C'est avec une grande tristesse que les Soudanais ont appris, ces derniers jours, le décès du célèbre violoniste et compositeur Khaled Essanhouri. Il est mort chez lui, à Omdourman, « de faim et de soif », selon sa famille. Immobilisé dans le quartier de la radio-télévision soudanaise, un lieu stratégique où ont lieu des combats acharnés, ce musicien, handicapé depuis deux ans, n'a pas pu sortir de chez lui.

Khaled Essanhouri fait partie de ces gens qui meurent en silence et dont la voix est devenue inaudible sous les bruits du fracas de la guerre. Sa disparition tragique incarne la face cachée de la guerre au Soudan.

Il n'est pas la première et ne sera pas la dernière victime silencieuse de cette guerre. De nombreux civils se sont éteints ainsi, chez eux, par manque de médicaments, d'eau ou de nourriture, dans l'indifférence totale des généraux qui se livrent à une guerre sans merci pour le pouvoir et en dépit des appels à cesser les combats.

Seules quatre personnes ont pu assister à son enterrement dont son frère. Faute de pouvoir transporter la dépouille au cimetière du quartier, Khaled Essanhouri a été enterré devant chez lui. Selon un proche du musicien, il a été impossible de le transporter à l'hôpital car aucune ambulance ne s'y est déplacée.

De très nombreux Soudanais vivent aujourd'hui à Khartoum dans la crainte de subir le même sort, surtout avec la fermeture des magasins et des supermarchés et la rareté des denrées alimentaires.

Les fonctionnaires n'ont pas touché leurs salaires, depuis plus de trois mois et ils sont pris dans les tourments de la guerre. Ils se trouvent dans une situation catastrophique. « Ceux que la guerre ne va pas tuer mourront de faim », estime un professeur d'école.