Sénégal: Expulsion de Juan Branco - Ismaïla Madior Fall motive la décision

Le conseil du leader du Pastef, Juan Branco, qui s'est introduit au Sénégal malgré le mandat d'arrêt requis contre lui, puis arrêté en Mauritanie, avant d'être remis aux autorités sénégalaises, a été expulsé du Sénégal, après son face à face avec la justice. En conférence de presse hier, lundi 7 août, le Garde des Sceaux, ministre de la Justice, Ismaïla Madior Fall, juge que la décision est à la hauteur de la faute commise par l'avocat qui est placé sous contrôle judiciaire.

«L'Etat a montré toute sa force» sur l'affaire Juan Branco, du nom de cet avocat français et un des conseils du maire de Ziguinchor, Ousmane Sonko, qui s'est introduit «frauduleusement» au Sénégal, malgré le mandat d'arrêt requis contre sa personne. Selon le Garde des Sceaux, ministre de la Justice, Ismaïla Madior Fall, qui faisait le point de l'actualité judicaire avec les médias hier, lundi 7 août 2023, le Sénégal a marqué sa souveraineté.

«On avait dit qu'il est entré irrégulièrement dans notre territoire ; c'est grave. Mais s'il n'en sort pas irrégulièrement, c'est déjà bien. S'il en est sorti irrégulièrement, on espère que la coopération judiciaire internationale marche. Nous-mêmes, chaque jour, on remet des fugitifs ou des personnes qui sont entrées irrégulièrement dans notre pays à d'autres pays», s'exclame-t-il. Toujours à son avis, «le mandat d'arrêt international contre le concerné a produit ses effets car c'est sur la base de celui-ci que les autorités mauritaniennes ont remis l'intéressé à notre autorité de Police. Il faut saluer le fait que, grâce à la coopération internationale, l'Etat du Sénégal ait repris le fugitifs Juan Branco», a-t-il dit.

Le fait que l'avocat français soit rapatrié par avion, après son jeu de yoyo avec les autorités sénégalaises, n'est pas synonyme d'échec, a ajouté Ismaïla Madior Fall. «Le but de ce jeu, ce n'est pas de mettre les gens en prison, les torturer. Le but du jeu, c'est juste d'appliquer la loi. Aujourd'hui, il est inculpé par la justice sénégalaise. Il peut faire l'objet d'actes de poursuites ou de condamnation pénale. C'est une manifestation importante de souveraineté. L'essentiel est que l'Etat se soit doté des moyens d'exercer les poursuites appropriées et c'est ce qui a été fait».

Juan Branco n'est aucunement blanchi par la justice sénégalaise, a tenu à préciser le ministre. «Le mandat d'arrêt a été exécuté. C'est sur la base de celui-ci qu'il a été arrêté et conduit directement en prison (la Maison d'arrêt de Rebeuss) et présenté à un juge d'instruction. Lorsqu'il a été arrêté, par l'exécution d'un mandat d'arrêt international, le juge d'instruction l'a inculpé et lui a accordé la liberté provisoire. Il a été inculpé parce que les infractions dont il faisait l'objet sont les plus hautes poursuites : des infractions délictuelles pour certaines, criminelles pour d'autres. Ça veut dire que sa détention pour les besoins de l'information judiciaire peut même dépasser six mois».

Retenir Juan Branco en détention au Sénégal n'est pas un choix judicieux, selon Ismaïla Madior Fall. «Il se trouve que pour les faits visés, il ne peut pas être jugé en flagrants délits. C'est pour cela qu'il a été inculpé. On aurait pu le mettre sous mandat de dépôt pendant des années. Mais l'option du juge d'instruction a été de l'inculper et de lui accorder la liberté provisoire. Le Parquet ne s'y oppose pas, parce que la liberté est la règle, la détention est l'exception. Il n'est pas ressortissant sénégalais».

Comme justificatif de la décision judiciaire, il affirme aussi : «nous avons des accords de coopération judiciaire avec la France ; nous pouvons, à tout moment, coopérer avec elle quand il y a un besoin d'administration de la justice. Il n'y avait pas de raison de le garder dans les liens de la détention ; mais la procédure de l'information judicaire continue à son encontre. Il est possible que son contrôle judiciaire soit révoqué. Il peut être jugé lorsque l'information sera clôturée».

SOUTIEN DE ME BABACAR NDIAYE A JUAN BRANCO, LE MINISTRE DE LA JUSTICE TACLE LE BARREAU

«Il y a des indices graves et concordantes qui montrent qu'il (Me Babacar Ndiaye, ndlr) a aidé Juan Branco à faire ce qu'il a fait. Autrement dit, il l'a aidé à commettre des actes qui vont à l'encontre de la loi. C'est ce qui justifie que cet avocat soit arrêté pour les besoins de l'enquête et éventuellement pour les besoins d'autres suites judiciaires. Mais, pour le moment, il fait l'objet, il est poursuivi pour éventuelle complicité», a dit Ismaïla Madior Fall, expliquant l'arrestation de Me Babacar Ndiaye qui a été lui aussi libéré et placé sous contrôle judiciaire.

Répondant à la lettre de protestation du Barreau du Sénégal, après l'arrestation d'un de ses membres, le Garde des Sceaux, juge que les robes noires n'ont pas de quoi se plaindre. «L'arrestation s'est déroulée dans les règles de l'art. Le Procureur Général, avant d'arrêter l'avocat, a informé le Bâtonnier, par lettre. Elle suffit comme consultation. Il ne s'agit pas que le Bâtonnier donne son avis. Il n'y a aucun problème dans la procédure », conclut-il.

La justice continuera son travail sur cette question. L'affaire fera l'objet d'instruction. «Me Babacar Ndiaye est sous contrôle judiciaire ; il n'y a pas d'élargissement ou de classement sans suite. Les avocats ne sont pas au-dessus de la loi. Quand il y a nécessité de poursuivre un avocat, ça va se faire. Mais, les avocats sont poursuivis au niveau de la Cour d'appel. Les avocats bénéficient d'un privilège de juridiction. C'est-à-dire une procédure dérogatoire au droit commun», souligne-t-il.

Par ailleurs, a jugé le ministre, «c'est bien que le Conseil de l'Ordre des avocats ait fait un communiqué pour dénoncer la procédure, défendre un des leurs. Mais le Bâtonnier devrait s'employer à dire aux avocats qu'un avocat qui respecte sa déontologie, ne doit pas prêter main forte à des malfaiteurs. Un avocat ne doit pas faciliter la commission d'infraction».

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