La démocratie semble être en crise au Sénégal et partout dans le monde et ce sont ces crises qui sont à l'origine des débordements notés un peu partout.
C'est le point de vue de l'enseignant-chercheur en Sciences-Po à l'Université Gaston Berger de Saint-Louis par ailleurs Coordonnateur du programme de Master en Droits Humains et Démocratisation en Afrique. Selon le Dr Pape Fara Diallo, ce qui menace aujourd'hui la démocratie et les droits humains au Sénégal, c'est cette propension des pouvoirs publics à vouloir obstruer l'espace civique et restreindre les droits, les libertés publiques, la liberté d'expression, de manifester et menacer la liberté d'association. Il s'exprimait à l'occasion d'une conférence tenue à l'Université Gaston Berger de Saint-Louis et qui était axée sur « les défis de la démocratisation et de la protection des droits humains en Afrique ».
Initiée par les responsables de l'Urf des Sciences Juridiques et Politiques de l'Université Gaston Berger (UGB) de Saint-Louis, cette conférence tenue le week-end était axée sur le thème « Les défis de la démocratisation et de la protection des droits humains en Afrique ». Elle a réuni d'éminents universitaires sénégalais, de l'Afrique du Sud et du Bénin qui ont tous pris part à la conférence. Celle-ci était animée par le Président de Africa Jom Center, Alioune Tine, qui y a présenté une leçon inaugurale. L'activité entre dans le cadre de l'animation scientifique pour la promotion des droits humains des universités anglophones et francophones partenaires de cette Université de Sanar. Le continent africain fait face à des défis économiques et sociaux considérables.
À en croire l'enseignant-chercheur à l'UGB de Saint-Louis, Pape Fara Diallo par ailleurs Coordonnateur du Programme de Master en Droits Humains et Démocratisation en Afrique, « le chômage élevé, la pauvreté et l'inégalité sont des problèmes persistants dans de nombreux pays africains. Une situation qui crée une frustration et un mécontentement parmi la population, ce qui peut conduire à des mouvements de contestation et à des violations des droits humains. »
Il estime que la démocratisation doit être soutenue par des politiques économiques inclusives et des réformes sociales afin de garantir une amélioration des conditions de vie pour tous. Avant de rappeler que l'autre défi de la démocratisation en Afrique est la faiblesse des institutions démocratiques. Pour lui, de nombreux pays ont des gouvernements autoritaires qui restreignent la liberté d'expression, la liberté de la presse et les droits politiques.
La limitation de ces libertés fondamentales, a soutenu M. Tine, empêche le peuple de participer pleinement au processus politique et de tenir les dirigeants responsables de leurs actions. Alors que la mise en place de systèmes de gouvernance transparents, responsables et équitables est essentielle pour garantir la protection des droits humains. « La démocratie est un idéal. D'ailleurs le conférencier de par son expérience, a parlé de déficit sécuritaire lié à la faiblesse de l'Etat ou de son effondrement qui peuvent être des sources d'insécurité des citoyens en termes de violation des droits humains. Mais en dehors des questions sécuritaires, il y a les défis électoraux.
Parce qu'on dit très souvent qu'en Afrique, les élections sont conflito-gènes. Les processus électoraux ont précipité certains pays dans le chaos ( Guinée, Côté d'ivoire,, Mali, etc). Au Sénégal, les processus électoraux ont été entachés de violence préélectorale, pendant les élections et durant les periodes post-élections. Mais aujourd'hui ce qui menace la démocratie au Sénégal et les droits humains, c'est la volonté des pouvoirs publics â obstruer l'espace civique et à restreindre les libertés publiques, la liberté d'expression, la liberté d'association, la liberté de manifester, entre autres. Ce sont des droits constitutionnels et qui sont intrinsèquement liés à la personne humaine et qui sont menacés actuellement dans notre pays », a-t-il indiqué tout en rappelant que « ces restrictions et violations des droits humains sont souvent le lit de toute sorte de violence qui peut dégénérer et provoquer de graves troubles.
Ce qui s'est passé dernièrement au Sénégal en est une parfaite illustration. Les événements du début du mois de Juin dernier et ceux de Mars 2021 témoignent de l'essoufflement de nos systèmes démocratiques et témoignent aussi du désir de liberté des populations. En obstruant l'espace classique physique où les citoyens pourraient s'associer, se rassembler, s'exprimer, dénoncer, manifester leur mécontentement, ils n'ont d'autre alternative que de se retourner vers les réseaux sociaux pour se libérer. Malheureusement, ils sont poursuivis également sur ce terrain. Parfois on traque des opposants, des activistes, des membres de la société civile, des défenseurs des droits de l'homme et des journalistes jusque dans l'espace numérique simplement pour leur opinion.
C'est ce qui crée ce sentiment de crise de démocratie, de crise politique et sociale, qui affecte les régulations routinières de la démocratie », a analysé l'expert Pape Fara Diallo qui, tout comme nombre d'intervenants lors de cette conférence, estime que pour faire face à l'essoufflement de la démocratisation et garantir les droits humains, en Afrique, il est nécessaire de renforcer les institutions démocratiques, de promouvoir la responsabilité et la transparence, et de créer des opportunités économiques pour tous les citoyens. Il est également crucial de renforcer la participation citoyenne et l'inclusion politique, en donnant aux Africains une voix dans les processus de prise de décision.