Ile Maurice: Affaire Boskalis - Condamné à 15 mois de prison - Le gel de la sentence de Siddick Chady annulé

Nouveau revers pour l'ex-ministre condamné dans l'affaire Boskalis. Alors que la cheffe juge Rehana Mungly-Gulbul lui avait accordé un «stay of execution» temporaire de sa condamnation jusqu'au 7 août - le temps qu'il complète ses démarches pour obtenir la grâce présidentielle auprès de la Commission de pourvoi en grâce -, elle est revenue sur sa décision, hier, après une motion de l'«Acting Senior Assistant Director of Public Prosecutions», Jean Michel Ah Sen. Rehana Mungly-Gulbul a ainsi annulé l'ordre de gel de la sentence de 15 mois. Face à ce développement, l'ancien ministre pourrait être incarcéré à tout moment. Il attend donc un d'un «warrant of commitment» de la cour intermédiaire.

«Je suis un humain avant tout...»

Siddick Chady, qui s'est confié à l'express hier après-midi, concède que c'est une situation très pénible que vivent sa famille et lui. «I am psychologically shaken. Outre le fait d'être un politicien, je suis un humain avant tout. J'ai 19 petits-enfants. Mon épouse, mes enfants et toute ma famille sont grandement affectés», affirme Siddick Chady. Il souligne que ses patients, admis dans la maison de retraite qu'il gère, n'ont cessé de lui témoigner leur soutien depuis qu'ils ont appris cette nouvelle. «Je suis leur médecin, mais je suis aussi très proche de mes patients. Je suis triste pour eux. Je peux dire que les Mauriciens, peu importe leur communauté, prient pour moi et me donnent du courage dans ces moments durs.»

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L'ancien ministre maintient qu'il est une victime de la politique. «Cette affaire roule depuis 2012 et il y a eu beaucoup d'injustices et d'anomalies. Imaginez ce que ma famille et moi avons vécu pendant toutes ces années. Je ne souhaite cela à personne. En politique, il faut toujours être méfiant.» Sachant bien que c'est peut-être sa dernière nuit auprès de sa famille pour un bon bout de temps, Siddick Chady dit espérer que la Commission de pourvoi en grâce tiendra compte de sa situation et rendra un verdict positif.

Pour rappel, l'affaire Boskalis concerne l'allocation d'un contrat à la firme néerlandaise Boskalis International, en 2006, pour des travaux de dragage dans le port estimés à Rs 439 millions. Siddick Chady a été jugé coupable le 13 novembre 2019. Lui qui pensait avoir un répit en attendant que la Commission de pourvoi en grâce tranche sur sa demande, devra finalement commencer à purger sa peine. En effet, alors que l'affaire devait être appelée devant la cheffe juge le 7 août, elle a été appelée hier, à la demande du bureau du Directeur des poursuites publiques (DPP). Me Jean Michel Ah Sen aurait fait état de certains manquements dans la demande de Siddick Chady du gel de sa condamnation, en attendant la décision de la Commission de pourvoi en grâce. D'où l'objection soulevée. La cheffe juge a ainsi référé son dossier à la cour intermédiaire pour la marche à suivre.

L'ancien Chairman de la Mauritius Ports Authority (MPA) souhaitait faire directement appel de sa condamnation au Privy Council après avoir essuyé un revers en Cour suprême. Le 28 décembre 2022, cette demande d'appel au Privy Council avait été rejetée par les juges Iqbal Maghooa et Karuna Devi Gunesh-Balaghee, siégeant en Cour suprême. Dans un jugement de 12 pages, les juges avaient conclu que les points soulevés par l'ancien Chairman de la MPA ne relèvent pas d'un intérêt public suffisamment grand pour solliciter l'intervention des Law Lords. Siddick Chady avait ainsi essuyé un revers et la Cour suprême avait retenu l'appel interjeté par le bureau du DPP pour contester la sentence qui lui avait été infligée. Les juges avaient trouvé que la sentence de neuf mois n'était pas assez sévère et l'avaient condamné à 15 mois de prison.

Portrait du médecin et ex-politicien

Le Dr Siddick Chady a été un ami de longue date de Navin Ramgoolam, du temps où ils étudiaient la médecine à Dublin. Il ouvre sa clinique à Belle-Rose et se joint au Parti travailliste (PTr) à l'époque où Navin Ramgoolam rentre au pays après ses études. Il est candidat pour la première fois aux législatives de 1991 et fait partie de l'équipe gagnante PTr-MMM en décembre 1995, lors du deuxième 60-0 de l'histoire, comme colistier de Paul Bérenger et Jayen Cuttaree, à Stanley-Rose Hill.

Ministre des Travaux, puis de l'Environnement après la cassure rouge-mauve en 1997, le Dr Chady avait brigué les suffrages au no 19, le 15 septembre 1991, sous la bannière PTr-PMSD. Classé quatrième, il avait fait son baptême de feu au Parlement comme Best Loser. Le 20 décembre 1995, il se classe deuxième, entre Bérenger et Cuttaree. Nommé ministre, il aura à son actif de nombreuses réalisations d'infrastructures publiques, dont l'autopont à Bell-Village. Aux élections générales du 11 septembre 2000, il est élu en deuxième position au no 3. Le 3 juillet 2005, il aura moins de chance, même si son parti est victorieux.

Cela marquera la fin de sa carrière politique et le début de ses démêlés avec la justice. Au terme de ces élections, Siddick Chady est nommé Chairman de la MPA. Sa passage sera entachée par une grave accusation de corruption qui finira par sa condamnation en justice. À la suite du contrat de dragage du port accordé à la firme néerlandaise Boskalis, il fait face à un procès en cour intermédiaire, qui le mènera à sa situation présente. Siddick Chady a aussi eu d'autres démêlés avec la justice concernant la saisie de ses biens, qu'il a contestée pendant plus de 15 ans. Récemment, la Cour suprême a ordonné que ses biens soient vendus à la barre. Il a aussi été le directeur de la défunte compagnie Cinemax Ltd.

Me Said Toorbuth : «un choc psychologique immense»

L'avocat de Siddick Chady dit ne pas comprendre pourquoi le bureau du DPP, qui n'avait pas objecté à la demande à l'appel de l'affaire lundi devant la cheffe juge, l'a fait plus tard. «Lundi, on a fait une demande pour un 'stay of execution' de la sentence en attendant une décision de la Commission de pourvoi en grâce. Le DPP n'a pas objecté. Ce n'est qu'après que Me Ah Sen a fait part de leur objection. Je ne comprends pas pourquoi», dit l'avocat. Me Toorbuth souligne qu'ils sont en attente d'un 'warrant of commitment' de la cour intermédiaire. «Mon client a toujours été un 'law-abiding citizen' et j'ai déjà informé la cour qu'il est disposé à se rendre 'anytime'. Nous attendons», affirme l'avocat. Mais il ajoute : «C'est un choc psychologique immense, mais nous ne pouvons faire autrement. La Commission de pourvoi en grâce prendra le temps qu'il lui faudra pour examiner son dossier.»

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