Jean-Tobie Okala
Le gouvernement et ses partenaires se sont réunis du 1er au 3 août pour réfléchir aux causes profondes de la persistance de l'exploitation illicite des ressources naturelles par les groupes armées. Pour parler de cette question, cinquante-et-un participants dont huit femmes y ont pris part. Parmi eux, six autorités, dont le maire intérimaire de la ville de Beni.
L'organisation de ces échanges entre l'Etat congolais et les partenaires impliqués dans le secteur minier est l'une des recommandations du processus de Nairobi au Kenya, où les chefs d'État ont demandé au gouvernement congolais et aux organisations de la société civile de se pencher sérieusement sur les liens existants entre l'exploitation illégale des ressources naturelles et les conflits dans l'est de la République démocratique du Congo.
Parce que la lutte contre les groupes armés n'est pas qu'armée, elle passe aussi par d'autres voies non armées, notamment le Programme de désarmement, démobilisation, relèvement communautaire et stabilisation (PDDRC-S) ainsi que par l'assèchement des ressources, lesquelles ressources sont le nerf de la guerre pour ces groupes armés.
C'est dans ce cadre que la MONUSCO qui accompagne toutes les initiatives de paix en RDC, et dont le mandat est d'aider les autorités à lutter contre les groupes armés, a appuyé l'organisation d'une série d'ateliers sur l'exploitation illicite des ressources naturelles par les groupes armés à Goma, à Bunia, à Bukavu et à Beni du 1er au jeudi 3 août 2023.
Le nerf de la guerre des groupes armés
Ces assises ont porté sur l'exploitation illicite du cacao et de l'or et les conflits armés dans les territoires de Beni et Lubero. Pour Blaise Bolamba, secrétaire permanent de l'ONG CPC (Congo Peace Center) qui travaille pour la construction de l'Etat, la paix et le développement, « ce sont la fraude, le pillage, la contrebande qui alimentent et enrichissent les groupes armés qui perpétuent les crimes dans l'est de la RDC ». Il affirme même que cette exploitation frauduleuse des matières premières constitue l'une des sources de financement des guerres dans l'est du pays.
Qui fait quoi et où ?
Pendant trois jours, les participants ont passé en revu plusieurs matières. Ils ont aussi réfléchi et proposé des voies et moyens de sortie pour l'éradication des dynamiques négatives liées à l'exploitation du cacao et de l'or dans les territoires de Beni et Lubero en proie à un activisme persistant des groupes armés aussi bien locaux qu'étrangers. La question du cadre juridique sur les droits, devoirs et obligations sociales, économiques et techniques liés à l'exploitation des mines a aussi été passée en revue.
Il a été fait remarquer qu'il n'y a pas que les groupes armés qui exploitent illicitement les matières premières en RDC. D'autres acteurs sont pointés du doigt. Blaise Bolamba de l'ong Congo Peace Center l'a ainsi rappelé : « On cite aussi les forces armées de la RDC dans cette exploitation illicite. Des officiers militaires et d'autres éléments de défense et de sécurité ont été conviés ; parce que nous voulons que tous ces acteurs réfléchissent pour que nous puissions trouver les voies et moyens de couper ces liens entre la militarisation de nos sites miniers et les conflits dans nos régions ».
En réaction à ces affirmations, le colonel Alain Kiwewa, administrateur du territoire de Lubero, a indiqué que des enquêtes sont en cours pour identifier ces hommes et femmes en uniforme qui seraient impliqués dans l'exploitation illégale des ressources naturelles. Il a notamment insisté sur le fait que l'une des solutions passe par le démarrage du Programme de désarmement, démobilisation, relèvement communautaire et stabilisation (PDDRC-S) : « Nous attendons donc l'effectivité de ce plan et je pense que la présence de militaires ou de groupes armés dans des carrés miniers prendra fin ; parce que ces gens-là seront obligés de se joindre à nous dans le cadre de ce PDDRC-S ».
Les parties prenantes à cette rencontre ont salué l'accompagnement de la MONUSCO dans ce processus. Blaise Bolamba de l'ong Congo Peace Center a rappelé, en guise de conclusion, les différents types d'appuis de la Mission à ce processus : « La MONUSCO est pour nous un partenaire privilégié. Elle nous a aidés à financer ces activités de manière technique et pratique : elle prend en charge le transport de nos participants, ceux qui viennent de Kinshasa vers l'intérieur du pays ».