La réforme du Code de procédure pénale dépasse le simple fait de création d'un parquet financier. C'est un ensemble d'organes qui seront instaurés pour assurer la répression des crimes financiers. Le Garde des sceaux, ministre de la Justice Ismaïla Madior Fall annonce la création d'un pôle financier judiciaire (Pfj). Il a défendu le projet de la réforme loi n°11/2023 modifiant la loi n°65-61 du 21 juillet 1965 portant Code de Procédure pénale, ce jeudi 20 juillet.
Le changement apporté dans le Code de procédure pénale va au-delà de la création d'un simple parquet financier. « Aujourd'hui, il y'a un dispositif qu'on appelle Pôle financier judiciaire ( Pfj). Dans celui-ci, on a un parquet financier, un collège de juges d'instructions financiers, une chambre de jugement financière, une chambre d'accusation financière, une chambre d'appel financière et des assistants de justice spécialisés. Le parquet financier n'en est qu'un aspect. Il est important de comprendre que dans ce dispositif, c'est les magistrats du parquet financier et les juges d'instruction qui exercent leur fonction à l'exclusion de tout autre emploi », explique le Garde des sceaux, ministre de la justice de la Justice. La réforme de la loi n°11/2023 modifiant la loi n°65-61 du 21 juillet 1965 portant Code de procédure pénale augmente le champ d'actions de la Cour de répression de l'enrichissement illicite qui était trop restreint, selon le ministre de la Justice. « Il y'a deux types de compétences.
Pour certaines, le pôle va l'être au même titre que des juridictions de droit commun. Nous avons la corruption et les pratiques assimilées, les détournements liés aux deniers publics, les infractions liées à la fausse monnaie, le blanchissement de capitaux, les infractions fiscales, le trafic de stupéfiants entre autres.... Il y'a des infractions où seul le pôle financier peut être compétent. Il s'agit de la corruption, la fraude et le blanchissement des capitaux ; les infractions liées aux marchés publics, la piraterie maritime, le financement du terrorisme, l'enrichissement illicite et le trafic de migrants ». Réformer la juridiction de répression des délits financiers est selon toujours Ismaila Madior Fall, « un progrès juridictionnel, démocratique, de l'Etat de droit ».
Le dispositif de la Crei comportant bien d'insuffisances qui mériteraient une réforme juridictionnelle. « Le mécanisme qui a été instauré a eu des difficultés dans le fonctionnement. La délinquance économique et financière est subtile et complexe. Elle nécessite des moyens, des techniques d'enquêtes et une ressource humaine qui n'existaient pas dans les dispositifs de la Crei ». Mieux, ajoute-t-il, « il y'avait la volonté politique et l'intention, mais ça n'a pas beaucoup marché. On s'est rendu compte que la lutte contre l'enrichissement illicite n'a pas été facile. Les enquêtes butaient sur de grandes difficultés. Des difficultés de fonctionnement ont expliqué le ralentissement de la Cour. C'est ce qui explique que beaucoup ont critiqué la Crei dans son fonctionnement. On sait par exemple que l'absence de double degré de juridiction est une difficulté. Il est important de moderniser la Crei et l'adapter aux nouveaux principes d'un procès pénal. L'inversion de la charge de la preuve a aussi posé problème. Il y'a eu des critiques justes parfois, moins justifiées souvent à l'endroit du dispositif qui a été instauré par la Crei ».
Le texte que les députés ont entériné hier, jeudi 20 juillet, n'est pas une chose nouvelle. « Il y'a eu des propositions qui ont émergé de la société civile, du gouvernement du Sénégal. Depuis au moins 2016, le gouvernement réfléchit sur la réforme de Crei. C'est ainsi que le projet de loi proposé à l'Assemblée était déjà prêt depuis 2017 et a été adopté en Conseil des ministres. C'est pour des problèmes de communication qu'on a retardé le processus d'adoption de ce texte. Cela a été aussi discuté au dialogue national. Il ne faut pas dire que le dialogue n'a pas parlé de la réforme. Il a été question de la Crei. Il a été question d'imaginer les voies de réhabilitation de ceux qui ont fait l'objet de condamnation ».
En réformant le Code de procédure pénale, le Sénégal n'a pas cherché à se débarrasser d'une juridiction inopportune. « Il faut comprendre la loi non pas comme un recul, un reniement ou d'une honte d'une institution dont on ne veut plus. Il faut l'inscrire dans le cadre du progrès. Il est question d'évaluer et d'améliorer dans le sens de modernisation d'un dispositif qui a été éprouvé mais qui a connu des difficultés et des insuffisances. Le délit d'enrichissement illicite est toujours là ».