Ile Maurice: Profession légale - L'avoué Hunchun Gunesh dénoncé pour réclamation de frais d'avocat

La polémique et ses actes envers un de ses clients ont de quoi surprendre venant de cet homme de loi qui est le président en exercice de l'Independent Review Panel (IRP).

Un habitant de Port-Louis, un certain Rajiv (*), a adressé une lettre, le 13 juillet, à la Master and Registrar Wendy Rangan, entre autres, pour protester contre la façon de faire de l'avoué Hunchun Gunesh. Il y explique qu'il contacte ce dernier en mai 2022 pour une affaire de terrain. L'avoué l'informe que cela coûtera entre Rs 30 000 et Rs 35 000, des frais que Rajiv accepte. Mais c'est lui qui doit faire les recherches sur ledit terrain, recherches qui lui coûtént, dit-il, environ Rs 20 000.

Toujours selon sa lettre, aussitôt les documents remis à Hunchun Gunesh, celui-ci réclame un premier paiement de Rs 15 000 pour la rédaction de la plainte que Rajiv lui remet, le 18 mai 2022. Le 23 juin 2022, l'avoué lui demande Rs 15 000 additionnelles, qui lui sont remises, pour porter l'affaire en Cour suprême. Rajiv n'entend plus rien car l'avoué est parti en vacances à l'étranger... À son retour au pays, l'avoué lui envoie une autre réclamation de... Rs 150 000. Rajiv refuse, car, argue-t-il, il n'a jamais été question de tels honoraires lors de leur rencontre. Il demande donc à Hunchun Gunesh de lui rendre tous les documents, cela, après une discussion orageuse au téléphone. Rajiv lui réitère la demande par lettre, le 10 janvier 2023, et informe Gunesh qu'il compte retenir les services d'un autre avoué.

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Or, Me Hunchun Gunesh ne lui rend pas les documents, dont des originaux, mais retire, le 2 février 2023, la plainte déjà déposée en Cour suprême. Pourquoi ce retrait ? Contacté, Me Hunchun Gunesh nous a adressé une lettre d'explications dans laquelle il affirme qu'il a demandé à Rajiv, le 4 janvier 2023, par lettre (dont il nous a aussi remis une copie), de passer à son bureau, le 23 janvier 2023, pour payer les honoraires dus et répondre aux questions («particulars») des autres parties. Il a aussi prévenu Rajiv que s'il ne venait pas le 23 janvier 2023, il procèderait au retrait de la plainte. En a-t-il le droit ? Selon un de ses confrères que nous avons contacté, un avoué n'en a pas le droit sans l'autorisation du client.

Dans cette lettre du 4 janvier 2023, Me Hunchun Gunesh «rappelle» à Rajiv qu'il lui a réclamé lors de leur première réunion «Rs 150 00 (sic) for each attorney and counsel and in case you wish to go for a writ of injunction this will cost you separately Rs 35 000». Si Rajiv confirme la réception de cette lettre, il en nie le contenu et maintient que l'avoué lui a réclamé seulement Rs 30 000. D'ailleurs, se demandet-il, pourquoi l'avoué réclamet-il des honoraires d'avocat ? «Après tout, j'avais déjà engagé les services d'un autre avocat et j'en ai informé Me Hunchun Gunesh.» Selon Rajiv, si Hunchun Gunesh réclame maintenant les frais d'avocat dans sa lettre du 4 janvier (mais ne l'avait pas fait, selon lui, le jour de la première rencontre), c'est probablement pour payer son propre fils qui vient de prêter serment comme avocat et qui travaille dans la même étude.

Dans les factures de Gunesh, en date du 18 mai 2022, et 23 juin 2022 que nous avons pu voir, il est stipulé que si le client ne paie pas les honoraires, l'avoué pourra se retirer de l'affaire, sans rembourser la somme déjà payée. Mais il n'est nullement écrit que l'avoué pourra retirer la plainte.

Président de l'IRP

Après le retrait de la plainte par Me Gunesh, les hommes de loi des parties adverses réclament maintenant, comme le veut la procédure, les frais de ce retrait à Rajiv. Qui a déjà payé son nouvel avoué dont il vient de retenir les services en plus de son avocat. C'est sans compter les Rs 30 000 qu'il a payées à Me Hunchun Gunesh et qu'il ne récupérera pas.

Rajiv a aussi écrit à la Mauritius Law Society (MLS), à la Cour suprême, au Directeur des poursuites publiques, au bureau de l'Attorney General et au Prime Minister's Office, car Hunchun Gunesh est aussi le président de l'Independent Review Panel... Nous sommes en présence d'une lettre de la MLS à Rajiv, en date du 19 janvier 2023, l'informant que la MLS a déjà demandé des explications à Hunchun Gunesh et qu'elle le tiendra au courant de l'issue de l'enquête.

L'avoué Hunchun Gunesh nous a remis une copie de la réponse qu'il a faite à la MLS. La forme et le contenu de cette lettre ont, pour dire le moins, de quoi choquer venant d'un homme de loi et adressée à la MLS. (Voir lettre.) Il y traite Rajiv de «bastard» parce que celui-ci aurait omis, selon l'avoué, de dire à la MLS qu'il est fonctionnaire. Il met en garde la MLS que si cette dernière prête foi à la lettre de dénonciation de Rajiv à son encontre, il faudra faire des arrangements pour que lui, Hunchun Gunesh, soit admis à l'hôpital Brown Sequard ! Car, selon lui, il doit être un «pagla» (fou, aliéné, cinglé) s'il n'avait accepté que Rs 35 000 pour une affaire où les parties adverses sont au nombre de 18 et qui durera d'après lui au moins cinq ans. Pourtant, l'avoué Gunesh lui-même a, dans sa lettre du 4 janvier 2023 à Rajiv, affirmé que ces Rs 150 000 additionnelles sont destinées à l'avocat et non à lui l'avoué. Alors que dans sa réponse à la MLS, il semble dire que les Rs 35 000 (en fait, le montant est de Rs 30 000) ne suffiront pas pour un avoué dans une telle affaire. Et il maintient dans cette lettre qu'aucun document ne sera rendu à Rajiv si celui-ci ne lui paie pas les honoraires. Honoraires pour quoi ?

Dans sa lettre d'explication adressée à l'express, Hunchun Gunesh ne se retient pas non plus, en se demandant si Rajiv a bien été promu dans son travail «on merits».

Quant au président de la MLS, il n'a pas répondu à nos sollicitations.

(*) : prénom fictif

Facture ou reçu ?

Ces factures que Hunchun Gunesh a remises à Rajiv sont, certes, marquées «Invoice» mais ont visiblement servi de reçus. Est-ce légal ? Un avoué et un expert-comptable nous disent que ce n'est pas dans les normes de la Mauritius Revenue Authority. «Alors que la petite quincaillerie du coin de la rue», nous dit le comptable, «donne des reçus en bonne et due forme.» Pour l'avoué, cette facture-reçu est ambiguë. Il se demande si ce n'est pas voulu. «C'est un avoué expérimenté. Il doit connaître les procédures.» De plus, une des factures (ou reçus) parle de «Division in Kind» alors que l'avoué a déposé une plainte (PWS). Est-ce normal ? «Non», nous dit notre interlocuteur-avoué. «En écrivant 'Division in Kind' au lieu de PWS, il induit son client en erreur.»

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