Nous entrons dans le second semestre 2023, année électorale pour le renouvellement des institutions de la RDC. L'année électorale sera remplie de toutes sortes de propagandes, qui ont déjà commencé à travers le pays sauf dans les zones encore occupées par les rebelles du M23.
Les Jeux de la Francophonie, qui ont débuté hier à Kinshasa, faisaient partie de la propagande électorale, car il me semble incompréhensible qu'on s'amuse dans l'ouest alors que des parties de l'est du pays sont sous contrôle étranger.
Nous avons été témoins de mouvements de foule lors des dépôts de candidatures des représentants nationaux et provinciaux dans plusieurs villes de différentes régions. Les mêmes personnes sont acclamées et accompagnées par la foule que lors de l'enrôlement pour voter. Une fois, je me suis arrêté aux bureaux de la CENI à Kenge et j'ai été très surpris de voir que la liste des candidats comprenait des personnes de plus de 80 ans qui étaient en politique depuis plus de 40 ans. La question que je me pose est de savoir comment les électeurs congolais peuvent-ils confier leur sort à ceux qui ont littéralement ruiné leur vie pendant quarante ans.
A ce stade de notre histoire, il convient de poser des questions subjectives sur tout ce que nous avons vécu. Comment se sentent les Congolais aujourd'hui ? Sont-ils heureux ? Leur bien-être s'est-il vraiment amélioré après toute une législature mouvementée (2018-2023) ? Le bien-être dépasse évidemment la catégorie économique, il comprend le bonheur de vivre, la santé physique, la sécurité physique et alimentaire, la chaleur sociale, etc. Quand un homme n'est pas satisfait de son destin, il cherche à le changer, s'il a les capacités physiques et mentales d'un homme. Les périodes électorales nous donnent l'occasion de changer et de corriger nos erreurs. Il est donc, illogique de revenir sur ceux qui n'arrivent pas à améliorer les conditions de vie dans nos communautés.
Cela dit, il est important de savoir que lorsque 68% du budget national est consacré aux hauts salaires, on n'a plus affaire à un problème économique, mais à un problème civil.
Au Congo, il existe une classe de pillards (députés, ministres, présidents de sociétés parapubliques, etc.) qui dépensent 68% des fonds du trésor public en laissant des résidus pour tous les autres, un phénomène qui n'a rien à voir avec l'état de l'économie de la RDC, mais qui a tout à avoir avec la dictature marchande totalitaire. Dans ce domaine, ce ne sont plus les individus qui dirigent, mais plutôt leurs atouts. Ce ne sont pas les autorités congolaises qui impriment l'argent, mais l'argent imprimé s'impose aux dirigeants congolais. La publicité que nous connaîtrons bientôt fera partie d'une grande diversion qui va nous empêcher d'affronter notre douleur de front, au risque d'une désobéissance généralisée.
Ces discours seront bien orwelliens : on nous dira, comme on l'a déjà fait, que nos ennemis ne sont pas les voleurs politiques et les prisonniers de la marchandise totalitaire, mais les prêtres et les évêques catholiques. Au lieu de s'en prendre aux politiciens malhonnêtes, ces fossoyeurs, ils vont construire une sainte alliance (une union sacrée) et convaincre le prolétariat de massacrer des prêtres au nom de l'ordre étatique. On nous dira que nos ennemis sont les Kasaïens alors que les pauvres n'ont de commun avec les voleurs de la République que la langue Tshiluba. La bourgeoisie congolaise utilisera l'accusation de tribalisme afin d'accommoder la grande majorité des Kasaïens qui luttent misérablement comme la plupart des congolais. Le discours de tribu éclipsera volontairement le discours de classe. Je pense qu'il est injuste de dire que c'est un pouvoir Luba. Non, c'est une classe capitaliste qui a confisqué le pouvoir du peuple, y compris le peuple Luba. Les fusilleurs du prolétariat, ce ne sont ni les curés, ni les Baluba, mais le bloc capitaliste qui siphonne le trésor public pour leur bien-être individuel et non collectif.
Nous entendrons l'idée mythique qu'ils pourront refonder le Congo si on leur ajoutait cinq années de plus. Rien ne pourrait être plus faux. Car, nous n'avons pas de dirigeants, nous n'avons que des disciples de la marchandise totalitaire. La preuve est qu'il suffirait de réduire drastiquement les salaires de politiques pour que les véritables patriotes surgissent dans notre pays. Les cartes électorales et les noms des candidats que j'ai vu afficher à Kenge n'augurent pas de la paix sociale, mais plutôt d'une grande explosion sociale où la classe capitaliste des politiciens, la classe des privilégiés de la république, la classe des dirigeants congolais va s'affronter au prolétariat qui constitue les 90% de la population congolaise. Par immanence de la nécessité, les politiciens ne pourront que s'accrocher à l'argent, à l'économie et à la banque. Il n'y a rien de hasard dans ce comportement. La réification par l'argent est une nécessité immanente à la marchandise.
Nous serons donc, confrontés aux individus réifiés par l'argent et donc sans âmes ni consciences et qui n'hésiteront pas à écraser le prolétariat. Le camp qui perdra cette lutte à mort vivra dans la misère pour longtemps. Tout est déjà pourri.
Tout est pourri, en effet, sauf une chose, la transcendance de l'homme contre le règne de la quantité marchande. Notre bonheur n'est pas lié à l'argent. Il y a dans la majorité des Congolais un être générique, une vie intérieure radicale que l'argent ne peut subordonner.
Tout discours qui voudra promettre une humanisation de l'espace congolaise dans la continuité de ce que nous avons vécu les derniers décennies sera tout simplement trompeur et démagogique.