Afrique de l'Ouest: Expiration de l'ultimatum de la CEDEAO - Bola Tinubu va-t-il manger... sa chéchia ?

Les dirigeants ouest-africains ont participé au 51e sommet extraordinaire de la Cedeao pour discuter de la situation politique au Niger.
analyse

Hier, 6 août 2023, a expiré l'ultimatum que la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) a lancé aux putschistes nigériens pour rétablir l'ordre constitutionnel et ce, après avoir imposé de sévères sanctions financières et économiques à Niamey. Le constat est que les tombeurs du président Mohamed Bazoum ont décidé de raidir la nuque, défiant ainsi les têtes couronnées de l'organisation ouest-africaine. Alors, que va-t-il se passer ? Va-t-il pleuvoir du feu sur Niamey ?

La CEDEAO finira par se dégonfler comme un ballon de baudruche

La CEDEAO va-t-elle mettre à exécution sa menace d'intervention militaire pour faire plier le Général Abdourahamane Tchiani et ses frères d'armes plus que jamais ragaillardis par le soutien à eux apporté par Ouagadougou et Bamako ? On attend de voir. Mais tout porte à croire qu'en dehors des sanctions financières et économiques, les dirigeants ouest-africains ne franchiront pas le pas en considération de plusieurs paramètres et non des moindres.

En effet, l'Algérie qui partage une longue frontière avec le Niger, quoi que condamnant le coup d'Etat et appelant à un retour rapide à l'ordre constitutionnel, se dit ouvertement opposée à toute intervention militaire de la CEDEAO chez son voisin. Tout en rappelant la disponibilité de son pays à contribuer à la résolution de la crise nigérienne, le président Abdelmadjid Tebboune estime que le recours à la force pourrait avoir de lourdes conséquences sur l'Algérie.

De son côté, la Mauritanie se montre aussi très circonspecte au moment où des notabilités coutumières au Bénin mettent en garde le président Patrice Talon contre toute intervention militaire au Niger qui, disent-elles, entretient des liens socio-historiques avec le pays du vaudou. Et ce n'est pas tout. Car, à l'issue d'une session tenue le 5 août dernier, le Sénat nigérian a refusé de donner son quitus au président Bola Tinubu en vue d'intervenir militairement au Niger au motif que cela pourrait déstabiliser davantage certaines régions du Nigéria, déjà en proie à des attaques terroristes. Le Sénat est soutenu dans sa prise de position par l'opposition politique qui juge « inutile et irresponsable » tout recours à la force au Niger.

Autant de signaux qui laissent croire que la CEDEAO finira par se dégonfler comme un ballon de baudruche ; elle qui, de plus en plus, perd de la cote auprès des peuples qui l'accusent de se comporter comme un syndicat des chefs d'Etat de la sous-région. Cela est d'autant plus vrai qu'elle est toujours prompte à sortir le sabre contre les putschistes alors même qu'elle reste muette face aux tripatouilleurs des Constitutions qui cherchent à se pérenniser au pouvoir. Même sur le front anti-terroriste, elle fait montre d'une timidité incroyable si fait que les peuples ont parfois eu l'impression d'être abandonnés à eux-mêmes.

Et comme pour ne rien arranger, certains dirigeants ouest-africains, de par leur prise de position, se comportent comme des valets locaux des Occidentaux ; tant ils font montre de larbinisme et d'obséquiosité et ce, à un moment où les peuples appellent à la rupture de l'ordre néo-colonial. C'est, du reste, l'un des reproches faits à Mohamed Bazoum dont la proximité avec la France semblait exaspérer certains de ses compatriotes surtout depuis que, chassés du Mali et du Burkina Faso, les soldats de Barkhane et de la force Sabre, ont déposé leurs valises au Niger.

En tout cas, la CEDEAO ne semble pas avoir fait une bonne lecture de la situation au Niger en exigeant la réinstallation de Bazoum dans ses fonctions de chef de l'Etat puisque cette exigence provoque davantage le courroux d'une partie des Nigériens. Peut-être aurait-elle dû tout simplement réclamer un retour rapide à l'ordre constitutionnel avec un civil à la tête de l'Etat. Et brochant sur le tout, elle est allée très loin en lançant un ultimatum aux putschistes tout en sachant que le pari était fort risqué.

Il urge qu'une solution soit trouvée à la crise nigérienne

En tout cas, à l'allure où vont les choses, tout porte à croire que le président Bola Tinubu que l'on sait très à cheval sur les principes de la démocratie, finira par manger... sa chéchia qu'il arbore fièrement. Car, s'il ne réussit pas à faire plier les putschistes de Niamey, il boira le calice de l'humiliation jusqu'à la lie. D'autant que l'histoire pourrait retenir que c'est sous son magistère que s'est effondrée à jamais l'autorité de la CEDEAO qui court ainsi le risque de mourir de sa belle mort. Comment va-t-il s'y prendre pour ne pas perdre la face et pour ne pas en arriver là ? Bien malin qui pourrait répondre à cette question surtout que par ses décisions, elle a réussi, sans le vouloir, à rendre sympathique la junte nigérienne. Il urge qu'une solution soit trouvée à la crise nigérienne. Car pendant que les uns et les autres se disputent le pouvoir à Niamey, les groupes armés terroristes, eux, ne font que gagner du terrain.

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