Mes relations avec Ousmane Tanor DIENG transcendent la vie politique, elles sont fraternelles et affectives. Aussi, m'est-il très difficile de parler de lui car, c'est comme si je parlais de moi-même et, comme le dit si bien l'adage wolof : "SAABU DU FOOT BAPAM'.
Néanmoins, c'est avec plaisir je vais devoir sacrifier modestement à cette exigence, par devoir de mémoire.
Ceux qui le connaissaient savent que rien de ce qui est humain ne lui était étranger, si bien qu'il était très sensible à la douleur de son prochain.
Ousmane Tanor Dieng n'avait certes pas cheminé avec le Président Senghor, mais tout, dans sa démarche, dans sa méthode d'action, dans son approche de la chose publique, dans sa vision globale de la société et de ce qu'elle doit être, TOUT, dis-je, renvoie au Président Senghor, je veux dire, à son enseignement.
Homme d'Etat, homme politique, patriote, Républicain et démocrate, c'est dans la période post-alternance qu'il s'est assurément révélé comme le véritable héritier de Senghor, le continuateur de son oeuvre politique et le gardien infatigable de l'héritage senghorien qu'il tenait du Président Abdou Diouf et qu'il s'était fait un point d'honneur de préserver et de protéger, contre vents et marais.
C'est ainsi qu'après 2000, il avait refait, selon le professeur Assane Seck (paix à son âme), l'histoire à rebours, en retournant sur les traces du père fondateur, pour revivifier, consolider et préserver le legs.
Aujourd'hui encore, qui ne s'est pas demandé, même dans son for intérieur, ce que serait devenu le parti socialiste, s'il n'avait pas été là, dans la période dite des vaches maigres, fidèle au poste, ouvert, mais ferme, intransigeant dans ses convictions et incorruptible.
Ne disait-il pas un jour, je le cite : « je ne vois pas ce que le pouvoir libéral pouvait m'offrir, que je n'ai déjà obtenu, avec le Président Abdou Diouf ».
Sa force de caractère résidait dans son ancrage dans nos valeurs de "jomm, de sutura, de mun, de ngor et de kolëre", comme en attestent ses propos tirés de son discours-programme de 2012 :
« C'est parce que nous sommes loyaux et fidèles à notre histoire que nous assumons TOUT et pour TOUS, y compris pour ceux qui nous ont quitté, à un moment ou à un autre ».
Ousmane Tanor Dieng était un homme politique hors du commun, d'une très grande pudeur, honnête, loyal, sincère et discret dans ses rapports avec l'autre ; de ce pont de vue, il n'a jamais été pris à défaut.
Son attachement viscéral aux intérêts du pays ainsi que sa claire vision de la maturité démocratique de notre peuple l'avaient conduit, dans un contexte politique particulier, où aucune formation politique ne pouvait plus conquérir seule le pouvoir, à initier, avec d'autres leaders, différentes formes de regroupements des forces de l'opposition.
La forme la plus achevée de ses initiatives, en termes de longévité, de bilan, de succès, est la coalition Benno Bokk Yaakaar.
Ousmane Tanor Dieng ne faisait pas dans les demi-mesures ; quand il s'engageait, il donnait tout et s'investissait sans ménagement, au service de l'intérêt général. Il en était ainsi de la réélection du Président Macky Sall, en 2019 ; un objectif fondamental à la réalisation duquel, il s'était totalement investi, jusqu'à la victoire finale.
Ousmane, comme je l'appelais si affectueusement, s'était forgé progressivement une solide carapace, une stature politique nationale et internationale, par le travail méthodique et organisé sur le terrain, du bas au sommet de la pyramide, avec détermination, en faisant montre d'une grande capacité de résilience, face aux épreuves, de toutes sortes, dont certaines auraient fait craquer plus d'un.
Son secret, comme il aimait souvent le rappeler, était de toujours « rester droit dans ses bottes », en toutes circonstances, ses valeurs paysannes chevillées au corps.
Il est parti, laissant des amis, des camarades, des compagnons, en somme tout une famille, certes orpheline, mais fière de lui et riche du bel exemple qu'il fut, pour tous : une oasis de valeurs, comme disait l'autre.
Rendons grâce à Dieu qui nous a donné la force de surmonter la dure épreuve de sa disparition inattendue, de garder tous nos esprits et de nous employer, comme c'est le cas présentement, à honorer sa mémoire, en poursuivant résolument l'oeuvre politique qu'il avait entreprise, avec nous et en préservant le legs du Président Senghor.
Ce témoignage du Président Abdou Diouf qui le connaissait mieux que quiconque, sur lui, campe à merveille le profil de l'homme, je le cite : « Ousmane Tanor Dieng était doté d'un talent immense, d'une belle intelligence, d'un coeur magnifique et d'une belle efficacité, dans la réflexion comme dans l'action.
Il était particulièrement rapide, pour juger d'une situation politique nationale ou internationale, au regard des normes éthiques très élevées... ».
Je salue, à nouveau, sa mémoire et prie pour le repos de son âme au paradis.
Fait à Dakar le 15 juillet 2023