Afrique de l'Est: Blanchiment de capitaux - Madagascar soumis à une dernière évaluation sur terrain

Une délégation du Groupe anti-blanchiment de capitaux de l'Afrique australe et orientale boucle sa mission à Madagascar. Une dernière évaluation sur terrain avant le verdict du Groupe d'action financière ou GAFI.

Un marquage serré. C'est ce qu'applique à Madagascar, le Groupe anti-blanchiment de capitaux de l'Afrique australe et orientale ou ESAAMLG. Une entité qui est le prolongement au niveau régional du Groupe d'action financière (GAFI). Il s'agit du gendarme international pour l'application des normes de lutte contre le blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme. Cette semaine, une "mission de haut niveau" de l'ESAAMLG était à Madagascar cette semaine "pour rencontrer les autorités malgaches".

Les quatre missionnaires ont bouclé leur séjour dans la Grande île, hier. L'information est passée inaperçue au milieu du tumulte politique et des perturbations du Baccalauréat. Toutefois, elle revêt un enjeu économique majeur pour le pays. Il s'agit de la dernière évaluation sur terrain avant la réunion du GAFI, en octobre. Sauf changement, le GAFI rendra sa décision concernant Madagascar lors de cette session d'octobre.

Depuis l'année 2017, le basculement dans la liste grise de GAFI est une épée de Damoclès qui plane sur la Grande île. La raison est sa performance, jugée poussive, dans la conformité aux normes internationales de lutte contre le blanchiment de capitaux et du financement du terrorisme. "Ce statut a des conséquences socio-économiques et politiques terribles.

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En sortir a des coûts financiers considérables", préviennent les documents y afférents. La raison d'être du GAFI est d'accompagner les Etats à se conformer aux normes anti-blanchiment de capitaux et financement du terrorisme, "afin de protéger le système financier mondial contre les méfaits des criminels et de l'argent sale".

À éviter à tout prix

Aussi, un pays inscrit ou qui bascule dans la liste grise est considéré comme "non coopérative et met en péril le système financier international. Un pays à risque". Concrètement, les transactions internationales sortant ou allant vers un pays à risque sont soumises à différentes contraintes. Figurer dans la liste grise de GAFI peut aussi être un frein pour les investissements internationaux, même pour les investissements publics.

"Basculer dans la liste grise est à éviter à tout prix pour Madagascar", s'accordent les sources. Un leitmotiv sur lequel les acteurs nationaux dans la lutte contre la corruption et les délits financiers, dont le blanchiment de capitaux, ont basé leur posture face aux missionnaires de l'ESAAMLG, cette semaine. Les membres du Système anti-corruption, le Parlement, le Comité national de coordination et d'orientation de la lutte contre le blanchiment de capitaux ont été parmi les acteurs rencontrés par la mission de haut niveau de l'ESAAMLG.

Du côté du gouvernement, les missionnaires se sont entretenus avec le Premier ministre, la ministre de l'économie et des finances et la ministre de la Justice. La partie n'est, cependant, pas encore gagnée pour la Grande île. Madagascar est, en effet, dans la catégorie des pays en "suivi renforcé", par l'ESAAMLG, depuis 2018. Autrement dit, de sérieuses défaillances stratégiques et de conformité aux normes GAFI sont constatées dans la Grande île.

L'ESAAMLG lui a même adressé une "lettre d'interpellation", reçue en août 2022. La missive est pour signifier que le progrès pour se conformer aux normes de lutte contre le blanchiment de capitaux et financement du terrorisme "est long ou insatisfaisant". Selon les documents y afférents, "un progrès insatisfaisant après la lettre (...) amène l'ESAAMLG à envoyer une mission de niveau pour rencontrer les autorités du pays concerné".

La visite des quatre missionnaires, cette semaine, n'est alors pas bon signe. Les termes de référence de cette mission indiquent que les objectifs sont, "d'évaluer l'engagement politique des dirigeants et la coordination, évaluer la situation du pays et identifier les blocages afin de recommander les actions à entreprendre pour accélérer le processus de conformité et éviter ainsi la liste grise". Les acteurs nationaux ont ainsi voulu profiter de la mission de haut niveau de l'ESAAMLG pour renverser la tendance et gagner des points en vue de l'évaluation de GAFI.

L'idée est donc "d'en faire une opportunité pour démontrer la volonté et l'engagement concret du gouvernement et une coordination efficace de la lutte". La loi sur la lutte contre la corruption, ou encore l'ordonnance sur le recouvrement des avoirs illicites sont parmi les arguments mis en avant. La mise en place de l'Agence de recouvrement des avoirs illicites (ARAI), a aussi été soulignée par les acteurs nationaux durant leur rencontre avec les missionnaires de l'ESAAMLG.

Des dispositions et dispositifs estimés insuffisants par cette instance régionale et plus largement par le GAFI, toutefois, à s'en tenir aux explications précitées. Aussi, Madagascar aurait assuré l'adoption d'un projet de loi portant amendement de certaines dispositions de la loi contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme pour la 2e session parlementaire. D'ici là, des décrets d'application des dispositions de la loi précitée, qui ne feront pas l'objet d'une retouche devraient être adoptés en Conseil des ministres incessamment.

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