Madagascar: Nord-Sud, l'orientation des habitations traditionnelles merina

La première impression des Européens quand ils débarquent à Antananarivo, après la Deuxième guerre mondiale, est l'uniformité des maisons, de couleur rouge, régulièrement alignées et superposées.

Et une « couronne de Palais et de clochers, découpant l'horizon des collines, confère à l'ensemble ce cachet particulier d'où naît l'émotion esthétique ». Un effet que recherchent à l'époque, les urbanistes modernes, « pour parachever leur conception architectonique ». Un urbaniste parisien qui, dans les années 1950, a l'occasion de passer dans la capitale, dans le cadre d'une mission officielle, ne manque pas de faire quelques remarques.

Les architectes locaux, conclut-il, à l'issue de son séjour à Antananarivo, savent respecter l'héritage du passé et laisser à cette ville une qualité d'architecture bien supérieure à celle de beaucoup de capitales tropicales plus récemment créées. Il ajoute cependant « que l'oeuvre réalisée au cours des trente dernières années (1920-1950), dans la mesure où elle rompt avec cette tradition, aboutit à de graves erreurs ».

D'après un urbaniste tananarivien, c'est l'histoire de la construction de la capitale qui explique l'apparence presque uniforme des maisons et des édifices de la vieille cité, qui dérivent d'un prototype lointain, la case merina, transformée et aménagée par la technique moderne. « Technique qui est imputable aux initiateurs européens, Gros, Laborde, Cameron, Sibree et autres. » Beaucoup d'auteurs étrangers traitent de la question et s'accordent sur ce point, tels, par exemple A. Jully dans ses Notes sur « l'Habitation à Madagascar » (Bulletin 1898) ou G.S. Chapus qui dépouille les archives de la London Missionary Society « Quatre-vingts années d'influence européenne en Imerina ».

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En effet, l'ancêtre, le prototype des maisons d'Antananarivo, se trouverait représenté par Mahitsielafanjaka, l'habitation d'Andrianampoinimerina, « case primitive, s'il en fût ». Cette maison type est rectangulaire, oblongue avec des dimensions verticales très élevées.

Trois poteaux ou « andry » de même longueur, placés sur le grand axe, sont destinés à recevoir le faîtage. Les deux extrémités sont reliées à la sablière par des rives en bois qui se prolongent au-dessus du faîtage. L'ensemble forme un triangle dont la pointe est dirigée vers le bas et la partie supérieure ouverte. « Les deux extrémités offrent l'aspect de deux cornes monumentales. » Leur longueur est proportionnelle à la situation et à la fortune du propriétaire. La forme dessine un angle très aigu. Le toit est donc formellement incliné.

« Les ethnographes croient reconnaitre dans ce type de case une origine indonésienne. » Toutefois, la construction obéit, en Imerina, à des règles traditionnelles et minutieuses : « Invariablement, le grand axe de la case doit être orienté Nord-Sud. » En outre, chaque angle et chaque emplacement à l'intérieur, portent le nom d'un mois de l'année. De même, ils ont une signification et une affectation bien déterminées et la préférence appartient à l'angle Nord-Est, le coin faste par excellence. « Quand nos ancêtres priaient, ils se tournaient vers le Nord-Est ; ils demandaient à «Andriamanitra Andriananahary» le très noble Seigneur et Créateurou Dieu- et aux ancêtres d'exaucer leurs voeux... »

Du fait de cette orientation fatidique, estiment des architectes, c'est au Proche-Orient qu'il convient de reporter l'origine de ces rites et de « ceux qui les ont enseignés aux populations malgaches ». C'est pourquoi, bon nombre de maisons, surtout des habitations principales d'Antananarivo, sont orientées Nord-Sud, à, commencer par Manjakamiadana. Le Palais de la Reine répond aux exigences traditionnelles, précisent des historiens dans les années 1950. En se servant des procédés indigènes et en les améliorant, tant pour la charpente colossale que pour les parois, « Jean Laborde a fixé, en 1839, l'usage du bois ».

Car le chef-d'oeuvre parachève la série des constructions faites avec ce matériau. Plus tard, dès le retour des Européens en 1862, la brique et la pierre vont, effectivement, se substituer au bois dans la construction. Notamment à partir de 1869, quand sont abrogées les défenses faites à Antananarivo par Ranavalona Ire de construire en matériaux plus durables que le bois. « La brique seule, d'une fabrication facile et d'une mise en oeuvre peu coûteuse, a donné lieu à des combinaisons de toutes sortes », assure A. Jully.

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