Madagascar: Les fables antankarana pour donner des leçons

À travers leurs fables et leurs contes, comme tous les Malgaches, les Antankarana essayent d'aiguiser l'intelligence de leurs enfants et leur sens de réflexion. Charles Renel, directeur de l'Enseignement sous la colonisation, et Cassam Aly Ndandahizara, ancien inspecteur des Impôts nous en racontent deux.

Un jour, dit-on, trois soeurs allèrent se promener au bord du fleuve Bemarivo et trouvèrent trois oeufs de « siketry ». L'aînée dit : « Je ferai cuire mon oeuf. » La puinée dit : « Je ferai couver le mien par une poule.» La cadette dit : « Je plongerai celui qui m'appartient dans un étang.» Le projet de Faravavy, la dernière, amusa beaucoup ses aînées. Pourtant, après plusieurs jours enfoui dans l'étang, l'oeuf fut éclos. Faravavy s'approcha et appela le poussin : « OEuf de siketry, oeuf de siketry ! Approche-toi de moi. » S

itôt dit, l'oeuf sortit de l'eau et devint une grosse poule. Faravavy, toute joyeuse, caressa sa poule, puis la laissa retourner dans l'eau. Le lendemain, la jeune fille appela de nouveau sa poule, mais, à sa grande surprise, la poule se métamorphosa en un gros boeuf. Chaque jour, elle allait visiter son boeuf. Ses parents étaient bien intrigués par les absences quotidiennes de leur fille. Aussi, ils la suivirent et l'entendirent appeler le boeuf qui répondait à sa voix. Ils décidèrent de s'emparer de l'animal. Lorsque Faravavy revint à la maison, ils lui dirent : « Ta soeur est bien malade, tu dois la visiter. »

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La jeune fille, émue, partit tout de suite. Aussitôt, les parents retournèrent près de l'étang et, imitant la voix de leur fille, ils appelèrent : « OEuf de siketry, oeuf de siketry ! Approche-toi de moi. » Le boeuf ne bougea pas, car il ne reconnaissait pas la voix de Faravavy. Alors une des deux soeurs, Fagnivo, la puinée, appela à son tour : « OEuf de siketry, oeuf de siketry ! Approche-toi de moi. » Cette fois, le boeuf croyant entendre la voix de Faravavy sortit de l'eau. Les parents se jetèrent sur lui, l'attachèrent et le tuèrent. Quelque temps après, de retour à la maison, Faravavy salua ses parents et alla de suite à l'étang. Elle appela comme de coutume, mais en vain. Pas de boeuf. Désespérée, pleurant, elle retourna auprès de ses parents. Trop triste, elle ne prenait aucune nourriture.

Un jour, cependant, par un pur hasard, elle découvrit des os de boeuf et comprit tout. Désespérée, elle courut au bord de l'étang. Elle se mit à chanter : « Sable, sable, avale-moi, car mon père et ma mère ne m'aiment pas. » Le sable s'ouvrit et avala Faravavy. Telle fut la première ondine ou « zavavirano ». Une autre fois, un sanglier à la recherche des racines de nénuphar suivait les bords d'un lac où s'étalait un énorme caïman en quête d'une proie. Averti par les grommellements du sanglier, le caïman se dirigea vivement de son côté, silencieusement: « Salut », lui dit-il. « Salut », répondit le sanglier. « C'est donc toi qu'on craint tant sur la terre ? », demanda le caïman : « Oui, c'est moi-même et toi, es-tu celui qui désole les rives paisibles de ce lac ? », répondit à son tour le sanglier. « C'est moi-même », dit le caïman.

« Je voudrais bien essayer ta force.» - «Je suis à ta disposition tout de suite.» - «Tu ne brilleras pas au bout de mes défenses.» - «Tu ne te vanteras pas au bout de mes longues dents bien pointues.» - « Mais, dis-moi donc comment on t'appelle ? » - « On m'appelle le 'père coupe liane sans hache, fouille manioc sans angady, roi de la destruction', et toi, on te connaît sous quel nom ?» - « Je suis celui qui ne gonfle pas, qui ne s'étouffe pas au fond de l'eau, donnez, je mange ; ne donnez pas, je mange quand même » - «C'est bon ! Mais qui est l'aîné de nous deux ? »

- « C'est moi », dit le caïman, « car je suis le plus gros et le plus fort. »- « Attends, on va voir. » En parlant ainsi, le sanglier donna un coup de boutoir ; une énorme motte de terre s'écroula sur la tête du caïman, l'étourdissant. « Tu es, en effet, fort dit le caïman après s'être remis ; à ton tour, attrape ceci. » Et lançant au sanglier, surpris une énorme trombe d'eau, il l'écarta loin de la rive du lac : « Je te reconnais mon aîné », avoua le sanglier en se relevant. « Je vais cependant me mesurer avec toi. » - « Approche donc », dit le caïman. « Sors un peu de l'eau ; sur la terre ferme, je m'approcherai. » -

« Soit. » Ils se dirigèrent en même temps sur un monticule de terre où le caïman n'avait de l'eau qu'à mi-corps. Le sanglier bondit, tourna autour de son ennemi, évita sa gueule énorme aux dents pointues ; profitant d'une position défavorable, il lui fendit, de ses défenses, le ventre de bout en bout. Le caïman rassemblant ses dernières forces et, au moment où le sanglier se pavana devant sa gueule, il le saisit par le cou, le terrassa au sol et l'étrangla. Ils succombèrent tous les deux. Nous avons appris cette histoire du martin-pêcheur qui assistait à ce combat des géants. « Lequel est le plus fort, le sanglier ou le caïman ? C'est à vous de me le dire. »

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