Madagascar: Tahina Razafindramalo - Lancement de la future Banque Postale en septembre 2023

interview

C'est un secteur qui est en pleine expansion dans le pays avec le développement de l'Internet. L'intégration du numérique au coeur des réformes initiées par le gouvernement ne passe pas sans accroc. Tahina Razafindramalo, ministre en charge de la Transformation digitale et du Développement numérique, partage avec nous les projets de son département. Entretien exclusif.

Midi Madagasikara : Peut-on faire l'état des lieux de la digitalisation dans le pays ?

Tahina Razafindramalo : C'est un chantier très large et tout le monde parle de digitalisation, alors cela ne nous facilite pas la tâche. Je préfère parler de digitalisation comme une nouvelle façon de penser et une nouvelle façon de travailler.

Pour le cas de Madagascar, il y a des programmes qui ont été réalisés dans le cadre de la transformation digitale de l'Etat. Le président de la République, Andry Rajoelina, a mis la transformation digitale au sein de son programme présidentiel. Actuellement, les projets que le grand public voit, concerne la distribution des bourses.

C'est un beau projet même si c'est difficile. Parce qu'il implique un certain nombre d'institutions, notamment le ministère de l'Enseignement supérieur, le ministère de l'Economie et des Finances, la Banque centrale, et les six universités. C'est un bel exemple de ce que peut apporter le digital. Par le biais de cette transformation vers le digital au niveau du paiement des bourses, l'Etat a pu économiser plusieurs dizaines de milliards d'ariary. Ce qui est aussi important pour un Etat comme Madagascar, c'est de faire attention aux dépenses. Ce projet permet d'améliorer la traçabilité au niveau des paiements et des démarches administratives.

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Il faut souligner que le secteur numérique de Madagascar est caractérisé par une forte volonté politique de l'État malgache dans le développement numérique et la transformation digitale qui nous permet d'afficher sereinement nos ambitions. L'économie numérique est donc en pleine expansion à Madagascar. Actuellement, le numérique joue un rôle important dans la création de valeur et notamment, dans la modernisation de l'Etat. En terme de création d'emplois, on parle de plus de 30 000 emplois directs et on identifie un potentiel de bassin d'emplois de plus de 125 000 emplois directs, qui représentent 5% des emplois formels au niveau national et plus de 3% de croissance de notre PIB sur les 5 prochaines années.

M-M : Pourtant, la forte distorsion en termes de couverture entre le milieu rural et les zones urbaines n'handicape-t-elle pas ce développement du numérique au niveau national ?

T-R : Les télécoms, les BPO (Business Process Outsourcing) ou l'externalisation des processus d'affaires et les entreprises de services numériques sont les plus grands pourvoyeurs d'emplois au sein du secteur. La population malgache, très jeune (65% ont moins de 25 ans), fait de Madagascar une captive intéressante en termes de développement numérique.

Le secteur numérique à Madagascar est également marqué par une adhésion forte des partenaires nationaux et internationaux dans la mise en oeuvre de programmes importants et cela démontre la confiance des bailleurs en la personne du président de la République Andry Rajoelina ainsi que la priorité du secteur comme le projet de Modernisation des réseaux de télécommunications de l'administration malagasy (MRTAM) et le Projet de gouvernance digitale et de gestion de l'identité malagasy (PRODIGY).

Le déploiement des HOTSPOT (wifi gratuit), des Smart Villages et des TICBUS (véhicules mobiles équipés de connexion Internet) constitue les bases de notre politique d'inclusion numérique. En termes de télécommunications, Madagascar fait face à un faible taux de couverture réseau 4G, 30% au niveau national.

Les zones rurales, où vivent 80% de la population totale, souffrent encore de cette fracture.Le marché est dominé par le mobile avec un taux de pénétration à 60% et par une faible pénétration de l'internet à 25%.

Malgré ces manques d'infrastructures, le pays possède une connectivité internationale à très haut débit via trois câbles sous-marins tels que LION, EASSY, et METISS ; et le 4ème câble 2AFRICA qui arrive cette année. L'arrivée de la 5G et des fibres optiques internationales, annonce la possibilité d'une société encore mieux connectée et d'une industrie numérique capable à la fois de répondre aux demandes extérieures, en forte augmentation, et de répondre aux nouveaux besoins locaux.

M-M : Et dans l'avenir proche, que comptez-vous entreprendre, en tant que leader du département en charge du ministère du Développement numérique et de la Transformation digitale, pour que le numérique puisse réellement se développer à Madagascar ?

T-R : Le ministère a développé un plan stratégique du numérique basé sur quatre axes de développement et qui constituent des orientations stratégiques multidimensionnelles. Le premier axe s'attèle à la refonte du cadre juridiquerégissant le secteur, visant notamment à favoriser la libre-concurrence sur le marché et la fourniture de services appropriés à des prix abordables et l'intégration des principales innovations apportées en matière de TIC. On peut citer parmi ces textes, le décret 2023-397 fixant les règles et modalités d'interconnexion et d'accès aux réseaux de télécommunications, ainsi que le texte modifiant et complétant certaines disposition du décret n°2014-1650 du 21 octobre 2014 définissant les procédures et mesures à appliquer par l'Agence de Régulation pour la réglementation du secteur des télécommunications, du Décret n°2014-1651 du 21 octobre 2014 portant réglementation des réseaux et services de télécommunication et Décret n°2104-1652 du 21 octobre 2014 portant cadrage de la mutualisation dans le secteur des Télécommunications.

Sans oublier les institutions qui sont en train d'être mises en place pour instaurer une économie numérique performante, telle que la CMIL (Commission Malagasy de l'Informatique et des Libertés) qui est l'entité chargée d'assurer la protection des données personnelles, des libertés dans le cadre des services numériques et les lois associés et la CIRT ( Computer Incident Response Team) qui est l'entité chargée de répondre opérationnellement aux attaques cybersécurité dont pourraient être victimes les Administrations.

Le deuxième axe se réfère au secteur des télécommunications, une politique de développement des infrastructures de télécommunications en milieu ruralainsi que le projet de Connectivité digitale et énergétique pour un Madagascar Inclusif (DECIM) est en cours avec la Banque mondiale, visant à réduire la fracture numérique notamment dans les zones enclavées.

Afin d'instaurer une souveraineté et sécurité numérique de l'État, l'opérationnalisation du Data Center national est en phase de finalisation. Et pour exécuter et renforcer les programmes liés à la transformation digitale, l'Unité de gouvernance digitale (UGD)a été adoptée, à savoir la digitalisation duprocessus d'identification des Malagasy et la réforme de gestion d'État Civil (PRODIGY).

M-M : En termes de développement des compétences, qu'est-ce que vous planifiez ?

T-R : C'est l'objet du troisième axe du plan stratégique qui consiste à focaliser les efforts sur le développement du capital humain qui s'avère incontournable : en termes de développement de compétences, de dimensionnement et de motivation. Dans le but de répondre aux besoins de l'économie numérique, des initiatives ont été prises par le MNDPT pour assurer la disponibilité en qualité et en quantité des compétences numériques.

On peut citer parmi les programmes, le partenariat avec le GPRC ( Groupement des professionnels de la Relation Client) et les ESN (Entreprise de Services du Numérique) sur la mise en place d'un dispositif structurel de formation aux métiers du développement informatique, de la relation client et du business process outsourcing ; l'initiation à l'étude d'installation d'un centre de formation de référence doté d'une structure alignée aux besoins de l'écosystème économique et numérique (L'Institut National de la Digitalisation et des Postes en formant plus de 3 000 étudiants supplémentaires par an) ; l'identification d'un référentiel de formation adéquat aux besoins actuels avec IFC dans le projet Digital Skills permettant développer les compétences numériques avancées à Madagascar, à savoir le blockchain, la cybersécurité, Data Science.

Ces différents projets permettront, à termes, d'identifier, de former et de lancer la carrière des futurs talents numériques qui sont identifiés au sein d'un large bassin de population diversifiée. Enfin, le quatrième axe du plan stratégique du numérique se propose de développer une inclusion numérique et financière performante et adaptée pour tous à l'image de l'organisation du déploiement de la monétique et de la carte bancaire.

Des projets sont déployés servant de supports matériels, structurels et organisationnels pour aider les citoyens à bénéficier des services administratifs et financiers ainsi que pour réduire la fracture numérique dans le pays.

Pour cela, des infrastructures pour vulgariser le numérique ont été mis en place comme les Hotspot wifi et les Smart City dans les zones urbaines, les Smart Village et les bus connectés ou "Ticbus" pour les zones rurales ; une politique de démocratisation des e-services en se rapprochant davantage des bénéficiaires finaux à savoir les citoyens qui rappelons-le peuvent faire preuve de réticence envers l'administration et les services publics mais aussi par ignorance des services qui peuvent servir au quotidien, à travers les Guichets Unique ; la création de la Banque Postale avec les 250 agences de la Paositra Malagasy qui contribuent à l'atteinte de l'objectif d'inclusion financière dans un délai raisonnable et surtout la distribution des cartes VISA multifonctions aux agents de l'Etat, aux boursiers et aux retraités afin de promouvoir le désenclavement, la modernisation et la lutte anti-corruption.

M-M : D'après vous, l'Administration est-elle prête à muter vers la digitalisation de ses services ?

T-R : Les services prioritaires à construire sont ceux qui participent à l'émancipation de la population : l'état-civil, l'éducation, la santé, la lutte contre l'insécurité, la lutte contre la corruption et l'inclusion financière. Le développement numérique et la transformation digitale gravitent autour d'un écosystème : un ensemble cohérent de parties prenantes, de systèmes, et surtout un environnement favorable, pour permettre aux personnes et aux communautés d'utiliser la technologie pour accéder aux services, s'engager les uns avec les autres et rechercher des opportunités économiques.

Développer et soutenir cet écosystème sont la base du plan stratégique du numérique que nous mettons en place. Les trois piliers de cet écosystème sont : premièrement, la révision du corpus législatif et réglementaire pour encadrer le développement commercial qui s'appuie sur le numérique, notamment le e-commerce

. Deuxièmement, la mise en valeur du capital humain par le développement des ressources humaines notamment par la formation pour faire émerger le maximum de talents mais également le développement d' un environnement favorable au développement des startups par la présence d'incubateurs et par un contexte politique, économique et fiscal favorable de ces dernières.

Troisièmement, le socle technique qui doit rester un élément central et il ne s'agit pas seulement de le construire, mais il faut le maintenir, l'exploiter, l'optimiser et le faire évoluer. Ce socle doit permettre d'accroître la connectivité du pays, indispensable au développement de services publics pour la population. La réussite d'une transformation digitale repose pleinement sur la prise en compte de cet écosystème.

M-M : Les projets de digitalisation du gouvernement sont-ils incontournables ou plutôt réalisés à marche forcée ?

T-R : Un des défis à relever consiste à éradiquer le mode de travail en silo de chaque ministère qui constitue un frein pour l'avancement de plusieurs projets et alimente la réticence au changement. Un plan stratégique du Numérique est en phase de finalisation pour instaurer un environnement numérique plus collaboratif de tous les acteurs que ce soient dans le domaine public ou privé. Je tiens pourtant à souligner qu'il est nécessaire de développer un portefeuille de e-services de qualité, moins coûteux, et plus transparent.

En qualité de Ministère transverse et en concertation avec les différents ministères et institutions, on a pu identifier une centaine de services digitaux destinés aux usagers dans divers secteurs tels que l'éducation (ex: E-learning), la santé (ex: DHIS2), le foncier (ex: PLOF), etc. Une étude a été initiée sur l'opérationnalisation ou l'amélioration de qualité de ces services ainsi que sur la simplification des procédures administratives.

En plus de la qualité, l'offre des services de proximité est également en cours d'élaboration en priorisant la décentralisation, le déploiement des applications destinées à la population rurale, la promotion des accès aux informations portant sur la sécurisation foncière et la facilitation des procédures à distance (par exemple, la plateforme foncière, l'imagerie satellite, etc).

M-M : À l'instar du cas du paiement des bourses universitaires, les dispositifs mis en place font toujours l'objet de virulentes critiques. Où se trouvent les failles?

T-R : La mise en place du processus de paiement des bourses nous a pris 2 ans où plusieurs entités interviennent afin d'assurer le bon déroulement des paiements. Chaque maillon de la chaîne doit donc faire sa part pour que le processus se déroule bien et celà part du respect, par les étudiants, des délais impartis sur les inscriptions qui pénalisent le calendrier des paiements et la validation de la liste définitive des bénéficiaires.

Le respect des engagements des universités sur la validation de la liste ainsi que sa validation garantira également le bon déroulement du processus pour arriver à une liste définitive pour le paiement et ainsi garantir un paiement dans les délais impartis. Ceci étant, le processus mis en place garantit un respect des engagements de paiement avec une participation commune conjointe des intervenants du secteur.

Aujourd'hui, ce processus est déjà fonctionnel de bout en bout et intégré dans une seule et unique plateforme qui s'appelle EDUTIC.

M-M : Où en est-on sur le projet d'identification unique ?

T-R : Le programme de mise en place du numéro unique d'identification (NUI) est d'envergure interministérielle, impliquant le ministère de l'Intérieur et de la Décentralisation, le ministère de la Justice et le ministère de la Santé publique dans une plus grande mesure, puis le ministère en charge du Développement numérique et l'Unité de Gouvernance Digitale en tant qu'appui institutionnels dans les programmes et projets relatifs à l'e-gouvernance.

La mise en oeuvre de ce programme a connu des avancées majeures et visiblement accélérées au cours de cette année. A titre d'exemples, le Centre National de l'État-civil et de l'Identifiant (CNECI), qui est l'Établissement public en charge des opérations de digitalisation de l'État-Civil et de l'institution du numéro d'identifiant unique, est actuellement pleinement opérationnel, puisque l'Etat a mis en place son Conseil d'Administration et son staff opérationnel.

Ceci a permis de véritablement lancer les premiers travaux de ce chantier de l'e-gouvernance, si l'on ne cite que la mise en fonction du Laboratoire d'expérimentation du NUI à Toamasina, qui a été désigné comme localité-pilote pour la mise en fonction du NUI. Les équipes des Ministères cités plus haut, avec celles du CNECI et de l'UGD sont d'ailleurs actuellement sur place pour effectuer les premières attributions de NUI.

Les tests des fonctionnalités et performances de la plateforme de liaison entre le Centre de Santé d'Hôpital Be de Toamasina et de la Commune Urbaine de Toamasina, qui assure la transmission immédiate et systématique des déclarations de naissance, sont concluants et a permis de générer les premiers NUI en question depuis le mois de juin dernier. En tout, comptant les NUI déjà attribués au niveau du 4ème arrondissement d'Antananarivo, 1 533 malgaches sont déjà détenteurs de leur NUI.

M-M : Quelle sera la prochaine étape ?

T-R : Une autre étape décisive et déterminante a été franchie dans le cadre du NUI est la mise en place du cadre juridique de ce programme. En effet, le décret qui en fixe les procédures et conditions d'attribution a été adopté le 09 mai 2023. La réglementation de l'attribution du NUI garantit la fiabilité et la sécurité du dispositif utilisé par l'Administration dans la production et la gestion de ces NUI, et notamment dans la protection des données de l'individu qui sont liées à ces NUI.

Incessamment, le décret qui encadre le fonctionnement et la gestion du Système Informatisé de l'État-Civil malgache, que notre Loi sur l'Etat-civil prévoit dans ses dispositions sera mis en vigueur. Dès que les tests réalisés dans la localité-pilote seront concluants, il sera procédé aux opérations de déploiement à l'échelle nationale de l'attribution de NUI. Avoir un NUI est un droit pour tout citoyen malgache, et l'Etat se doit de tout mettre en oeuvre pour garantir ce droit.

Le NUI, qui est déjà opérationnel dans plusieurs pays, est un aspect important de l'adaptation - dans le sens de la modernisation et de la mise en conformité aux standards internationaux - du service public le plus basique devant être fourni par l'Administration : l'identification citoyenne.

M-M : Parlez-nous du projet Registre Social Unique ?

T-R : Le Registre Social Unique ou RSU est un programme au niveau du Ministère de la Population avec divers PTF comme la Banque Mondiale, le Programme Alimentaire Mondial et l'UNICEF, dont l'objectif est de regrouper tous les ménages dans un seul régistre au même titre que les registres d'État-Civil, pour permettre à tous les programmes sociaux d'accéder à toutes les données sur les ménages dans une base de données unique et centralisée.

À terme, le RSU sera synchronisé avec le régistre des ménages Loharano mis à disposition du ministère de l'Intérieur et de la Décentralisation dans le cadre du projet e-fokontany. Lancée depuis deux mois environ, la réalisation du programme RSU est conjointement assurée par le ministère en charge de la Population, le ministère de l'Intérieur et de la Décentralisation - notamment le CNECI -, le ministère en charge du Développement numérique et l'Unité de Gouvernance Digitale, toujours en tant qu'appuis institutionnels.

Un Comité de pilotage interministériel composé des membres des organismes concernés a été créé pour la gouvernance structurelle de ce programme. Ce Comité tient d'ailleurs pour cette semaine un atelier pour officialiser l'initiation de la phase de conception et de développement de ce programme.

Il a toutefois déjà été décidé, lors des séances de travail préalables tenues par ce Comité et les PTF, que la phase pilote du RSU sera lancé à la mi-août, jusqu'au mois de décembre de cette année, avec comme objectif l'enrôlement biométrique de 60 000 ménages dans la région de Vatovavy. Concomitamment avec cette statistique-cible, fait aussi partie des objectifs à court terme l'adoption du projet de décret fixant le fonctionnement et la gestion du RSU.

À moyen terme, plus exactement en 2024, l'objectif est de parvenir à une concordance entre le déploiement à grande échelle du RSU et la campagne d'enrôlement biométrique. Le RSU, comme la base de données Loharano, devrait être un outil de gestion rationnel des aides sociales, en ce qu'il permet de facilement détecter les ménages qui sont dans une situation précaire. Il devra faire partie des dispositifs qui renforcent les filets de protection sociale déjà en place ou à instituer, et augmentera de manière notable la résilience sociale des ménages suite aux chocs économiques, aux catastrophes naturelles ou autres crises.

M-M : Vous comptez fournir de l'Internet gratuitement dans des lieux publics à travers l'île. Alors que plusieurs villes font encore face au grand défi énergétique. Comment atteindre les 410 points connectés et le projet de connectivité des 1 695 communes ?

T-R : Notre pays s'est engagé à transformer sa société en tirant parti des avantages de la technologie numérique et des énergies renouvelables. Le projet DECIM (projet de connectivité numérique et énergétique pour l'inclusion à Madagascar de plus de 400 millions de dollars) reflète notre détermination à fournir de l'énergie et des services numériques accessibles à tous, tout en mettant un accent particulier sur l'inclusion des communautés mal desservies à travers l'ensemble de l'île.

Le projet vise à améliorer la vie de nos concitoyens en développant l'accès aux services d'énergie renouvelable pour 10 millions de personnes. Nous avons également pour objectif d'étendre l'accès aux services numériques à 3.4 millions de personnes, permettant ainsi à davantage de citoyens de bénéficier des opportunités offertes par le monde numérique.

Dans le cadre du projet DECIM, nous nous sommes engagés à améliorer l'inclusion énergétique en veillant à ce que 3 000 bâtiments d'institutions publiques soient connectés à l'énergie, facilitant ainsi l'accès à l'éducation et aux services publics. De même, nous prévoyons de rendre les appareils numériques (smartphones et tablettes 4G) abordables pour plus de 900 000 bénéficiaires sur les 5 prochaines années, contribuant ainsi à réduire la fracture numérique et à créer une société plus équitable.

Nous accordons une grande importance à la connectivité à large bande, et c'est pourquoi nous nous sommes fixé comme objectif de couvrir 80% de la population par un signal cellulaire à large bande (4G). Cela permettra à nos concitoyens d'accéder plus facilement aux services numériques essentiels, de favoriser le développement des entreprises et de renforcer la communication à travers tout Madagascar.

Actuellement, nous avons déjà mis en place plus de 100 points d'accès WiFi gratuit à travers le pays, mais nous ne comptons pas nous arrêter là. Cette année seulement, nous prévoyons d'ajouter plus de 50 nouveaux points connectés supplémentaires, étendant ainsi l'accès à Internet dans les lieux publics à travers l'île.

En conclusion, Nous sommes déterminés à transformer Madagascar en une société numérique inclusive, où l'accès à l'énergie et aux technologies de l'information joue un rôle essentiel dans le développement économique et social de notre pays.

M-M : La redynamisation de la Paositra Malagasy est en cours. Quelle sera la prochaine étape et quels sont les efforts entrepris par rapport à cet établissement qui semble être en perte de vitesse ?

T-R : La PAOMA n'est pas en perte de vitesse, au contraire les efforts sont mis en place pour sa redynamisation à travers la mise en place d'un projet d'envergure qu'est la Banque Poste. Le Conseil des ministres du 19 avril 2023 a approuvé les détails du modèle économique pour procéder à la création de la Banque postale. Pour rappel, le Conseil des Ministres a déjà approuvé la création de la Banque Postale, suite à laquelle des travaux menés par le ministère de tutelle, la Paositra Malagasy, la Commission de supervision bancaire et des affaires financières (CSBF), et des partenaires tels que la société SONAPAR ont étudié la meilleure façon de promouvoir les activités de cette Banque Postale. Cette dernière se focalise à court terme sur les activités de microfinance (IMF) et de monnaie électronique (EME) et intégrera dans ses activités, les services de banque primaire dans une perspective à moyen terme. Ce projet nécessite un investissement important, donc en plus de la Paositra Malagasy, la SONAPAR y participera, et le besoin en compte courant d'associés, destiné au financement de ses activités de crédits, départagés de manière égale entre les futurs associés.

Le lancement de la futureBanque Postale qui est prévu au plus tard au mois de Septembre 2023 s'appuie sur le réseau structurel de la Paositra Malagasy qui couvre l'intégralité du pays avec 250 agences réparties dans toute l'Île. Le plan de déploiement établi à ce jour prévoit l'implémentation des services de la Banque Postale dans 28 agences principales de la Paositra Malagasy courant 2023, et par la suite, dans 120 agences au cours de l'année 2024, et ce jusqu'à la couverture des 250 agences de l'opérateur public postal. À ce jour, le projet de transformation est en cours en vue de l'assainissement des comptes pour les prochaines années, l'instruction de demande d'agrément est en cours et ne devrait pas tarder à sortir. En même temps, le choix du futur système d'information est en cours.

M-M : L'Etat venait de décréter récemment la libéralisation totale du secteur de la télécommunication. Qu'est-ce que ça veut dire et qui seront les bénéficiaires de cette libéralisation ?

T-R : Libéraliser le secteur des télécommunications signifie ouvrir l'accès à l'exploitation et à la commercialisation de TOUS les services de télécommunications qui puissent être présents sur le marché à tous les opérateurs qui souhaitent le faire, dès lors qu'ils sont dans une situation régulière vis-à-vis de la réglementation du secteur. Celà implique de supprimer toutes formes de barrières qui empêcheraient certains opérateurs d'entrer sur un marché particulier et de briser toute forme de monopole consenti par l'ancienne réglementation qui réserve de manière exclusive certains segments du marché à un ou deux opérateurs précis. C'est ce mécanisme d'ouverture et de déverrouillage qui a été intégré dans les deux décrets adoptés au mois d'avril de cette année, concernant respectivement les licences/les déclarations et l'accès/l'interconnexion. Ces décrets ont mis les opérateurs sur le même pied d'égalité sur le marché devant l'Etat et le Régulateur.

Les premiers bénéficiaires sont à l'évidence les consommateurs. Quand l'Etat décide de laisser jouer la libre concurrence en s'assurant que les opérateurs possèdent les mêmes "armes de bataille" et "se battent" de manière égale, ces derniers doivent se dépasser et dépasser leurs pairs pour gagner une part de clientèle conséquente pour rester sur le marché. En toute logique, c'est le rapport qualité-prix qui sera déterminant dans le raisonnement final du consommateur. Ces décrets devraient avoir pour effet l'amélioration de la qualité de service et l'institution d'un coût raisonnable et accessible, en plus de donner la possibilité de choix plus étendu à ce consommateur qui était auparavant astreint aux services d'un seul opérateur, aux coûts et qualités desdits services. Quelque part, par libéralisation du secteur, c'est le consommateur aussi qui a été libéré du joug d'un opérateur dominant.

D'aucuns perçoivent cette réforme réglementaire qui modifie profondément, il faut l'admettre, la structure du marché des télécommunications en supprimant certains avantages particuliers bénéficiés par un/deux opérateurs en particulier. Mais il faut aussi savoir raisonner dans le sens où la libéralisation va permettre à ces opérateurs de plus évoluer dans ces domaines où ils n'ont jamais connu de concurrents et dans lesquels même leur croissance ne s'est faite que selon leur bon vouloir et à leur propre rythme. Par la libéralisation du secteur, ces derniers doivent désormais se mettre à la hauteur de leurs potentiels concurrents sur tous les aspects de la production et de la commercialisation. C'est en quelque sorte un défi lancé à ces opérateurs.

Pour les opérateurs auxquels le marché vient de s'ouvrir, l'Etat espère une croissance notable de leurs activités et partant, une retombée conséquente de cette croissance sur les prochaines statistiques du secteur mais il leur faut pour cela investir et l'Etat est là pour les rassurer.

Une dernière chose, nous sommes en discussion avec un opérateur satellite bien connu pour qu'ils puissent offrir leurs services à Madagascar avant la fin de l'année.

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