Ile Maurice: Permacrise internationale et locale - «Mère de toutes les crises», la dette devient une inquiétude majeure

Si la lutte contre l'inflation, qui entraîne un ralentissement économique, constitue un choix indispensable, bien que certainement difficile pour les États, de nombreux pays à travers le monde sont confrontés à un risque encore plus préoccupant : une crise de la dette.

Trouver l'équilibre entre ces priorités relève donc d'un véritable casse-tête, où aucun gouvernement ne peut se permettre de flancher. À Maurice, il est clair qu'une croissance et un alignement de la dette dopée par l'inflation sont la stratégie court-termisme. Cependant, il faudrait se méfier de cette approche sur le long terme.

Dans le monde, l'inquiétude d'une dette non maîtrisée dans les régions développées comme pour les pays en développement gronde. Au niveau mondial, la dette publique se chiffrait à USD 92 trillions à 2022 contre USD 17 trillions en 2002. Selon les Nations unies, les pays en développement sont les plus concernés par la crise de la dette, incluant la dette publique extérieure, c'est-à-dire la part de la dette d'un gouvernement due à des créanciers étrangers, qui est passée de 19 % à 29 % du PIB en 2021.

Certains pays sont déjà dans une situation appelant à une restructuration de la dette, dont la Zambie, le Ghana et le Sri Lanka, sans oublier le Pakistan et l'Égypte qui sont aussi en eaux troubles. Les pays développés ne sont pas en reste. À titre d'exemple, aux États-Unis le président Joe Biden a ratifié, le 3 juin, la loi qui permet une suspension provisoire du plafond de la dette des ÉtatsUnis, réduisant la menace d'une catastrophe économique due à un défaut de paiement.

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Dans le cas de Maurice, l'Article IV 2022 du Fonds monétaire international (FMI) prévenait des risques liés à notre niveau de la dette publique relatif à notre PIB. Déjà à l'époque, le FMI a recommandé d'établir un point d'ancrage budgétaire à 80 % du PIB et d'entamer un chantier de consolidation fiscale. Justement, on se rappellera que le gouvernement a amendé la Public Debt Management Act pour repousser le plafond de la dette à 80 % du PIB.

Dans son Debt Sustainability Analysis Report, le FMI estimait aussi que le ratio dette/PIB continuerait à augmenter, surtout considérant la tendance des dépenses étatiques, dont celles liées à la pension de vieillesse par exemple. On l'aura vu, en effet, les dépenses budgétaires allouées au social ont augmenté, ce qui est une bonne chose pour la population, mais moins bonne pour l'inflation.

Les mesures sociales représentent des dépenses de plus de Rs 65 milliards, soit une augmentation de 16% par rapport à l'année financière précédente et de 38 % par rapport à 2021. Les dépenses budgétaires sont de manière générale aussi en hausse, même si les revenus se voient aussi dopés par l'effet inflationniste sur la taxe ou encore l'effet de la dépréciation de la roupie sur les revenus touristiques ou d'exportation, entre autres. À ne pas oublier l'impact des taux d'intérêt sur le remboursement de l'endettement domestique et étranger.

Dans ce contexte où les dépenses augmentent et la maîtrise de l'inflation ne sont finalement pas une priorité, il est quand même étonnant de constater une estimation de la dette de moins de 80 %, comme l'indique la récente publication du ministère des Finances. Selon son estimation, la dette publique se chiffre à 79,7 % du PIB basée sur une valeur du PIB de Rs 622 milliards pour l'année fiscale 2022-23. Or, dans le Budget présenté début juin de cette année, le PIB pour 2022-23 était estimé à seulement Rs 614 milliards. Si l'on considère ce chiffre, la dette justement dépasse la barre des 80 %. Ce qui suscite notre intérêt, c'est de comprendre la stratégie réelle de désendettement, en dehors d'un PIB gonflé par l'inflation.

Si nous aspirons à retrouver une période de stabilité avec une inflation inférieure à un pourcent, il est nécessaire de mettre en place un plan clair et défini dans le temps pour maîtriser l'inflation tout en maintenant la dette à un niveau soutenable. Cela impliquera certainement des moments difficiles, mais cela pourrait être nécessaire pour des jours meilleurs à venir!

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