Ile Maurice: Condamné à perpétuité et gracié après 22 ans - Sanjay Luchun - «Partou inn sanzé, liberté res liberté prizon res prizon»

Il respire enfin l'air de la liberté après une vingtaine d'années à la prison de Melrose. Âgé de 51 ans aujourd'hui, cet assistant prêtre hindou avait été arrêté en 1999 pour trafic de drogue et condamné à perpétuité en 2001.

«Zot pé fer mwa promné depi gramatin, partou inn sanzé dan Moris. Pann fasil pou moi. Liberté res liberté prizon res prizon», lâche Sanjay Luchun. Joint au téléphone, sa voix est empreinte d'un mélange de gaité et de tristesse. «Ces 22 ans en prison n'ont pas été faciles, il y a eu des hauts et des bas. Je ressens de la joie à retrouver ma liberté et ma famille mais mes amis en prison me manqueront. J'ai adopté une certaine routine.»

Il évoque son ami Navin Ramburrun qu'il savait qu'il n'avait aucune chance de sortir. «Sa santé s'est détériorée jusqu'à sa mort en prison. Cette incarcération à vie m'a aussi affecté mais j'ai eu foi en moi et en Dieu. Je me suis dit que si je n'acceptais pas cette situation, j'allais me détruire moralement. Il m'a fallu deux à trois mois pour m'adapter. Pour ne pas me créer d'ennemis, je suis allé faire connaissance avec chaque détenu. En trois jours, je les avaient tous rencontrés.» Sanjay Luchun clame toujours son innocence et explique qu'il a attendu son ami Navin Ramburrun sortir de l'aéroport pendant 1 h et 45 minutes. «Si vraiment j'étais dans le trafic, je ne l'aurais pas attendu, mo ti pou fini sorti al livré marsandiz la.»

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En 22 ans, beaucoup de choses ont changé dans sa vie. «J'ai perdu ma mère, ma soeur, mon père et un neveu. Mon épouse m'a quitté. J'ai dû l'accepter et je me suis dévoué à aider mes codétenus avec des conseils, du soutien moral et des cours de relaxation. J'exerçais comme prêtre au temple de la prison. J'ai écrit 20 chansons en bhojpuri et une mauricienne. Je suis membre de la MASA mais je n'ai pas encore trouvé de titre à mon album.»

31 jours en détention policière pas déduits malgré une lettre à la Commission de pourvoi en grâce

En 2016 sa peine de prison à vie est commuée en 22 ans et en 2019, la Commission de pourvoi en grâce déduit 1 009 jours de sa peine totale pour le temps passé en détention provisoire avant son procès. Une erreur de calcul a été commise selon Me Pravesh Nuckcheddy qui nous explique avoir envoyé une lettre le 8 février dernier à la Commission de pourvoi en grâce. Son client aurait dû être libéré en mai 2023 car il avait passé 31 jours en cellule policière avant son procès. Cela n'aurait pas été pris en considération dans sa remise de peine à purger et il aurait reçu une lettre le 8 juin, soit quatre mois après disant que la commission n'avait pas accédé à sa demande.

Retour sur son arrestation

Le 5 mars 1999, le destin de Navin Ramburrun, secrétaire du Omkaleshwar Cultural Group, et de Sanjay Luchun, un assistant prêtre hindou, va basculer à tout jamais. Le premier est arrêté avec 1 154,7g d'héroïne et l'autre avec 529g d'héroïne d'une valeur totale de Rs 16 millions. Les deux hommes s'étaient rendus en Inde pour visiter des lieux sacrés. Les deux accusés rentrent à Maurice le 5 mars 1999 vers 21 h 45 sur le vol MK 745 en provenance de Delhi. Au scanning à la douane, Navin Ramburrun est repéré après avoir déclaré qu'il n'avait rien à déclarer.

Le douanier le fait ouvrir sa valise, en présence de deux autres agents, et découvre deux glacières (cooler box), une bleue et une rouge, sans emballage, qui semblent lourd. L'agent remarque aussi une odeur de colle. À l'intérieur de la première glacière, se trouve une poudre brunâtre soupçonnée d'être de l'héroïne. L'accusé reste silencieux. La deuxième de couleur rouge est ouverte et trois sachets d'héroïne retrouvés. Il dira : «Mo pa konn nanyé ladan pou Shekhar Samroo sa.»

Il dira aux policiers que son ami Sanjay Luchun qui l'avait accompagné en Inde était avec lui et l'attendait au parking. Un policier et un douanier retrouve ce dernier au parking et le ramène pour une fouille. En vérifiant sa valise, les agents trouvent une boîte contenant trois casseroles de tailles différentes. Une plus petite est examinée en premier et s'avère anormalement lourde. La petite casserole contient un sachet en plastique de poudre brunâtre avec du ruban adhésif sur l'extérieur de sa partie métallique. Un policier de l'ADSU l'interroge et il dit que c'est Raju Samroo qui lui a donné cela à lui apporter. Les deux autres casseroles contiennent chacune un sachet d'héroïne caché de la même manière. Il dira aussi : «Mo pa konn nanyé ladan pou Shekhar Samroo sa.»

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