Sénégal: Couverture du risque de production - La courbe ascendante de l'assurance agricole

10 Août 2023

De plus en plus d'agriculteurs et d'éleveurs souscrivent à l'assurance agricole ; ce qui protège doublement le producteur en cas de sinistre en lui permettant de couvrir le sinistre. Donc, de sécuriser ses revenus et d'avoir accès au crédit.

Depuis quelques années, l'assurance agricole connait un certain dynamisme au Sénégal. En atteste le nombre de souscriptions qui sont passées de 60 durant les trois premières années (2009, 2010 et 2011) d'existence de la Compagnie nationale d'assurance agricole du Sénégal (Cnaas), à plus de 612 000 assurés en 2022. « Il a fallu un intense travail de sensibilisation sur les vertus de l'assurance agricole ; ce qui a permis ce bond qualitatif », explique Omar Cissé Sow, Directeur technique et commercial de la Cnaas. L'assurance agricole permet à l'exploitant de se couvrir contre les aléas de la nature : mauvaise pluviométrie, inondations, dommages causés par des animaux, par des oiseaux, etc.

L'année 2017 marque un tournant avec le changement de Directeur général. Depuis, la courbe est ascendante. « L'assurance agricole marche maintenant au Sénégal. Elle est bien perçue par les producteurs grâce aux activités de communication et de vulgarisation ainsi qu'à la nouvelle politique de l'État qui encourage la couverture des risques de production en vue de créer des territoires résilients par rapport aux vulnérabilités liées, entre autres, au changement climatique », déclare M. Sow. Et les chiffres illustrent bien cette embellie. Les primes s'élèvent à 2 600 000 000 de FCfa. Mais, dans ce montant, l'État a payé la moitié puisque l'agriculteur ou l'éleveur ne supporte que 50 % de la police d'assurance.

« C'est une manière pour l'État d'encourager les producteurs et les éleveurs à recourir à l'assurance pour couvrir les risques de production », explique le Directeur technique et commercial de la Cnaas. Il informe que l'État s'y est pris par le bon bout pour mettre fin aux réticences à la fois socioculturelles et économiques des cibles. Si l'assurance agricole a le vent en poupe, c'est que les sinistres sont payés. En 2022, les indemnisations ont atteint 1 576 000 000 de FCfa. Il s'y ajoute, d'après Omar Cissé Sow, que sa structure fait tout pour payer les victimes en cas de sinistre dans un délai raisonnable. Ainsi, « 90 % des bénéficiaires ont reçu leurs indemnités et il ne reste que quelques dossiers à traiter », assure-t-il.

Ces résultats sont le fruit d'un travail dans la durée pour faire accepter l'assurance agricole. Amadou Ndiouga Ndiaye, premier Directeur de la Compagnie nationale d'assurance agricole du Sénégal, soulignait les débuts difficiles de cette sorte d'assurance avec 60 producteurs assurés lors des trois premières années d'existence de la société. « L'assurance agricole peine à se développer au Sénégal », disait-il en introduisant, en mars 2012, le sujet : « La gestion du risque agricole au Sénégal », lors de la 4e édition de la Semaine américaine à Dakar.

Il avançait comme facteurs explicatifs la méconnaissance par les exploitants agricoles de l'existence de cette structure, les revenus insuffisants, le faible niveau d'éducation financière des cibles et surtout un manque de confiance envers les compagnies d'assurance. La non-obligation d'assurance sur les risques de masse en fait également partie. En dépit de la situation morose d'alors, Amadou Ndiouga Ndiaye se disait confiant quant au développement de l'assurance agricole. Il avait vu juste.

Au Sénégal, tous les risques liés à l'agriculture au sens large (agriculture, élevage et pêche compris) sont assurés. L'assurance peut porter sur les calamités, c'est-à-dire l'ensemble des risques liés à l'exploitation. Il y a aussi la sécurité des productions. Il en est de même pour l'élevage.

Aux yeux d'Omar Cissé Sow, ce mécanisme est un bon moyen pour lutter contre les vulnérabilités, principalement dans un pays comme le Sénégal où 60 à 70 % de la population active s'adonne à l'agriculture. Outre la sécurisation de la production, l'assurance agricole facilite aussi le financement des paysans et des éleveurs. « Si derrière les producteurs et les éleveurs, il y a un organisme qui couvre les risques, les banques peuvent accorder facilement des crédits aux paysans et éleveurs », confie M. Sow.

Les banques et les institutions de microfinance qui ont compris les enjeux de l'assurance imposent maintenant aux producteurs de souscrire à une police d'assurance avant de pouvoir bénéficier d'un prêt. Avant la création de la Compagnie nationale d'assurance agricole du Sénégal, c'est l'État qui venait à la rescousse des producteurs en cas de sinistre pour éponger leurs dettes auprès des institutions financières.

Le Directeur technique et commercial de la Compagnie nationale d'assurance agricole du Sénégal est convaincu que l'assurance agricole a de beaux jours devant elle, même s'il lie ce développement à la poursuite de la sensibilisation et à l'exploitation de la téléphonie mobile qu'il considère comme un excellent outil de promotion de l'assurance agricole au Sénégal.

La pêche, le parent pauvre de l'assurance

À la création de la Compagnie nationale d'assurance agricole du Sénégal, en 2009, les trois sous-secteurs du secteur primaire, à savoir l'agriculture, l'élevage et la pêche, étaient ciblés. Si les produits d'assurance proposés dans l'agriculture et l'élevage suscitent un intérêt, voire un engouement, pour les agriculteurs et les éleveurs, il en est autrement pour la pêche. Pourtant, ce ne sont pas les risques qui manquent. Souvent, les disparitions en mer alimentent les pages des faits divers dans la presse.

Le Directeur technique et commercial de la Cnaas, avance des problèmes techniques qui expliquent la suspension des produits d'assurance pour la pêche. « Après cinq années de commercialisation de produits d'assurance liés à la pêche, nous nous sommes rendu compte qu'il y avait des difficultés par rapport à la géolocalisation des pirogues pour s'assurer de la réalisation effective du sinistre. Nous avons suspendu la commercialisation des produits pour la pêche, le temps de corriger les failles notées, notamment la géolocalisation des pirogues en mer », explique-t-il.

Omar Cissé Sow précise que la géolocalisation permet de s'assurer que la pirogue est en mer et, en cas de difficulté, d'alerter rapidement les secours pour sauver les pêcheurs en détresse. À ses yeux, la géolocalisation apparait comme un système de prévention des accidents en mer. Toutefois, il rassure et annonce que des produits de la pêche seront bientôt proposés aux acteurs.

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