Au-delà de certaines dates qui s'improvisent jours fériés au dernier moment, l'agenda malgache comporte un incontournable 14 juillet en la Résidence de France à Antananarivo. La délégation officielle malgache avait déjà pu y comporter le Chef du Gouvernement et une pléthore de ministres. Il faut sans doute mettre cette grande marque d'attentions particulières, et singulières, sur le compte de la parenthèse 1896-1960 qui a fait de la France notre « étrangère intime ».
Un 14 juillet mondain et psychanalytique quand on accepte d'éventuellement se retrouver dans l'embarras de remontrances, entre diplomatie d'égal à égal et conditionnalités de « PTF ». Mais, les nationaux ne peuvent en vouloir qu'aux dirigeants successifs de la République malgache: le pays d'avenir des années 1960 est devenu celui d'un plus-qu-imparfait du conditionnel improbable. Une conjugaison tout bonnement hors du temps.
Quand ce n'est pas un dessins-animés, qu'une énième décision saugrenue voudrait copier-coller par l'importation des personnages animaliers exotiques depuis l'Afrique, Madagascar incarne les sécheresses qui succèdent aux cyclones, une extrême pauvreté tout aussi endémique qu'une fabuleuse biodiversité menacée d'extinction, un sous-sol riches de promesses mirifiques alors que la monnaie nationale sombre à 5000 Ariary pour un Euro, sans doute pour se mettre au diapason du milliard de Francs malgaches (FMG) exigé pour se présenter à l'élection présidentielle.
La clochardise d'État déroule le scénario d'un long feuilleton aux multiples épisodes d'aides budgétaires et d'assistance financière étrangère aux scrutins censément de souveraineté nationale.
Les dirigeants, qui préféraient déjà une évacuation sanitaire à l'étranger plutôt que de faire confiance à une santé publique qu'ils savent défaillante pour l'avoir eux-mêmes abandonnée, demandent également désormais un passeport étranger fort parce que le passeport malgache permet tout juste de s'échapper d'un tiers-monde qu'aucune promesse présidentielle n'aura permis d'exorciser.
Les 20 jours entre le 26 juin, célébration du retour de l'indépendance, et le 14 juillet, confrontation schizophrénique avec le miroir de soi dans le regard de l'Étranger intime, ménagent une autre parenthèse ambiguë dans cet agenda malgache, « fotoan-gasy », hors du temps.