Au Mali, la visite du colonel Modibo Koné à Kidal dimanche n'est pas restée sans suite. Le chef de la Sécurité d'État, les services maliens de renseignements, s'est rendu dans le fief des ex-rebelles indépendantistes pour une visite éclair sur laquelle peu de détails ont filtré. Elle s'inscrit dans une démarche de relance des contacts entre les autorités maliennes de transition et les groupes armés du Nord, signataires de l'accord de paix. Par la suite, des combattants de la CMA détenus depuis plusieurs mois viennent d'être libérés par Bamako.
Les dix membres de la CMA arrêtés à Chimam, près de Tidermène dans la région de Ménaka fin avril par l'armée malienne et ses supplétifs russes de Wagner étaient accusés par Bamako d'être des « terroristes ». Les ex-rebelles indépendantistes dénonçaient une détention illégale de leurs combattants.
Libérés mardi soir
Selon plusieurs sources sécuritaires maliennes, ils ont été libérés mardi soir, conformément à l'engagement pris à Kidal dimanche par le colonel Modibo Koné, directeur de la Sécurité d'État. Une libération que les cadres de la CMA, joints par RFI, n'ont pas souhaité commenter.
L'objectif est d'obtenir le retour des groupes armés signataires dans les instances de suivi de l'accord de paix de 2015, qu'ils ont quitté en décembre 2022 pour protester contre le manque d'implication, selon eux, des autorités de transition dans l'application de l'accord.
Après des mois de tension et de provocations qui ont laissé craindre une reprise des hostilités, une dynamique nouvelle semble donc enclenchée, mais les groupes signataires attendent encore d'autres « mesures de confiance ».
Mesures de confiance
Pas de détails précis, mais leurs revendications, depuis des mois, sont connues. Il y a le départ du colonel Ismaël Wagué du ministère de la Réconciliation nationale, département en charge de l'accord de paix et des relations entre le gouvernement et les groupes signataires. Ce pilier de la junte à l'origine du double coup d'État au Mali semble indéboulonnable, mais le fait que ce soit le colonel Koné, de la Sécurité d'État, qui se soit rendu à Kidal dimanche et non le Colonel Wagué est peut-être déjà une forme de réponse.
Les groupes signataires veulent aussi des engagements sur le respect de l'accord de paix dans le cadre du changement de Constitution, ou encore une modification du discours officiel malien. Bamako parle par exemple régulièrement d'une application « intelligente » de l'accord, faisant redouter aux groupes signataires un tri partial dans les dispositions du texte.
Séquence propice à l'apaisement
Les ex-rebelles indépendantistes demandent encore la fin des manoeuvres jugées « provocatrices » de l'armée malienne, telle que le survol de Kidal, en avril dernier, par un avion militaire. C'était à la veille du 11e anniversaire de la proclamation d'indépendance de l'Azawad, dont les célébrations annuelles, même après la signature de l'accord de paix, sont elles-mêmes jugées provocatrices par Bamako.
Les autorités maliennes de transition seront-elles prêtes à satisfaire ces attentes ? Le départ -- et le remplacement - de la Minusma, dans le Nord, fera-t-il également l'objet de points d'entente entre les groupes signataires et Bamako ? Dimanche, ce sont essentiellement des cadres de la CMA que le colonel Modibo Koné a rencontré à Kidal, s'invitant dans leur fief à l'occasion de la réunion du bureau exécutif du mouvement. Les autres groupes signataires de l'accord de paix seront-ils prêts à suivre ? Si l'avenir reste ponctué de points d'interrogation, c'est en tout cas une séquence propice à l'apaisement qui vient de s'ouvrir.
Sollicité par RFI, le ministère malien de la Réconciliation nationale n'a pas donné suite.