Afrique de l'Ouest - Un rendez-vous de la dernière chance à Abuja pour éviter l'embrasement au Niger

Après l'expiration de l'ultimatum ouest-africain exigeant le rétablissement du président renversé, Mohamed Bazoum, les dirigeants des pays de la Cédéao ont décidé de se réunir jeudi à Abuja, au Nigéria, pour un sommet extraordinaire sur le Niger. Il s'agira sûrement d'une occasion de dernière chance que l'organisation régionale va offrir aux militaires qui ont pris le pouvoir d'accepter que la crise soit résolue par le dialogue au lieu que le bloc puisse recourir à la force, qui reste tout de même sur la table si la junte n'obtempérait pas, et dès lors qu'elle a ordonné la fermeture de l'espace aérien du pays face à la menace armée.

« Les dirigeants de l'organisation ouest-africaine se pencheront sur la situation politique et les récents développements au Niger », selon le communiqué de la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (Cédéao) qui avait menacé, le 30 juillet, d'un possible usage de la force si le président Mohamed Bazoum n'était pas rétabli dans ses fonctions.

Avec les nominations qui se poursuivent au Niger, personne ne croit que les putschistes iront aux négociations pour que le président renversé soit rétabli dans ses fonctions. La junte a annoncé lundi soir la nomination d'un nouveau Premier ministre en la personne d'Ali Mahaman Lamine Zeine. Il remplace Ouhoumoudou Mahamadou, et cela intervient après que les militaires au pouvoir ont mis « fin », le 4 août, aux « fonctions » d'ambassadeurs du Niger en France, aux Etats-Unis, au Nigeria et au Togo, soit au moment où les pressions pour rétablir l'ordre constitutionnel se multiplient internationalement.

Même si la junte n'est pas disposée à coopérer étroitement avec l'organisation régionale, le secrétaire d'Etat américain, Antony Blinken, pense que la diplomatie est le « moyen préférable » pour résoudre la crise provoquée par le coup d'Etat au Niger. « C'est la démarche de la Cédéao, c'est notre démarche et nous soutenons les efforts de la Cédéao pour rétablir l'ordre constitutionnel », a-t-il déclaré dans une interview à Radio France Internationale.

La semaine dernière, les chefs d'état-major de la Cédéao avaient défini les contours d'une éventuelle intervention militaire contre les auteurs du coup d'Etat. Le bloc régional avait même préalablement dépêché une délégation à Niamey pour tenter de trouver une sortie de crise, mais ses émissaires étaient repartis sans avoir rencontré ni le chef des militaires au pouvoir, le général Abdourahamane Tiani, ni le président renversé, Mohamed Bazoum.

Pas d'intervention militaire immédiate ?

En attendant la tenue du sommet extraordinaire de l'organisation ouest-africaine, les commentaires sur la situation au Niger vont bon train partout. Les pros et les anti-coup de force donnent de la voix pour défendre leur position, au moment où un probable conflit fratricide inquiète la population de la région. Mais étant donné qu'aucun déploiement de troupe n'est observé au Niger, où le calme règne dans la capitale, les gens semblent croire qu'une intervention militaire immédiate pour rétablir le président Mohamed Bazoum n'est pas effectivement envisagée ; que la Cédéao est sur le point de la reconsidérer.

Malgré le souci de la sous-région de vouloir résoudre la crise en épuisant d'abord les efforts de médiation, et de revenir si possible à l'option militaire en cas d'échec des pourparlers, des réactions fusent de partout, pour ou contre une intervention armée au Niger. L'Algérie et le Sénat du Nigéria ont particulièrement haussé le ton pour s'opposer à la guerre, alors que les putschistes ont promis une « riposte immédiate » à « toute agression » de la part d'un pays de la Cédéao ou d'ailleurs. Le Mali et le Burkina Faso affirment qu'ils seraient solidaires du Niger et que toute intervention militaire serait considérée comme « une déclaration de guerre » à leur encontre.

Si l'organisation régionale maintient la menace de son éventuelle intervention militaire au Niger, le Conseil national pour la sauvegarde de la patrie (CNSP, qui a pris le pouvoir) redoute aussi que ce recours à la force vienne d'autres régions du continent africain. Dans un communiqué, il affirme qu'un « prédéploiement pour la préparation de l'intervention a été fait dans deux pays d'Afrique centrale », sans préciser lesquels. « Tout Etat impliqué sera considéré comme cobelligérant », ajoute le CNSP qui s'en prend aussi à la France qui martèle son soutien aux efforts de la Cédéao pour faire échouer la « tentative de putsch » au Niger.

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