Le rappeur congolais devait se rendre au sud de la Tunisie en tant que tête d'affiche de l'évènement Urban Music Fest, le 11 août. Son retrait fait suite à la vague de mauvais traitements subis par les migrants subsahariens depuis le début du mois de juillet et la récente affaire concernant une dizaine de migrants retrouvés morts dans le désert après y avoir été transportés de force.
Gims l'a dit expressément sur le réseau social Instagram : « Des enfants, des femmes, des hommes, expulsés de la Tunisie vers la Libye, vivent dans des conditions inhumaines. Je ne peux maintenir ma venue » et il a ajouté qu'il ne pouvait se taire face à cette « détresse extrême insoutenable ». Depuis le début du mois de juillet, RFI documente les mauvais traitements infligés aux migrants en Tunisie. Entre 600 et 700 avaient été transportés de force aux frontières tuniso-libyennes et tuniso-algériennes depuis la ville de Sfax à l'est du pays dans le cadre d'un tour de vis contre la migration irrégulière et après la mort d'un Tunisien lors d'une altercation avec des migrants.
Le chanteur a d'ailleurs publié des photos sur son compte Instagram qui font écho aux nombreuses images douloureuses partagées ces derniers jours sur les réseaux sociaux, des images partagées par les gardes-frontières libyens de nombreux subsahariens très déshydratés et brûlés par le soleil. Plusieurs centaines avaient été secourues par le Croissant-Rouge tunisien, mais l'ONU a alerté sur la centaine d'entre eux encore coincés dans le désert, réclamant des « solutions urgentes » aux autorités tunisiennes. C'est peut-être une prise de position qui aura un impact dans la politique tunisienne envers les migrants, car jusqu'à présent les autorités nient ces mauvais traitements.
Pas de mobilisation du milieu culturel tunisien
En Tunisie, le sort des migrants n'a pas fait l'objet de mobilisations du milieu culturel. Certes, en février dernier, lors des propos polémiques de Kaïs Saïed sur la migration irrégulière, de nombreux artistes s'étaient joints à l'indignation sur les réseaux sociaux en changeant leur photo de profil avec le continent africain par exemple, en guise de soutien. Mais avec cette deuxième vague de mauvais traitements, on sent un certain détachement.
Ce qu'il se passe est très contradictoire avec la position de la Tunisie sur le plan diplomatique. Le pays a accueilli des athlètes de 52 nations africaines fin juin pour les Jeux africains de plage, une soirée africaine est prévue lors du festival de Carthage le 15 août avec l'artiste nigériane Yemi Alade et l'artiste ivoirien Tiken Jah Faholy. Le 3 août, c'est l'artiste malienne Fatoumata Diawara qui est invitée au festival de Hammamet.
Même si la ligne politique du gouvernement et de la présidence porte sur la présence de migrants en situation irrégulière dans le pays et non pas contre les artistes ou sportifs, le sort réservé aux migrants contredit néanmoins cette image d'ouverture sur l'Afrique.