Ile Maurice: Nominés politiques - Quand la méritocratie est bafouée

Cela a toujours existé. Les politiciens au pouvoir, surtout les ministres, casent toujours leurs poulains dans des postes au sein des ministères, des corps paraétatiques et même des institutions sous contrôle de l'État, comme Mauritius Telecom (MT) et autre MauBank. Mais, au fil des années, on découvre que, très souvent, ceux qui sont casés par-ci et par-là n'ont comme seule qualification que le service rendu à leurs ministres et députés.

Il y a eu deux cas récemment : Presley Paul à la Cargo Handling Corporation Limited (CHCL) et Zaid Heera à la Mauritius Meat Authority. Et ils ont été priés de partir. La vraie raison est qu'ils ne détiennent pas les diplômes requis pour occuper les postes de directeur général (DG) et de General Manager. Toutefois, si aujourd'hui il y a tant de contestations, c'est que certains au gouvernement pensent qu'ils peuvent nommer leurs protégés là où ils le souhaitent. Le cas le plus connu est celui de Sandhya Boygah. L'ancienne secrétaire parlementaire privée ne pouvait pas occuper le poste de Chief Executive Officer (CEO) du Mauritius Standards Bureau, faute de diplôme. Toutefois, elle a été nommée DG, un poste qui ne nécessite pas les diplômes requis pour celui de CEO.

Aussi, dans le passé, nombreux sont les proches des politiciens qui ont été appelés à occuper le poste de Chairman à temps partiel. Pour de tels postes, avec des salaires autour de Rs 30 000 à Rs 35 000 mensuellement - d'autant plus que le titulaire ne dispose pas d'un bureau -, personne ne conteste ces nominations. Mais quand ces mêmes personnes doivent occuper des postes de directeur ou sont nommées président à plein-temps, cela commence à soulever des contestations.

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Comment et pourquoi est-on nommé ?

Un nominé politique qui connaît les rouages des nominations soutient que ceux qui ne possèdent pas de grands diplômes académiques (et qui n'ont que des certificats moins qu'un School Certificate) sont souvent casés au niveau des centres sociaux. «C'est facile d'effectuer des nominations d'autant plus qu'ils ne touchent que le salaire minimal. Ils sont considérés comme des general workers.» Mais, dans cette catégorie, c'est à la CHCL et à la Mauritius Ports Authority qu'il y a le plus de demandes. «Autrefois, c'étaient les habitants de Roche-Bois, de Ste-Croix, de Riche-Terre et de Baie-du-Tombeau qui étaient recrutés sur des recommandations ministérielles. Mais, aujourd'hui, la main-d'oeuvre vient des quatre coins du pays. La raison est qu'un employé qui est considéré comme un general worker touche entre Rs 50 000 et Rs 75 000 par mois.»

Il raconte que lors des campagnes électorales, un candidat ne refuse jamais un coup de main. Notre interlocuteur, qui s'est beaucoup donné lors de la campagne électorale de 2019, souligne que le candidat ne vérifie alors pas si son agent a un certificat de caractère sans reproche. «Si jamais ce candidat élu est nommé ministre, alors là, il procède par élimination et, souvent, il trouve des prétextes, comme le candidat a un précédent surtout au niveau de la police ou à un poste qu'il occupait, pour refuser de l'aider. En fait, il a déjà une idée de ceux qu'il veut protéger.»

Il fait ressortir que dans beaucoup de cas, ceux qui font une demande pour être des nominés ont rendez-vous au Sun Trust pour montrer leurs diplômes. C'est un panel de personnes, elles-mêmes des nominées politiques, qui fait des recommandations. L'exemple le plus flagrant est ce nominé politique au poste de directeur du Government Information Service qui allait faire des recommandations aux ministres pour des postes d'advisor on information matters (attaché de presse).

Notre interlocuteur ajoute, toutefois, que pour des postes plus importants, comme ceux d'ambassadeurs, de directeurs ou de CEO de banques ou d'institutions comme la Central Water Authority (CWA), le Central Electricity Board et la Mauritius Broadcasting Corporation (MBC), le choix revient au Premier ministre.

Pas d'audit

Après que Zaid Heera a été poussé vers la sortie, on a évoqué le fait que le gouvernement avait débuté un audit sur des nominés politiques. Surtout pour une vérification de leurs diplômes. Or, un membre du Mouvement socialiste militant (MSM) a laissé entendre qu'il n'y a pas cet audit. Au sujet de ces deux personnes qui ont dû démissionner de leur poste, c'est qu'il y avait des questions parlementaires sur elles. «Pour Presley Paul, il y avait une Private Notice Question (PNQ) alors que pour Heera, Eshan Juman avait adressé une question au ministre de l'Agro-industrie. Pensez-vous que le MSM, qui a nommé tant de gens, fera un tel exercice ? Si tel est le cas, alors au moins la moitié des nominés, surtout ceux qui occupent des postes importants, doit évacuer leur poste.»

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