coût élevé du local. Cette situation fait qu'après les comptes ,à la fin du mois, elle n'arrive pas à s'en sortir. Mais Mademoiselle Moné, garde espoir qu'avec le temps tout ira bien.

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