Le Forum économique mondial (WEF) publie, depuis 2006, annuellement le rapport «Gender Gap» qui examine les inégalités et l'évolution des disparités entre les genres. Le classement de la Tunisie à la 128e place sur 141, contre 120e en 2022, est préoccupant et a suscité quelques interrogations en matière d'émancipation féminine et d'égalité entre les genres.
Le Forum économique mondial (WEF) vient de publier, à quelques jours de la célébration de la fête nationale de la femme, son rapport « Gender Gap 2023 ». Et comme à l'accoutumée, l'Institut arabe des chefs d'entreprises (Iace) publie une note concernant la lecture du classement de la Tunisie dans ce rapport.
Ce rapport, publié annuellement depuis 2006, examine les inégalités et l'évolution des disparités entre les genres en se basant sur quatre piliers clés, à savoir : la participation et les opportunités économiques, le niveau d'éducation, la santé et la survie et enfin l'autonomisation politique.
Le classement de la Tunisie à la 128e place sur 141, contre 120e en 2022, est préoccupant et a suscité quelques interrogations en matière d'émancipation féminine et d'égalité entre les hommes et les femmes. L'Iace essaye, à travers une note, de mieux expliquer le mode de calcul de cet indice et attirer l'attention sur des aspects plus critiques.
14 données
D'après l'Institut, il convient de noter que « cet indice mesure le gap entre les genres et ne prend pas en compte le degré d'émancipation ou d'autonomisation des femmes, ce qui démontre que l'émancipation et l'autonomisation ne sont pas nécessairement synonymes d'égalité. En d'autres termes, cet indice ne mesure pas les niveaux absolus de progrès ou de développement des femmes, mais plutôt les écarts entre les hommes et les femmes dans différents domaines ».
Par exemple, en ce qui concerne l'éducation, l'indice mesure le gap entre les genres en matière d'accès à l'éducation, sans tenir compte du taux d'éducation des filles. Cette approche est adoptée afin de ne pas pénaliser les pays disposant de ressources limitées.
En effet, l'indice prend en compte les résultats (outputs) plutôt que les (inputs). Par exemple, l'indice mesure l'écart entre les genres en termes de durée passée dans des postes de haute responsabilité plutôt que de prendre en compte la durée du congé de maternité. Cela met l'accent sur les disparités observées en fonction des résultats plutôt que des facteurs ou des moyens. L'objectif de l'indice est de fournir un aperçu de la situation des hommes et des femmes en ce qui concerne quatre principaux axes liés aux droits fondamentaux tels que la santé, l'éducation, la participation économique et l'autonomisation politique.
Cette raison pousse l'Iace à mieux expliquer le mode de calcul de cet indice composite basé sur 14 données dont 12 sont des données statistiques provenant d'organisations internationales, telles que l'Organisation internationale du travail (OIT), la Banque mondiale (BM), les Nations unies, l'Ocde et deux données provenant de l'enquête mondiale du WEF qui est, également, utilisée pour d'autres rapports tels que le rapport sur les risques mondiaux et le rapport sur les marchés de demain.
«Nous souhaitons, par la même occasion, attirer l'attention sur des aspects plus critiques concernant le classement de la Tunisie dans ce rapport disponible dans son intégralité sur le site du Forum économique mondial, c'est pour cela que nous recommandons aux responsables, experts et médias de le consulter pour pouvoir en tirer les constatations et les recommandations », déclare l'Institut arabe des chefs d'entreprises.
D'après la même source, le rapport montre, par ailleurs, que « les pays ayant mieux réussi leurs réformes ou le redressement de leurs économies sont celles qui ont intégré l'égalité des genres parmi les objectifs de leurs politiques publiques et programmes de réformes ; élément aussi manquant dans notre programme national de réformes ».
Parmi les cinq derniers au niveau mondial
Le classement en bas de l'échelle de la Tunisie dans « le pilier de la participation et de l'opportunité économique est une source d'inquiétude, en particulier lorsque nous examinons les indicateurs de la participation au marché du travail, estimation du revenu du travail, législateurs, hauts fonctionnaires et gestionnaires et travailleurs professionnels et techniques et constatons que le pays figure parmi les cinq derniers au niveau mondial. Ces classements sont établis en se basant sur les données statistiques fournies par l'Etat tunisien à l'Organisation internationale du travail », explique l'Iace.
Il est ainsi important d'accorder une attention particulière à ces aspects afin de réduire les écarts observés et calculés à partir des statistiques nationales communiquées par les organisations internationales.
«Il convient de noter que la mise en évidence des avancées réalisées par les femmes tunisiennes et de leur émancipation dissimule une réalité plus sombre. Il est intéressant de souligner que des pays tels que la France (classée 40e) et les Etats-Unis (classés 43e) font également face à des défis similaires, ce qui démontre que l'émancipation et l'autonomisation ne sont pas nécessairement synonymes d'égalité. La Tunisie n'est donc pas le seul pays confronté à ces problématiques », assure l'Iace.
A titre d'exemple, l'absence d'Assemblée des représentants du peuple (ARP) depuis juillet 2021, en raison de la suspension de ses travaux, explique l'absence de données sur la représentation des femmes au sein du Parlement (pilier de l'autonomisation politique). «Avec la reprise des activités parlementaires, il est prévu que cela se traduira certainement par une détérioration du classement relatif à la participation des femmes dans la vie politique dans le prochain rapport », prévient l'Institut arabe des chefs d'entreprises.