L’intégration africaine à de beaux jours devant elle. C’est la perception de Standard Chartered Bank en Côte d'Ivoire qui fait savoir lors d’une rencontre de haut niveau sur les défis et les opportunités posés par l’intégration économique en Afrique, tenue en marge de l’Africa CEO Forum qui s’est tenue cette année à Abidjan.
John Mokom, directeur général de la Standard Chartered Bank en Côte d'Ivoire, a fait savoir : « Parmi les obstacles aux flux de capitaux figurent le risque de change, les questions réglementaires, la pénurie du dollar et les problèmes d'infrastructure », estime-t-il.
Avant de relever : « Mais ces défis, aussi immenses soient-ils, créent des opportunités significatives pour la plupart des personnes que nous voyons ici, afin que nous passions de 300 entreprises milliardaires en Afrique à 3 000, ce qui était le thème de l’Africa CEO Forum de cette année ».
Le patron de cette institution bancaire s’est réjoui du fait que certaines régions en Afrique permettent déjà la libre circulation des capitaux et des personnes, dont l'Union économique et monétaire ouest-africaine (Uemoa) qui cité comme exemple en matière d’intégration économique communautaire.
M. Mokom a toutefois attiré l’attention sur l’énormité des défis face à l’objectif de développer le commerce intra-africain et aider les entreprises à se développer dans d’autres régions du continent qui disposent de monnaies différentes.
« Si nous avons un client basé au Ghana qui souhaite faire des affaires en Côte d'Ivoire, il sera confronté à des problèmes de devises et de réglementation. Même si la Zone de libre-échange continentale africaine (Zlecaf) travaille sur ces questions de tarifs, nous constatons toujours un certain niveau de protectionnisme dans le programme de libre-échange sur le continent, et je pense que cela entrave la pleine efficacité de la ZLECAf en tant que moteur de la croissance économique », s’est-il désolé.
Un obstacle qui est en passe d’être résolu avec le début prochain des transactions commerciales avec des devises africaines différentes et le lancement récemment à Accra l'Africa Trade Gateway (Atg). Il s'agit d'une suite de cinq plateformes numériques initié par Afreximbank et la Zone de libre-échange continentale africaine Zlecaf.
Il faut rappeler la rencontre d’Abidjan évoquée plus haut a enregistré la participation de PDG et des capitaines d’industrie de divers secteurs d’activité, notamment les télécommunications, l’exploitation minière, la logistique et les agences de développement qui éprouvent un intérêt commun à faire progresser l’intégration des marchés fragmentés sur le continent.
L'un des principaux problèmes qu’ils ont identifié est que les décideurs politiques traînent les pieds. Qu'il s'agisse d'un cimentier camerounais qui ne peut importer des matériaux essentiels du Nigeria voisin en raison de taxes élevées ou d'un opérateur de téléphonie mobile de la région de l'UEMOA qui hésite à s'implanter en dehors de l'union monétaire, les barrières réglementaires constituent l'un des plus grands obstacles à la croissance des entreprises africaines.
Outre les questions réglementaires, Brice Lodugnon, directeur au sein du Fonds d'infrastructure Africa50, a déclaré qu'il était également difficile de sensibiliser les entreprises à ce qu'elles peuvent importer des pays voisins plutôt que des marchés non africains.
A son avis, le manque de visibilité et d'informations sur le marché empêche souvent les entreprises de s'intéresser à d'autres marchés africains alors que les données sur les fournisseurs en Europe et en Chine sont si facilement accessibles.
Onike Nicol-Houra, spécialiste des relations avec les investisseurs au sein de l'Africa Investment Forum (Aif), quant à elle, a expliqué que les entreprises évoluaient actuellement dans un monde où les risques sont accrus et où les perspectives sont marquées par « la vulnérabilité, la complexité et l'ambiguïté ».
Cependant, a-t-elle souligné, malgré les défis, il existe des exemples de projets et activités couronnés de succès couvrant une diversité de marchés complexes. Citant l'autoroute Lagos-Abidjan d'une valeur de 15 milliards de dollars, elle a déclaré qu'il s'agissait d'un « tremplin vers des sommets plus élevés ».
Avant d’affirmer : « Nous devons considérer la ZLECAf comme un tremplin, en utilisant certains de ces projets d'intégration régionale que nous avons. »
Brandissant les résultats d‘une étude que PwC Singapour a réalisé sur les futurs corridors à forte croissance du commerce mondial – et sur les lieux de production des marchandises, M. Mokom, de Standard Chartered, a confié : « Le Moyen-Orient et l'Asie contribueront à environ 44% du commerce mondial d'ici 2030. Les solutions numériques de financement de la chaîne d'approvisionnement constituent l'un des principaux leviers d'accélération ».
Pour lui, « il ne s'agit pas seulement de rendre le commerce plus rapide, plus simple, plus transparent et plus compétitif, mais aussi de s'assurer que nous pouvons accroître la participation des PME en leur donnant accès à l'information par l'intermédiaire des plateformes numériques ».