"Prévenir les conflits liés au discours de haine en période électorale" était le noeud de la conférence-débat tenue le mardi 18 juillet 2023, au Centre Culturel Boboto, dans la commune de la Gombe. Cette rencontre organisée par le Groupe de média "Next Corp", en collaboration avec Actualité.cd, a attiré l'attention des autorités congolaises sur le respect et l'application de la loi sur le discours de haine en République Démocratique du Congo. Une conférence qui a connu la participation des membres de la société civile, des politiques, des étudiants ainsi que des journalistes.
Selon les organisateurs, l'ONU défini le discours de haine "comme tout type de communication, qu'il s'agisse d'expression orale ou écrite ou comportement, constituant une atteinte, ou utilisant un langage péjoratif ou discriminatoire à l'égard d'une personne ou d'un groupe en raison de leur identité. En d'autres termes, l'appartenance tribale, religieux, ethnique, nationalité, race,..."
Cette rencontre a été marquée par l'intervention de deux professeurs, à savoir Bobo Kitumu Mayimona, Professeur et expert en communication numérique et Jean-Claude Matumweni Makwala, Professeur ordinaire.
Le premier intervenant qui a abordé le sous-thème "discours de haine sur les plateformes numériques", a présenté quelques résultats des études menées dans la sphère numérique en République Démocratique du Congo.
A l'en croire, la plupart de discours haineux dans les réseaux sociaux sont à caractère politique. "C'est la politique parce que nous sommes dans un contexte où les discussions politiques sont au centre de nos débats", a affirmé le professeur Bobo Kitumu. D'après lui, le discours communautaire et autres prennent trop peu de temps. Il a laissé entendre que Twitter, TiK-ToK et Facebook sont les réseaux sociaux les plus utilisés pour faire passer des messages qui renvoient à l'incitation au meurtre, à la stigmatisation, à la déshumanisation... des messages à caractère notamment Xénophobe, injurieux, Tribal, Misogyne... Et selon les résultats des études, les principales victimes sont plus particulièrement les leaders politiques.
Le professeur Bobo Kitumu a, par ailleurs, expliqué le danger de discours haineux. Pour lui, à travers ce genre de discours, il y a une forme de construction notamment, d'opinion, de stéréotype qui, petit à petit, crée des intentions et ce sont des intentions très souvent malveillantes qui causent des affrontements entre tribus ou communauté.
Education médiatique exigée !
C'est dans ce contexte qu'il a proposé en premier lieu une éducation de base dans le domaine des médias numériques. Mais, également, des sanctions tout d'abord au niveau de la plateforme, tantôt signaler à la plateforme afin d'obtenir la suppression du poste ou du compte et la sanction judiciaire, donc porter plainte. A l'en croire, "plus il y aura des plaintes, plus l'autorité se fera sentir, moins les gens se donneront à des discours libres qui tendent à stigmatiser ou à déranger les autres".
Du côté du professeur Jean-Claude Matumweni Makwala, on a essayé de montrer comment un discours peut amener à la violence envers un individu ou un groupe d'individu.
Il a ainsi laissé entendre que "Les discours de haine sont des discours qui manipulent notre mental, notre esprit pour inculquer en nous une certaine articulation de valeur par rapport aux autres ou aux communautés".
Pour lui, il est important d'essayer d'y faire face à travers la législation. "C'est très important, il faut que la loi permette de bien démontrer quand il s'agit effectivement d'un discours de haine, et que des sanctions soient pris en conséquence, sinon ce discours va continuer à proliférer".
A l'en croire, "Ce discours de haine peut être suivi d'action concrète, et même si ce discours de haine ne produit pas d'effet tout de suite, il faut toujours le contrecarrer". Car d'après lui," il va demeurer dans l'esprit des gens et se cristalliser dans ce qu'on appelle les stéréotypes, les préjugés pour ainsi resurgir à un moment donné suite à un certain contexte".
"Il suffit que le contexte s'y prête pour que ces stéréotypes ou préjugés poussent les gens à agir d'une certaine manière", a-t-il renchéri.
Donc, Jean-Claude Matumweni pense que si on ne réagit pas, cela devient une sorte d'idéologie dormante qui apparemment ne produit pas d'effets, mais malheureusement un jour, il peut se réveiller et avoir pour conséquence des dégâts assez importants.
Il a par contre laissé entendre qu'en ce qui concerne le discours de la haine, une loi, voire les textes légaux existent déjà pour règlementer.
Pour lui, la loi doit maintenant s'accompagner des sanctions. "Il faut donc arriver à sanctionner les auteurs de ce discours de haine pour que leur cas serve d'exemple et qu'à la longue les autres ne soient pas tentés de faire la même chose".