Madagascar: De la dignité dans les universités

« La perspective d'un avenir prometteur pour les jeunes est grandement compromise par l'État actuel de l'enseignement à Madagascar » ; une affirmation qui a engendré une multitude de réactions.

Indignation pour certains, questionnement ou applaudissement pour d'autres. Sans entrer dans le débat sur la responsabilité de tout un chacun sur la situation actuelle, nous tenons à mettre sur la table une question urgente : « le droit de faire pipi ». Oui, vous avez bien lu et il ne s'agit aucunement d'une blague salace. L'université d'Antananarivo fait face à un problème grave d'insalubrité et d'insuffisance de toilettes, qui engendre des conséquences néfastes sur la santé des étudiantes et des professeurs.

La question est simple : comment peut-on étudier en toute quiétude de l'âme et de l'esprit comme celle du corps, comment peut-on dispenser un enseignement de qualité quand la chose la plus basique comme uriner devient un problème central et vital ? Malgré le fait que l'utilisation des toilettes soit payante au sein de l'université d'Antananarivo, à raison d'au moins cent ariary, les infrastructures sont dans un état indescriptible et indigne.

Telle une équilibriste sur un fil dentaire au-dessus d'un volcan, celle qui essaie tant bien que mal de ne pas se faire pipi dessus dans le noir total retient son souffle pour ne pas s'évanouir ou d'être asphyxiée par les odeurs nauséabondes. Si cette description vous semble être rocambolesque, nous vous invitons à tenter l'expérience. Pour cent ariary pour la « petite commission », et pour deux cents ariary pour ceux avide de sensations fortes, vous allez vivre un moment...inoubliable.

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Cette situation précaire engendre divers problèmes de santé qui affectent directement la vie quotidienne des membres de la communauté universitaire. Bon nombre de femmes universitaires sont incontinentes car elles se retiennent tout le temps et durant des années. Ces problèmes d'incontinence urinaire, qui non seulement affectent la santé physique des individus, mais peuvent également avoir un impact psychologique considérable en termes d'estime de soi et de confiance en soi. En été, elles s'abstiennent de boire de l'eau malgré la chaleur.

En hiver, c'est encore plus terrible et le pipi dans les sous-bois en période cyclonique est juste... (il faudrait inventer le mot pour décrire cette situation). De plus, le manque d'hygiène et d'assainissement adéquats dans les toilettes de l'université expose les utilisateurs à un risque accru de contracter diverses maladies comme les infections gastro-intestinales et les infections cutanées. En l'absence de toilettes et équipements dignes de ce nom pour répondre aux besoins spécifiques des femmes pendant leurs périodes menstruelles, celles-ci rencontrent des difficultés pour se changer et se nettoyer de manière hygiénique. Déjà pour faire pipi, c'est toute une histoire.

Pour changer de serviettes hygiéniques, c'est à chaque fois le combat du siècle. Pouvoir se laver correctement quand on se change relève du miracle, mon ami. Cette situation peut entraîner des problèmes de santé supplémentaires comme les infections vaginales et les irritations cutanées, ainsi que des sentiments d'embarras et de stigmatisation chez les étudiantes.

Embarras ? Il y a de quoi ! Car pour se changer, il faut encore aller dans les sous-bois ou se cacher derrière les bâtiments. Si non, on choisit de patauger toute la journée dans son sang, les odeurs avec tout ce que cela implique. Il est impératif que des mesures soient prises pour remédier à cette situation préoccupante et révoltante. L'université d'Antananarivo doit investir dans la construction et l'entretien de toilettes adéquates pour répondre aux besoins de l'ensemble de sa communauté universitaire dont les besoins spécifiques des femmes. Promouvoir des droits des femmes peut et doit se faire par des petites actions, simples et efficaces.

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